~》 On verra bien demain《~

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Ça fait neuf jours. Neuf jours que ces connards ne m'ont toujours pas fait sortir de cette cellule.

Je n'en peux plus.

L'autre con est toujours là, à me "surveiller".

Pff. Comme si j'allais réussir à m'évader, alors que je n'ai rien bouffé depuis que j'ai été transportée ici.

Il me regarde avec un air que certains appelleraient sûrement compatissant, mais je préfère parler de pitié.

Pour la trente sixième fois de la journée, il me tend son repas à travers la fenêtre de surveillance, mais je l'arrête avant qu'il ne me prenne la tête.

- Gâche pas ta salive, je ne le prendrai pas.

Il soupire, désemparé, mais n'insiste pas et retourne à son poste -non sans laisser le plat.

Enfoiré.

J'ai faim et il le sait, et mon estomac ne tiendra pas longtemps face à cette tentation.

En guise de confirmation, je fut prise d'une violente contraction de mes tripes et un gargouilli monstrueux se fit entendre lorsque l'effluve du repas atteint mes narines.

J'ai tellement faim.... Juste une...
Juste une bouchée ne ferait de mal à personne....

Je m'approche de cette odeur ennivrante, pantelante.
J'ai bien merité un petit morceau, me dis-je à moi même quand je fais glisser la viande dans mon palais.

À deux doigts de perdre le contrôle, je me fais vomir juste à temps, et ça a beau être la quatrième fois cette semaine, je hais cette sensation.

Face à ce triste spectacle, je remercie d'un regard lourd de sens l'autre abruti qui m'inflige ça, ce à quoi il répond en se levant d'un bond, complètement furax.

- Mais bordel pourquoi tu fais ça !? Tu vois pas que tu es en train de te détruire ?! TU NE PEUX PAS MOURRIR, ANAXIMANDRE OKAY ?ALORS ARRÊTE ! ARRÊTE DE TE FAIRE DU MAL !

Sa colère redescend légèrement et il passe un main nerveuse dans ses cheveux, puis poursuit. Quand à moi, je suis bien trop fatiguée pour riposter alors j'écoute malgré moi.

- Écoute. Je... Je sais que tu n'ai pas en accord avec... Avec toute cette putain d'évolution humaine. Seulement voilà, c'est ainsi que tu es, et t'affamer n'y changera rien.

- Tu ne sais rien. Je parviens à articuler. Tu ne sais rien et tu te permets de juger. Je n'étais pas comme ça avant. Avant, j'étais comme les autres, j'étais même désespérée par mon manque d'originalité ! J'étais la fille ordinaire, que personne ne calcule, au fond de la classe, en train de ruminer ses pensées et d'essayer de prédire les réactions de chacun si je mettais fin à mes jours !

J'essuyai la bile autour de ma bouche d'un revers de manche, haletante, et m'approchai du connard, visiblement surpris de mon monologue.

- J'étais tellement mal dans ma peau ! Tellement triste ! Toujours à réfléchir sur le sens de la vie et à me perdre dans mes pseudo-psychanalyses !

Je m'arrêtai, les larmes roulaient sur mes joues. Je tremblais de tout mon corps. J'assénai un violent coup de poing sur le mur matelassé pour reprendre mes esprits et regardai l'enfoiré dans les yeux.

- Et pourtant. Qu'est ce que je ne donnerai pas pour revenir à cette place.

Mes petites histoiresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant