Chapitre cinquième, machine à laver

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A-t-elle ajouté ce soir là "je ne veux plus de toi ici" ? ou "je ne veux plus jamais te voir" ? Je ne peux pas en être sûr.

J'ai dû retourner dans ma chambre et faire mon sac, comme si je partais en vacances, puisque deux heures plus tard, je me suis retrouvé devant mon propre immeuble.

Je me revois, courir dans les rues, le bitume dansait sous mes yeux, je tournai à gauche, à droite, tout droit jusqu'à m'écrouler, le goudron arrachait la peau de mon genou droit. Quelle importance.  Je me relève et regarde mon téléphone, ce n'était pas possible, on abandonne pas son enfant dans la rue pour son orientation sexuelle ? Si ? Aucune notification, j'attends, espérant recevoir un message de ma mère

 Élie, reviens, on va discuter. Je t'aime quand même tu sais. Ce n'est pas grave, je te jure.

Mais rien, je m'adosse contre le mur de pierre derrière moi et pose mon sac de sorte a créer un petite protection contre le froid.  La rue est vide, éclairée d'un seul lampadaire d'une lumière orangeâtre. Les trottoirs sont bondés, prévus pour évacuer les larmes du ciel. Le ciel ne pleure pas aujourd'hui. Peut-on appeler ça de la chance ?

Vais-je mourir ici ? dans le froid ? Mes mains ne transpirent pas, est-ce le froid?  Que fait ma mère a cet instant là ? Je l'imagine dévaliser mon armoire et tout objet pouvant contenir mon odeur. A-t-elle troué ma boite a maquillage ? Je l'imagine encore plus en rogne? elle descendrai en bas, à coté du garage, dans la salle prévue a cet effet, mettre le linge dans la machine à laver, programme court 60°.   Attendra-t-elle devant ? en regardant mon linge tournant en cercle par le hublot ? Ma tête ressemble a une machine à laver en ce moment, mes pensées rentrent et tournent, tournent, tournent, infiniment.    

J'ai finit par m'endormir dans mes habits, dans le sale, dans le froid, dans l'humidité et dans la rue.

Je revois la claque frapper ma joue, comme un tambour. Va-t'en, ces mots résonnent dans ma tête, hantent mes pensées. J'ouvre les yeux, il est 6h42, mes habits sont sales et humides. Mes pieds sont froids. Je me lève difficilement, j'ai faim.  Hier, avant de partir, j'ai volé 50 euros, histoire de pas crever de faim. Je marche en direction du lycée, mais pas pour travailler, mes pieds s'entrechoquent, j'ai mal aux jambes. Le temps semble s'être arrêté, les gens me regardent avec désolation, Bonne chance, me glissent-ils, j'aperçois le lycée, j'ai peur, ils vont me juger, comme tout le monde le fait, parce que c'est la seule chose qu'ils savent faire. Le bitume craquelé avance sous mes pieds, les pensées fusent dans tout mon être. Je m'arrête devant la porte en métal du lycée. J'irais voir l'infirmière.  Non, je ne me sens pas capable, je devrais lui expliquer, et je n'en ai pas envie. Je ne veux, pour l'instant, que tasser mes émotions au plus profond de moi, là où elles ne pourront plus partir.

Je cours, sans m'arrêter, comme hier, entre les passants, les trottoirs, les ruelles sombres, je suis a bout de souffle mais je m'en fout, un arrêt cardiaque m'arrangerait bien. Mes pieds ne touchent presque pas le sol, est-ce que je cours pour fuir toutes ces pensées, ces événement, mes parents ?  Je tombe en arrière. La claque revient, indéfiniment, constamment.  Je me lève, ce n'était pas un poteau, ou simplement mon imagination. Quelqu'un, il était blond,à la mâchoire carrée, plutôt beau, de mon point de vue, je ne saurais dire si il me regardait. Puis j'ai regardé son front, ses cheveux en batailles se jetaient sur son front. Une seule personne a cette coiffure. C'était Tyler.

ainsi soit-ilOù les histoires vivent. Découvrez maintenant