Chapitre 6

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Simon

L'IMMEUBLE DE MARIAN n'est plus qu'à quelques mètres. Je repère une place libre, mets mon clignotant et range ma Porsche le long du trottoir. Levant les yeux vers l'étage de son appartement, je constate qu'il y a de la lumière à ce qui me semble être le séjour.

J'hésite encore, mais en repensant à l'incident de cet après-midi, d'un geste décidé, je coupe le contact.

Après avoir manqué de me faire écrabouiller par un chauffard, j'étais rentré au bureau d'une humeur massacrante. Je n'avais cessé de rouspéter et de vociférer. Suite à une nouvelle réflexion de ma part — qui, je dois l'avouer, n'était ni très juste ni très appropriée —, Amber, mon assistante, m'avait fixé un instant avant de repousser les documents que nous étions en train d'étudier.

— Ne me demandez pas pourquoi, parce que cela reste incompréhensible même pour moi, m'avait-elle dit très calmement en rivant son regard au mien, mais j'aime bien travailler avec vous. Mais si vous continuez comme ça, il va très vite falloir me trouver une remplaçante. Il n'y a rien, strictement rien, qui justifie que je reste là à subir ce traitement.

— Une petite augmentation le justifierait sans aucun doute, avais-je lancé, avec causticité.

— Non, avait-elle affirmé. C'est là, où vous commettez une erreur. Même la plus astronomique des augmentations ne me ferait pas changer d'avis.

Sur ce, elle m'avait laissé en plan et avait décrété qu'elle prenait le reste de sa journée.

— Avec toutes les heures supplémentaires que j'ai faites rien que ce mois-ci, je crois que vous pouvez bien m'accorder ces deux heures, s'était-elle justifiée avant de partir.

Je n'avais pas argumenté. Moi aussi j'aime travailler avec Amber. Après toutes ces années, nous formons une bonne équipe. Et je dois avouer que cela m'aurait ennuyée qu'elle donne sa démission. Et je savais qu'au vu de ses compétences, elle n'aurait aucune difficulté à trouver rapidement un autre poste.

Un peu plus tard, Keith m'avait appelé sur la ligne intérieure.

— Alors, ce nouveau contrat avec Colburn ? avait-il demandé lorsque j'avais décroché.

Nous en avions discuté un moment en détail, passant en revue les changements par rapport aux précédents accords.

La discussion avait ensuite dérivé sur le prochain mariage de Max avant que Keith n'en arrive inévitablement à parler de Shana.

— Je la vois ce soir, avait-il dit sur le ton d'un adolescent attendant son premier rendez-vous.

Bon, là, j'exagère peut-être un peu.

Mais, putain, j'ai l'impression que Max et lui ne parlent plus que de leurs nanas !

Bon, là aussi j'exagère un peu. Mais pas tant que cela !

N'empêche que cette information n'était pas tombée dans l'oreille d'un sourd. Et le reste de l'après-midi, elle avait peu à peu pris forme dans mon cerveau. Peut-être Marian ne verrait-elle pas son Kenneth ce soir ? Peut-être serait-elle seule chez elle ?

J'avais ensuite été tenté de l'appeler pour l'inviter à sortir. Mais après réflexion, et tenant compte du fait qu'elle a des tendances lunatiques, je m'étais dit que j'aurais plus de chance d'aboutir si je me présentais directement au loft. Après tout, comme elle me l'avait déjà fait remarquer : ce n'était pas parce qu'elle s'était montrée « civilisée » — vu les circonstances, c'était un peu normal — et qu'elle ne m'avait pas raccroché au nez la dernière fois, que je devais espérer quoi que ce soit.

Délicieuse obsessionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant