Chapitre 1 : Le point de rupture.

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Redereasm,
Des dizaines et des dizaines de générations plus tard après la mort de Galbad.
37e année de règne du Roi Cyrus.

Les nombreux gratte-ciels des quartiers industriels et économiques découpaient l'horizon, montant très haut dans le ciel. Étant une ville de plus en plus dense, Redereasm s'est vu adopter un style étrange – fortement inspiré du style roman – consistant à créer une sorte de quartier économique secondaire plus haut dans le ciel à partir de passerelles qui reliaient les bâtiments entre eux. Les rues étaient étroites mais les architectes poussaient les limites des constructions verticales à leurs maximums afin d'utiliser au plus l'espace exploitable, utilisant principalement de la pierre blanche et du verre. Ils usaient de leur talent pour que cette ville devienne ce qu'elle est.

Il était 7h15 quand Kazuki monta avec beaucoup d'autres passagers dans la ligne 6 qui surplombait la ville, au nord-ouest du quartier bas.
À moitié endormi et avachi sur son assise, et aussi bercé par les secousses du train, il ouvrit néanmoins un œil suite au regard pesant d'une dame, elle aussi en costume. Celle-ci le dévisageait chaque jour à la même heure, regardant ses cheveux bruns mal coiffés avec de la cire, quelques mèches tombant sur son visage marqué par le temps – et l'alcool –, en passant par son regard ocre creusé par les cernes. Mal à l'aise, Kazuki se remit bien sur son siège, détournant le regard en se raclant la gorge. Peut-être essayait-elle de sonder au plus profond de lui ses vices et ses penchants, de deviner le genre de vie qu'il menait, ou peut-être rien de tout ça.
Chaque jour, Kazuki sortait avant cette dame et se dépêchait d'arriver à son bureau.

Tout se passait vite. Il entrait, posait son manteau, rentrait sa carte dans l'horodateur, s'asseyait, travaillait. Et ce, du mieux qu'il le pouvait.
Le laboratoire dans lequel il travaillait, la société I.R.I.S., était très pointilleuse et exigeante avec ses employés.
"Le temps c'est de l'argent" alors Kazuki faisait de son mieux pour tenir les temps de production. Il avait été pistonné par ses parents qui ne voulaient que le meilleur pour lui, mais voilà 17 ans qu'il était employé ici et qu'il n'était toujours pas assez compétent pour I.R.I.S. Alors qu'il se levait en vue de prendre son quatrième café, son surveillant robotique, arborant le chiffre 009 sur le crane, le retint. Cela faisait plusieurs fois en deux heures.
— « Bonjour Kazuki, il est 9h53 et vous n'avez achevé que 47% de la première partie de votre travail. À cette heure là, vous devriez avoir achevé 15% de la deuxième partie de votre projet. Je vous conseille donc de vous rasseoir et-
Bordel Ohonine, je vais juste prendre un café ! Je travaille comme je peux, j'ai juste besoin de ÇA, alors lâche-moi pour une fois ! Je ne suis pas une machine, j'ai besoin d'une pause ! Merde ! » cria le quadragénaire en partant pour la cafetière sous les yeux inquiets de ses collègues qui sortirent à peine leur tête de leur box. Mais pas le temps pour ça. Ils se remirent vite à taper sur leur clavier, à griffonner leurs feuilles de calculs complexes et de formules chimiques.

Très tard le soir, bien après le départ de ses collègues mais avant le couvre-feu imposé par l'entreprise, Kazuki rentra chez lui, excédé. Accueilli froidement par sa femme – la routine, le travail et les années de couple n'aidant pas –, il alla de suite voir comment allait sa fille dans sa chambre. Elle dormait, il lui semblait, paisiblement malgré son masque à oxygène sur le nez. Elle était la cause de son acharnement au laboratoire I.R.I.S., il était payé selon l'heure alors plus il travaillait, mieux il l'était. Hélas, il n'arrivait jamais à amasser assez d'argent pour soigner son enfant entre les piles de factures et les différents frais qui rongeaient son porte-monnaie.
Un verre de cognac et une ou deux pilules du "Bonheur" – des anti-dépresseurs – plus tard, et il s'endormit devant la télé, dans le sofa.

Black Rain Empire (en cours) Où les histoires vivent. Découvrez maintenant