Chapitre 1 : Les voisins

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"Ma mère m'a dit d'écrire sur ce cahier. Au passé, elle me demande de le faire au passé. Pourtant je ne peux pas. Tourner une page? Non. J'ai juste envie d'en écrire une nouvelle. Juste noire sur blanc. Juste des mots irréguliers. Juste ce que j'ai vécu avec toi. Au présent, uniquement au présent. Je veux pouvoir penser que tu es avec moi pour l'écrire. Je veux pouvoir penser que je le vis encore une fois.

Ces mots, ce sont les miens, mais ce sont aussi les tiens. Ce sont les nôtres."

Je me demande encore pourquoi ma mère me force à tout ranger. Sans doute parce qu'elle ne comprends pas mon art. Pourtant, les livres, dessins, vêtements étalés au sol et les draps défaits de ma chambre ne me dérangent pas le moins du monde. Non pas que je sois complètement bordélique... Bon, peut être un peu, je l'avoue. Tu le sais en plus, ça te fait rire. Enfin, toujours est-il que je dois ranger. Je n'en trouve pas le courage, je n'y arrive pas, tout me distrait. La DS, posée sur la commode et m'appelant en pleurant presque. Un avion en papier dans la poubelle, ma mère l'ayant jeté parce qu'il avait malheureusement traîné au sol. Même les choses les plus stupides, comme une fourmi solitaire ou un pauvre dessin abandonné en cour de route que je me vois dans l'obligation d'arranger à la seconde.

Bref, tu l'auras compris, je fais tout sauf remettre en ordre mes pauvres affaires. C'est lorsque ma sœur, Waliyha, débarque en hurlant dans la pièce et me découvre à jouer avec des vestiges de figurines aussi vieilles que moi que je comprends que je suis un cas désespéré. Ça me motive pourtant très peu, je me contente donc de remettre un livre en place, comme si ça changeait quelque chose au bazar dans lequel je vis. Je me dirige calmement vers la fenêtre, l'ouvrant à la volée pour respirer l'air déjà brûlant de ce début d'été. La canicule, dit ma mère. L'enfer, d'après moi. Je me glisse sur le rebord en position assise, les jambes pendant dans le vide. Ma mère déteste ça. Elle craint qu'un jour je ne me casse un os en tombant, et pourtant je continu. Ça sonnera sans doute ma perte un jour, on doit toujours écouter nos parents. Mais pour le moment, je n'en tiens pas compte. Ce qui attire mon attention, c'est cet immense camion. Qu'est ce qu'il fait ici? Je n'en ai aucune idée. Je finis par comprendre en voyant des cartons s'entasser à l'intérieur, des hommes porter des meubles jusqu'à la maison voisine. Je ne me souviens que d'une brève conversation avec maman, qui m'expliquait que la maison voisine avait été acheté après tant de temps. Je l'avais toujours pensé invendable. Pleine d'épineux, vieille, elle a été abandonné le jour de la mort du propriétaire. Bien sur, elle était belle, mais les travaux coûtaient et étaient sûrement longs. Enfin, je reste tout aussi surpris de voir débarquer ces voisins futurs. Je pourrais aussi bien avoir vu un martien ou des éléphants dans mon jardin. Pourtant, en guise de martien, c'est une femme qui descend de la voiture garée à l'arrière. Seule. Selon moi, elle ne l'est pas, vu la taille de sa demeure. Peut être veut-elle juste diriger les camionneurs, et le reste de la famille viendra après. Évidement, des scénarios improbables prennent place dans mon esprit. Passant par la belle jeune fille avec laquelle vivre une tout aussi belle histoire, jusqu'au tueur en série, même un pote à se faire. Ce serait bien. Je n'ai pas beaucoup d'amis, en réalité. Ça fait rire les autres, mais pourtant je pense que j'ai raison. Mieux vaut quelques amis fidèles qu'une quinzaine de pauvres tâches.

-Zayn, t'es encore perché là haut? T'es pas sérieux?

Je manque de tomber de surprise en entendant crier ma sœur. Je baisse les yeux en agrippant le rebord pour ne pas tomber. Waliyha, dessous, allongée sur un transat dans le jardin. Si elle adore le soleil, la chaleur, je préfère contrairement à elle rester à l'intérieur, vautré sur le canapé, avec le ventilateur. Ma sœur m'appelle affectueusement la "baleine échouée". Ça aussi ça te fait rire, sale traître. Pourtant je n'ai jamais pût t'en vouloir pour ça.

-Eh oui, on dirait que ça te surprends petite sœur. T'as vu? Y'a des nouveaux voisins...

-J'espère qu'ils seront sympas, puis pas comme ceux d'en face à faire la fête à cinq heures du mat'! S'exclame ma sœur sans aucune discrétion, rajustant ses lunettes de soleil sur son nez.

