Chapitre 2: Je sais que tuer, c'est mal.

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Ce matin je me lève, encore tremblant. Je me dirige vers le meuble en bois fait à la main qui me fait office de cuisine et j'en sors un paquet de brochettes au bœuf volé il y a quelques jours. Parfait.
Je fais un feu et je fais griller la viande, le regard perdu au loin vers la rivière, soudain pris d'un flashback.

Je suis dans a côté de chez moi, je mange des pâtes crues car je n'ai rien pour les cuire. J'entends rire au loin, mais je ne me rends pas compte que les sons se rapprochent peu à peu, quand quelqu'un hurle: «C'est Allen Massey! Vite, appelle la police!»

Je sursaute et regarde d'où provient le cri, et je vois, à une dizaine de mètres, trois adultes, n'ayant même pas la trentaine, d'un air terrorisé.

L'un a murmuré, assez fort pour que je l'entende, une petite réflexion sur les quelques meurtres que j'avais déjà commis, souvent des gens qui me reconnaissaient.
Sans réfléchir, j'ai attrapé mon couteau et je les ai poignardé.

Je reste immobile. Les flashbacks sont des choses horribles qui restent coincées sur notre rétine. On peut lire dans mes yeux la froideur que je garde depuis la vue de Cherry, allongée au sol, inerte. Je la croyais morte sur le coup.

Le flashback continue.

Je me rappelle de mes pensées à ce moment précis. J'ai compris que je n'avais plus rien à perdre. J'avais ce sentiment de vengeance qui bouillonnait au fond de mon estomac, et qui me brulait tout le ventre, et je suis devenu fou. J'ai commis plusieurs meurtres, et quand j'ai réalisé mes actes il était déjà trop tard.

Une petite voix se fit entendre:
«Robert?»

J'ai levé les yeux vers la source du bruit.

Ally.

«-Ah, c'est toi...

-Salut.

-Salut, ça va?

-Ouais. Faisons connaissance.

-A toi l'honneur

-Tu es majeur?

-Quoi? Non, j'ai 17 ans.

Elle plisse les yeux.

-Toi, tu as fugué je pense.

-Non. Je me suis fait jeter dehors par mes parents.

-Et pourquoi?

Elle croise les bras.

Je réponds.

-Et pourquoi je te le dirais?

-Parce que je m'appelle Ally j'ai une vie normale et en me baladant je tombe sur un mec qui vit dans une cabane, même pas majeur, et qui ne peux pas arrêter de me regarder d'une de ces froideurs!

-J'ai un regard froid avec tout le monde.

-Possible. Mais ce n'est pas la question.

Elle attends en me fixant.

-Ok, dis-je, parce que j'ai fait une connerie. J'ai volé de l'argent au compte bancaire de mes parents. Je l'ai vidé. Ça te va?

-Ça se tient plus ou moins. Au fait, en parlant de connerie, dans mon lycée les gens n'ont qu'un nom à la bouche, un certain Allen, mec super dangereux qui vivrait dans le coin. Ce gars doit vraiment être dérangé. Tuer des gens pour les voir souffrir c'est sadique! Il doit être schizophrène et entendre la voix de Satan dans sa tête, ce n'est pas possible autrement. Pour lui, «connerie» n'est pas le mot assez puissant.

Je ris malgré moi.

-Il a peut-être des comptes a rendre.

Je soupire

-Tu le défends drôlement toi, dit-elle, enfin bref. De base le but de ce que je voulais te dire c'est que j'aimerais que tu fasses attention. Allen est en liberté, et bien que je te connaisse depuis hier seulement, je n'aimerais pas qu'il t'attrape et qu'il te fasses souffrir avec ses coups de couteau dans les mains, les pieds, les cuisses, les côtes, le cœur ou la nuque. Aïe.

-Oui, je te promets.

-Et tiens, continue Ally en tendant un couteau de cuisine, utilise le comme une arme de défense, si jamais tu te retrouverais nez à nez avec ce mec louche.

Je lui souris en la regardant. Elle a des cheveux ondulés, châtains avec des reflets blonds, au soleil. Elle ne semble pas maquillée, et ne cherche même pas à cacher ses quelques boutons d'acnée. Elle a quelques petits défauts physiques mais je la trouve belle a sa façon.

«-Tu as quel âge Ally?

-Là je vais prendre 16 ans dans dix jours.

-Bon anniversaire alors.

-Qui te dit que dans dix jours je ne viendrais pas te voir?

Je baisse les yeux sans trouver quoi dire, puis je lance une phrase totalement incontrôlée.

«-Et si tu venais demain soir, manger avec moi.

-Euh, oui, ça marche.

Elle semble réticente a la nourriture peu hygiénique que je mange.

-On mangeras autre chose que des brochettes de viande cuites devant un feu de bois.

Je souris et elle aussi.

-Ça me rassure, rit-elle. J'emmènerai des sandwitchs pour nous deux.»

Et elle part.

«Bon alors, je murmure, mettons tout au clair. Apparemment je fais la une dans les couloirs du lycée. Mauvaise chose à savoir.
Ensuite Ally dit avoir peur d'Allen, mais c'est moi. Alors indirectement elle a peur de moi. Ça semble logique.
Comment la mettre en confiance?»

S'ensuivit d'un blanc de réflexion. Je soure. Il faudra gagner sa confiance coûte que coûte.
Et passer du temps avec elle est une bonne idée
Mais d'un autre côté, quand elle verra les photos affichées en ville, elle risque de me reconnaître. J'ai beaucoup changé en un an: J'étais un gamin aux joues rouges qui aimait jouer les beau gosses en fumant des clopes devant le lycée, j'imitais les gens que j'admirais, comme Jason Wright. Maintenant je suis un tueur en série, je me cache à longueur de journée sous la capuche de mon sweat, je vole la nourriture et les objets quotidiens. Le gamin est devenu grand, mais il a mal évolué. Maintenant j'ai un regard froid rempli de vécu. Je n'ai plus aucune pitié pour qui que ce soit, même pour Cherry. Tout ça pour dire que malgré ce changement, je suis toujours reconnaissable.

Je suis parfaitement mature, et je sais que tuer, c'est mal, seulement si je ne le fais pas je serais exécuté. Je ne peux m'empêcher de vouloir satisfaire ma vengeance un peu trop avide faute de souffrance quotidienne, mais je me retient. Moins de morts je causerais plus j'aurais de chances de vivre encore un an minimum.

Je soupire. Dans quel pétrin je suis, enfin. Je suis épuisé et je dis n'importe quoi. Je ne sais pas où j'en suis.

J'enfile une doudoune à capuche et je pars discrètement en direction de la ville. J'ai des choses à voir absolument.

SERIAL KILLEROù les histoires vivent. Découvrez maintenant