Délicieuse obsession

Chapitre 10

Quelques semaines plus tard...

Marian

DANS UN SILENCE OUATÉ, la neige enveloppe le paysage campagnard d'un épais manteau immaculé. Tout est calme et paisible. De chaque côté de la route, les arbres étendent leurs branches blanchies par la poudreuse. La fine couche de givre qui les couvre scintille sous les faibles rayons du soleil hivernal. C'est presque féérique.

C'est un paysage de carte postale, pensé-je.

Cependant, tandis que la Porsche file à travers le Connecticut sur le ruban d'asphalte, le soleil disparaît soudain et la neige se remet brusquement à tomber.

Le mouvement que fait Simon pour enclencher l'essuie-glace attire inévitablement mon regard. Je remarque alors qu'il me jette un bref coup d'œil. Immédiatement, mon corps se raidit en réponse au sourire légèrement narquois qu'il m'adresse. Mais déjà, il retourne à sa conduite. Je l'observe du coin de l'œil. C'est plus fort que moi. Au bout d'un instant, il fronce très légèrement les sourcils tandis qu'il semble se concentrer un peu plus sur la route. La visibilité décroît en effet.

Je retiens un soupir d'exaspération.

Même la musique qui joue en sourdine — c'est pourtant un morceau que j'adore — n'arrive pas à alléger la tension qui règne dans l'habitacle. Ou plus exactement, entre Simon et moi.

J'essaie de décontracter les muscles de ma nuque et de mes épaules. Ils sont si tendus. Je suis si tendue. Je le suis depuis l'instant où j'ai compris que je n'aurais d'autre choix pour me rendre dans le Connecticut, afin d'assister au mariage de Shana et Keith, que de le faire en compagnie de Simon.

Tout avait commencé quelques heures plus tôt...

On y est, avais-je pensé en plaçant la valise dans le coffre de ma voiture. Dans quatre jours exactement, Shana épouse Keith.

Il faisait un froid de canard. Aussi, je m'étais dépêchée de m'engouffrer dans ma Mustang cabriolet.

La veille, Shana et Keith étaient partis pour la propriété familiale des Rigdale dans le Connecticut. Il était prévu que Steven, le frère de Shana, les témoins — dont je fais partie — et leur compagne et compagnon devaient tous les y retrouver ce soir afin d'assister au dîner. C'était un genre de repas de répétition avant l'heure. Nous passerions ensuite les trois jours suivants ensemble. « Quelques jours agréables entre amis », avait dit Shana.

Agréable en compagnie de Simon Cross ? Cela reste à voir ! Parce que rien que l'idée de passer plusieurs jours en sa présence me met déjà les nerfs en pelote !

J'avais tourné la clé de contact. Le moteur avait à peine frémi avant de s'éteindre dans un petit tressautement. Nouvelle tentative. Même résultat.

Oh ! Non ! Non ! Pas ça ! Pas maintenant ! Allez, s'il te plaît..., avais-je supplié en essayant encore une fois.

Mais ma fidèle Mustang avait choisi le pire moment pour me lâcher. C'était une vraie trahison. De rage, j'avais donné des petits coups du plat de la main sur le volant.

J'étais sortie de la voiture et avais ouvert le capot pour effectuer les quelques vérifications de base. Je n'avais strictement rien vu d'inhabituel. Grelottante, j'avais refermé le capot et m'étais à nouveau installée derrière le volant. Après plusieurs tentatives infructueuses, je m'étais résolue à admettre l'évidence.

Je garde mon calme, avais-je songé en respirant plusieurs fois à fond.

Bon. Premièrement : appeler Shana pour l'avertir que je vais être au minimum en retard et que je risque même de n'arriver que demain. Deuxièmement : téléphoner à un dépanneur pour faire remorquer cette vieille Mustang récalcitrante et capricieuse au garage. Troisièmement : prier pour qu'on puisse la réparer rapidement. Bon, au pire, je louerai une voiture.