-Shhht, ils vont entendre bon sang! Cri-je en retour, la mine outrée.

La conversation se stoppe là, sans plus d'arguments, avec la métisse qui attrape un livre que même d'ici et sans voir le titre, je qualifie d'aussi intéressant et épais qu'un annuaire. Je suis finalement pris d'un élan de courage et descend de mon perchoir favori, descendant lourdement l'escalier pour sortir. J'ai envie de voir ces inconnus de plus près, ou plutôt cette inconnue. Voir si ça à l'air d'une voisine sympa ou d'une vieille aigrie qui criera à chaque petit bruit dans le jardin. De loin, je la classe plutôt dans la première catégorie. Je me juche confortablement sur une branche du seul grand arbre dans notre jardin, à l'aise sur ce poste. Tu l'as compris, j'aime observer les gens, je suis un éternel curieux. Le temps que je grimpe, un jeune homme l'a rejoint. Son fils, sans aucun doute, mais également plus âgé que moi à première vue. Une moue s'affiche sur mon visage. C'est injuste si le seul voisin que j'ai est plus grand. Pourquoi ça ne pourrait pas être juste... Une fille? De mon âge? Mais non, ça c'est dans les fictions à l'eau de rose. Je tourne le regard vers la maison et reste bloqué dessus, surpris. Je n'avais pas vu mais... Tout est repeint. Absolument tout. On la croit comme neuve. Étrange. Waliyha doit avoir raison quand elle me traite de tête en l'air. Ou alors, les cours m'ont trop prit l'esprit pour que je le remarque. Les vacances commencent à peine de toute manière donc ça semble parfaitement possible. La femme semble se rendre compte de ma présence et tourne le regard vers moi, interloqué. Je dois avoir l'air bizarre, à les surveiller. Aujourd'hui encore, je me demande ce qu'il m'a prit. Au lieu de la saluer en souriant, je me suis caché derrière le tronc en piquant un fard monstrueux. Je maudis mes mauvais réflexes, parfois. Même d'ici, je l'entends lâcher un rire, il est assez semblable au tien même s'il est plus féminin. Sur le coup, ça me met mal à l'aise. J'ai sûrement l'air totalement ridicule, c'est parfait comme premier contact avec les voisins. C'est parce que je suis caché cet instant là que je ne vois pas une autre personne sortir de la voiture, vêtue de blanc de la tête aux pieds, sans un carré de peau visible malgré la chaleur étouffante. La femme s'empresse de la faire entrer dans la maison, mais je ne l'entends pas la presser de là ou je suis. Je me décroche de ma branche et rentre dans la maison ventre à terre ou presque, honteux.

Ma mère n'a pas perdu une seconde pour se moquer joyeusement de moi quand je lui ai raconté cette mésaventure. Waliyha? Elle se roulait sur le canapé en hurlant de rire avec une classe de hyène, ma plus petite sœur la regardant comme si elle était folle. C'est beau la solidarité familiale, pas vrai? Des fois je me demande si je préfèrerais pas avoir un petit frère, plutôt. Quoi que non en fait. Mauvaise idée, ce serait peut être pire. Bref, mon aventure a déclenché le rire de la maison entière et j'ai boudé toute la soirée avec la plus grande maturité du monde. Ma mère indigne n'a pas tenté de me faire parler, elle voulait juste voir combien de temps je pouvais tenir. Résultat? J'ai tenu jusqu'au lendemain. Toujours est-il que je ne parle toujours pas le soir, bien sur. Je monte dans ma chambre toujours pas rangée depuis le temps, me recale contre ma fenêtre et regarde le soir tomber avec intérêt. Je vois une famille passer, rentrant chez elle. Une vieille dame promener son chien, un horrible chihuahua qui m'a toujours fait peur avec ses aboiements stridents et son air de rat. Un chat errant passer en courant, chassé par un ennemi invisible. Rien de bien intéressant.

La routine des vacances retombe, je m'ennuie.

Si je savais à ce moment sur l'ennui ne durerait pas.

Si j'avais sut qu'à ce moment, quelqu'un attendait la nuit avec impatience.

Si seulement, alors j'aurais pût sortir et rompre le quotidien plus tôt.

~ ~ ~

Pour ceux qui se demande, ce serait en gros Zayn qui parle à Niall. Précision au cas ou.

Chapitre court, peut être, mais comme je l'ai dis c'est en fonction de l'inspiration. Je l'ai écris et effacé trois fois avant de me satisfaire de cette petite chose. L'histoire doit se mettre en place alors ça est ennuyeux, sûrement. Enfin... La suite au prochain épisode.:)

Fils de la LuneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant