Chapitre 5

18 6 4
                                    

1743, France

Le jeune garçon tournait en rond dans la salle de réception. Les invités se ruaient sur lui et l'empêchaient de penser. Ce qu'il cherchait avait étrangement disparu et cela le peinait. Il recevait de nombreux compliments qui s'envolaient dans les abysses de l'oubli. Il se fichait de ce qu'ils pouvaient juger sur lui et son soi-disant talent. Des mains s'agrippaient à lui comme pour chercher son attention, eux qui s'étaient montrés hostiles à cet élève mystérieux qui, pour couronner le tout, avait les yeux d'un esclave. De nombreuses demandes se laissaient entendre, tous le voulaient maintenant, lui ne voulait qu'elle.

« Hé bien Jisung, que vous arrive-t-il ? vous êtes tout pâle... Enfin, c'est une façon de parler, votre couleur reste un peu spéciale, heureusement que la poudre blanche fait des miracles.

– Où est votre fille ?

– Vous devez jouer ?!

– Non, non la représentation est bien finie mais j'aimerai... »

Il fut assez confus et ne savait comment formuler cette demande. Il devint subitement rouge et fit comprendre à l'homme la raison de son inquiétude.

« Ah, je comprends. Elle est dans le jardin, elle n'est pas fan des foules. Prenez cette porte que voilà. »

Jisung fit sa plus belle révérence pour prendre le chemin du long couloir. Ici, le calme s'entendait avec quelques bruits. Ce ne fut seulement une fois dehors qu'il profita pleinement d'un silence complet. Seuls les oiseaux nocturnes laissaient leur chant s'intensifier dans la clarté de la lune. Il ne la vit directement. Il se balada dans le magnifique jardin sculpté avec goût. Des statuts et des buissons décoraient le chemin. L'allée de gravier fit un son amusant à chaque pas. Au loin, de douces vagues résonnaient comme un écho. Tout était si paisible que l'envie de vivre dans ce jardin lui montait à l'esprit. Les arbres aux alentours n'étaient pas très grands mais formaient tout de même des bras protecteurs autour de lui comme le faisait sa mère. A cette pensée, il eut une vague de nostalgie avec une pointe de regret. Elle lui manquait terriblement. Pour son père, il était habitué. Il voyageait beaucoup et devait souvent retourner dans son pays natal. Il ne lui disait jamais rien sur ce dernier. Jisung ne savait même pas de quel pays il était originaire. Mais cela, il s'en moqua. Jisung était cet être étrangement inconnu. Il se connaissait comme il le pouvait et cela lui convenait. Recherchez ses origines étaient une perte de temps, une bataille déjà perdue qu'il n'avait envie de mener. En revanche, son cœur se livrait déjà à une première bataille.

Elle était assise sur un banc, les yeux clos, la brise sur son corps. Elle releva les paupières, légèrement surprise et montra un doux sourire lorsque la lune avait éclairé le beau visage du jeune homme. Un sourire lui échappa et il s'assit.

« Que faîtes-vous ici seule ? »

Elle reprit son occupation et lui répondit :

« Je profite de ma jeunesse avant que je sois mariée.

– Je n'ai pas l'impression que votre vie et celle d'une femme mariée soit si différente. »

Elle fut prise d'un faible rire enfantin. A l'entente de ce son merveilleux, le brun sourit de gaieté. C'était rare qu'elle agisse ainsi et il adorait. Mais alors qu'il planait d'un bonheur nouveau, elle vint lui arracher le cœur par sa réponse cruelle.

« C'est très différent ; une fois mariée, vous perdez votre liberté. Malheureusement, je vais bientôt quitter ce petit confort.

– Vous allez vous marier ?! S'empressa-t-il.

– Oui, dans quelques jours. Je suis promise à un homme fort sympathique mais dont je ne suis point amoureuse. »

Son cœur s'emballa à sa voix pleine de regrets. Il fut déconcerté, désemparé, réduit à néant. Ses pensées fonçaient à toute allure dans sa raison, incapable d'en attraper une. Il se mit même à trembler. Mais l'explication à tout cela se trouvait logée dans son cœur, il n'avait, pour le moment, pas la moindre envie de s'y aventurer.

« Qu'avez-vous ? Etes-vous malade ? »

Il tenta de reprendre ses esprits pour balbutier quelques mots :

« Ce n'est rien, je- j'ai un peu froid. »

Elle passa un bras autour de lui pour qu'il aille se blottir au creux de sa poitrine comme il le faisait avec sa génitrice. Elle lui caressa les cheveux d'un geste doux et tendre qui apaisa le jeune homme. Il entendit le délicieux son de son cœur qui battait près de son oreille. Les deux cœurs semblaient communiquer leur amour sans que les deux enfants en prennent conscience. Leur innocence volait en éclat pour les protéger du monde extérieur si brutal, il ne voulait la laisser partir.

Violoncelle || H.jsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant