je suis jalouse de la lune

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stade terminal.

je l'attend. je suis dans mon lit, seule. je la sens. mon coeur bat de plus en plus fort. je ferme les yeux dans l'espoir de m'évader. trop tard, ses contours se dessinent dans le noir sous mes paupières. ma main s'agrippe à mon drap. ma respiration se saccade. c'est trop tard je t'ai dit. essaye pas de me consoler. je suis impuissante, contre les astres, mon esprit embrumé, mes joues mouillées, mon collier que je triture nerveusement. elle s'est déjà emparé de mon âme. je vais devenir une coquille vide. peut être. alors pourquoi je me sens plus vivante que jamais. je me sens en vie, et je souffre, et je me sens en vie, et je souris. c'est con, d'aimer cette délicieuse souffrance. c'est insupportable. cette cacophonie dans le silence. l'écho de son rire dans le vent. son murmure dans l'incessante mélodie de la ville. je ne connais pas son odeur, et pourtant à chaque pas je sens sa présence dans le parfum des rues parisiennes. quand il me caresse, il me touche, il m'embrasse, elle me tourmente. le monde tremble au rythme des coups de reins, et quand cet homme souffle dans mon cou, j'imagine cette fille poser sa main sur mon épaule. ses longs doigts dessiner des arabesques sur mon décolleté. ma peau presque salie par des baisers qui ne sont pas les siens. alors il part. et je suis seule avec elle.

avec elle. je ne sais plus. avec elle. j'aimerais tellement. des sourires attendris. mon nez dans sa chevelure ébène. je t'ai dit que c'était trop tard. j'ai tatoué son prénom sur ma rétine. et si on se pendait ? j'ai si mal. mes larmes ornent mon sourire. je l'imagine. un, deux, trois. elle me tient la main. ses pommettes se rosissent. elle pose ses lèvres pêches sur les miennes. et... non ça ne va pas. son sourire sonnait faux. je rembobine. mes membres lourds roulent sur mon matelas. je dois arrêter de penser à elle. je pense à elle. 

merde.

pars.

je t'aime.

je sais pas.

laisse moi tranquille.

reviens.

tu me rends folle. j'aime pas l'amour. tu m'as poignardé combien de fois. je saigne. dans ma culotte ou au fond de ma gorge, peu importe. pourquoi tu m'infliges ça. pourquoi je m'inflige ça. c'est ta faute. peut être la mienne. je suis jalouse des rayons de soleil timides de janvier, qui chatouillent le bout de ton nez. je suis jalouse de la lune, que tu regardes pensive en fumant ta cigarette. je suis jalouse de l'oreiller, où tu poses ta tête sereine. quand on se parle, je crie des poèmes. je hurle des baisers. j'emmerde ces gens qui nous séparent, l'ennuie de la vie sans toi. mais aucun son ne sort de ma bouche. alors tu me fais la bise, tu lèves ta douce paume vers le ciel. tu disparais dans un labyrinthe haussmannien. un je t'aime est emporté dans la brise. un dernier soupir dans le monde sans couleur que tu me laisses. j'ouvre les yeux. je suis toujours dans mon lit. je caresse ton portrait sur l'écran de mon téléphone. il ne s'est rien passé. il ne se passe jamais rien de toute façon. ton amour me donne la vie. ton amour me donne la mort. 

je me noie dans les rivages de mes yeux.

laboratoireWhere stories live. Discover now