_ C'est pas vrai ! s'exclama une douce voix féminine.
C'était la quatrième fois qu'Audrey essayait d'écrire son poème, en vain.
Autour de la jeune fille fluette étaient éparpillés des brouillons de papier. Elle était assise au sommet d'une colline. De là, elle observait le lugubre paysage qui s'étendait sous ses yeux verts. Le village où elle vivait était entouré d'une infinie forêt.
Concentrée sur sa tâche, la jeune brune tentait d'écrire ce qu'elle ressentait mais les mots restaient coincés au fond d'elle, comme verrouillés. Elle avait ce curieux sentiment de ne pas être complète, de ne pas être à sa place. Quelque part ailleurs, il devait exister un endroit où elle se sentirait bien, aimée et comprise, entourée et cajolée, tendre et heureuse... Parce qu'ici, séquestrée dans la prison faite d'arbres, personne ne la comprenait. Même pas ses parents...
_ Ce n'est que la crise d'adolescence ! grommelait Grégoire, son père. Ça va passer !
Quant à sa mère, elle ne disait rien, ce qui n'arrangeait pas ses différents avec son père.
La petite brune souffla, puis froissa une nouvelle feuille de papier. Les mots de lui venaient pas.
Audrey pensait qu'elle n'était pas faite pour cette vie. En effet, ceux qu'elle considérait comme ses parents n'étaient que des libraires vendant des livres qu'eux même avaient écrits. Elle n'était pas comme eux. Elle était différente. Elle n'avait pas l'écriture dans le sang. D'ailleurs, elle n'avait pas le même sang qu'eux...
Grégoire et Myriam n'avaient jamais souhaité avoir d'enfant. De plus, ils en étaient incapables. Cependant, lors d'une chaude journée d'été qui n'était autre que le vingt-neuf août, alors qu'ils se promenaient dans leur village, le destin vint les frapper : une dame élancée, aux étranges cheveux bleus, les supplia de l'aider en leur tendant, tremblante, un bébé.
Grégoire grimaça puis, se sentant obligé de lui venir en aide, lui enleva le bambin des bras. Fébrile, la femme à la taille de guêpe, s'en alla en courant, ne leur laissant qu'une seule indication : « Audrey sera enlevée à cette date précise dans plusieurs années ».
Ces parents crurent que la femme était une sorte de sorcière. Après une enquête approfondie au sein de tous les habitants, personne ne la connaissait ou en avait déjà entendu parler.
_ Elle s'est faite mangée par les loups dans le bois, blaguait Grégoire avant de pouffer d'un rire strident.
Audrey avait à chaque fois un pincement au cœur à l'entente de cette phrase. Seule cette dame savait d'où elle venait, peut-être même que c'était sa mère... alors pourquoi l'avait-elle abandonnée ? Pourquoi était-elle si affolée ? Avait-elle des ennuis ? Était-ce à cause d'elle ?
Puisque que la femme aux mystérieux choix capillaires n'était pas connue, ses nouveaux parents jugèrent bon qu'Audrey reste avec eux, à l'abri, et pas avec cette folle qui ne disait que des sottises.
Grégoire et Myriam n'étaient pas du genre à cacher des choses. Ils lui avaient donc tout racontée sans rien omettre, même la mystérieuse phrase. Malgré la réticence de ses parents à croire cette dame aux cheveux bleus, Audrey, quant à elle, espérait que ce fut vrai. Elle voulait savoir d'où elle venait. Elle désirait s'en aller loin de cette endroit qui, au fil des années, devenait sombre et rempli de mauvaises ondes. Les gens la prenaient pour une sorcière, au même titre que ses parents croyaient que la fille aux cheveux bleus était folle. Elle ne pouvait pas aller dans le village sans qu'on ne lui jette des regards noirs ou qu'on ne murmure après son passage. « Cette endroit est un enfer, pensait Audrey, même le diable n'y mettrait pas les pieds pour ses vacances ».
Les attitudes des habitants avaient été influencées par l'horizon maladif et terne. Effectivement, celui-ci était funèbre et macabre. De plus, à cause de l'infini forêt qui entourait le village, ce sentiment de prison et de peur était encore plus amplifié. Des animaux morts demeuraient, ensanglantés, aux bordures du bosquet. Une odeur pestilentielle flottait dans l'air qui était étouffant. Les bas nuages gris recouvraient le ciel que ce soit la journée ou la nuit. Seul un jour dans l'année les habitants de Cursed pouvaient admirer la lune, le soleil et les étoiles. Le vingt-neuf août... c'est-à-dire, aujourd'hui.
À cette date, les habitants changeaient radicalement d'attitude, même envers Audrey. Ils troquaient leur mauvaise humeur contre une magnifique euphorie. À la tombée du jour, ils organisaient une fête sur la place où tout le monde était convié. Depuis toujours, ils célébraient ce jour comme pour honorer quelque chose mais, puisque cela faisait des générations et des générations qu'ils le faisaient, la raison en avait été perdue, emportée dans la tombe des anciens.
Audrey avait toujours pensé que c'était pour elle, comme une sorte d'anniversaire, puisque quinze ans auparavant, elle avait été traînée de force ici (surtout parce qu'elle ne savait pas marcher!). C'était la seule chose qu'elle aimait ici. La seule date qui comptait pour elle. La seule chose qui lui manquerait si elle devait partir...
Bien sûr, Audrey pouvait compter sur ses parents. Mais elle savait qu'ils avaient été obligés de l'élever, qu'elle était un fardeau pour eux. La petite brune avait fini par se dire qu'ils ne l'aimaient pas puisqu'ils ne lui montraient jamais leur amour, ne faisait jamais de gestes affectifs. L'adolescente comprit très tôt que ses parents étaient du même avis que les villageois: elle n'avait pas sa place ici...
Voilà la deuxième histoire que je publie ce soir! J'espère qu'elle vous plaira! Je pense poster un chapitre toutes les semaines! Commentez et votez!
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Audrey et les trois écoles
ParanormalAudrey est une jeune adolescente, rêveuse. Elle pense qu'elle n'a pas sa place dans son village. Elle n'est pas heureuse ici... C'est lors de la célèbre fête du village, que la petite brune va se faire enlever et elle va atterrir dans une école...