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— Florie ? Ça va ?

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— Florie ? Ça va ?

— Oui, oui, ça va...

Je m'approche et elle s'empresse d'essuyer ses joues humides.

— J'ai dit un truc qu'il ne fallait pas ?

Elle secoue la tête avant de se redresser.

— Non, non, c'est juste que... Je viens de déménager, tu le sais.

— Oui, tu me l'as dit avant-hier. Et tu viens d'où ?

Oui, je sais, le tact n'est pas mon meilleur ami. Je me mords l'intérieur des joues pour m'empêcher de dire une autre bêtise et aggraver la situation.

— De nulle part...

Je dois avouer que je m'attendais pas à cette réponse. J'en reste un instant sans voix, ne sachant pas trop quoi dire. Que voulez-vous répondre à ça ?

Finalement, c'est elle qui reprend la parole avant que je n'aie eu le temps de penser à une réplique adéquate.

— Mes parents doivent changer de ville régulièrement à cause de leur travail. J'ai déménagé tellement de fois dans ma vie que je ne saurais même pas te dire dans quelle région je suis née. Je n'ai pas de racines. Je n'ai pas de vrai chez-moi.

Je m'assieds à ses côtés et la laisse continuer sans l'interrompre. Je sens qu'elle a besoin de laisser sortir ce qui pèse sur son cœur. Elle a besoin de quelqu'un pour l'écouter.

— On a déjà déménagé trois fois rien que cette année, m'explique-t-elle en soupirant. Mes parents m'ont promis de faire en sorte qu'on reste ici au moins jusqu'au bac, mais je sais très bien que ce n'est pas à eux de décider ça.

— J'imagine que ça doit être dur à vivre, murmuré-je, le regard dans le vide.

— Et tu es loin de la vérité. C'est horrible. Au début, je trouvais ça palpitant, le changement, le voyage, la découverte... Mais c'est rapidement devenu lassant. Ne pas avoir de stabilité. Ne pas avoir le temps de se construire une vie, des habitudes. Nous ne sommes jamais restés plus de deux ans dans une même ville. Et à chaque départ, c'était la même chose, il fallait tout abandonner. C'était toujours les mêmes adieux déchirants, les même amis qui font des promesses d'amitié éternelle, et qui ne donnent plus de nouvelles... Sitôt partie, sitôt oubliée.

— Et... Et pour les cours ?

— Je fais comme je peux. Au final, le pire ce n'est pas départ, c'est l'arrivée. Débarquer en plein milieu de l'année, dans une classe déjà construite où tout le monde se connaît... Se sentir comme une intruse. Isolée, mise à l'écart. Et tout est à recommencer. J'ai fini par ne plus vouloir me faire de nouveau amis. De toute façon, je savais que j'aurais à les quitter tôt ou tard... J'en avais assez de souffrir à chaque nouveau départ. Alors je ne voulais plus avoir d'attaches nulle part. Mais je me sens seule, parfois.

— Je comprends...

— Tu as des amis, toi ?

— Non. J'en avais une, avant. Elle s'appelait Clémence. C'était ma meilleure et ma seule amie. Elle a été l'une des plus belles choses qui soient arrivées dans ma vie. Mais aussi la pire. Il y a cinq ans, elle a déménagé. Elle est partie, et je me suis retrouvée toute seule. Et je n'ai plus jamais eu de nouvelles d'elle. Pourtant, c'est pas faute d'avoir essayé... Mais elle m'a ignorée. Elle m'a rayée de sa vie avec une telle facilité que je me demande si toutes ces années d'amitié ont réellement signifié quelque chose, pour elle... Ou bien si j'étais juste un bouche-trou parmi d'autres. Je me suis sentie trahie, et depuis je suis incapable de me faire de nouveaux amis. Je suis devenue trop méfiante, je n'arrive plus à accorder ma confiance aux autres. J'ai l'impression qu'ils me veulent tous du mal. Qu'ils finiront tous par me détruire, un jour ou l'autre. Tous des hypocrites...

— Et à moi ? Tu penses pouvoir me faire confiance ?

— Je ne sais pas... Je ne te connais pas vraiment, finalement.

— Je sais, mais personnellement ça me suffit. Je te trouve géniale, comme fille. Tu dégages beaucoup d'assurance, et en même temps t'es une fille simple, drôle, gentille, spontanée... Tu sais écouter et comprendre les gens. Ça m'a fait du bien de te connaître, de passer du temps avec toi, de te parler... J'aimerais bien être amie avec toi.

J'ai l'impression de recevoir un coup de poignard en plein cœur. Et en même temps, cela fait des années que je ne me suis pas sentie aussi bien. Je sens une étrange chaleur envelopper ma poitrine. Et je sais ce qu'elle signifie.

Je lui fais confiance.

Oui. Je ne la connais que depuis quelques jours, mais pour une raison inexplicable, je lui fais confiance. Parce que j'ai le profond sentiment que si je lui accorde ma confiance, ma si précieuse confiance, elle ne la trahira pas. Elle ne me laissera pas tomber.

Parce qu'au fond, cette fille est comme moi.

Comme tombe la neigeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant