V : Il était triste

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Ils marchèrent lentement jusqu'à la boutique. Alors qu'Hermione s'approchait de la porte, elle se retourna et vit Georges qui s'était arrêté. Impassible, il contemplait la devanture. Il la détailla longuement, sans oser regarder Hermione qui s'était tournée vers lui, lui laissant le temps qu'il lui faudrait. Il avait peur de rentrer seul là où autrefois ils étaient rentrés à deux. Hermione s'approcha et se plaça à côté de lui, face à la vitrine. Elle la contempla à son tour.

- Je suis là, dit-elle en prenant doucement sa main.
Ce contact ramena Georges à la réalité. Il était doux, et rassurant. Il serra la main d'Hermione et ils rentrèrent dans la boutique.

La boutique n'avait pas été trop abîmée par la Bataille finale. Les rayons étaient presque vides, on pouvait encore trouver quelques farces et attrapes disposées çà et là. La lumière ne marchait plus, mais la clarté du jour éclairait encore légèrement l'enseigne. Ce lieu autrefois rempli de rires d'enfants et de couleurs, n'était maintenant qu'une grande pièce vide, sur deux étages, dont le sol laissait craquer les pas des deux Gryffondors.
Georges aperçut et se saisit d'une tasse à thé mordeuse brisée, puis monta à l'étage. Il se tourna face à l'entrée du magasin, et rejoint par Hermione, observa longuement ce qui autrefois était son petit coin de paradis.
Après un long silence, il baissa les yeux.

Hermione se demandait si elle avait bien fait de l'emmener ici. Elle espérait qu'il se rappelle du projet qu'il avait créé avec son frère, et que cela lui donnerait envie de rouvrir la boutique. Elle avait peur, malheureusement, que cela n'enfonce davantage le couteau dans la plaie.

- Il y a plein d'élèves qui n'attendent que ça, suggéra-t-elle à l'oreille de Georges. Comment vont s'amuser les enfants de Poudlard sans v... sans toi ?

Elle se mordit la lèvre. Elle eut peur que sa remarque ne blesse encore plus Georges.
Celui posa la tasse mordeuse sur le rebord de l'escalier, se tourna lentement vers Hermione. Elle ne sût déceler ce qu'elle vit dans ses yeux, si c'était de la tristesse liée aux mauvais souvenirs ou de l'enthousiasme à l'idée de reprendre la boutique. Finalement, elle avait peut-être bien fait de l'y emmener.

Georges s'approcha doucement d'Hermione et enroula ses bras autour d'elle. Hermione se figea devant cette marque d'affection, et le garçon, dans un soupir, resserra son étreinte. La brune y répondit et ils restèrent ainsi pendant plusieurs minutes.
Georges finit par se défaire d'elle, un peu confus, et invita la jeune fille à sortir de la boutique avec lui. Ils descendirent d'un commun accord, et avant de fermer la porte à clé, Georges retourna chercher la tasse mordeuse brisée qu'il avait récupérée.

Ils réapparurent quelques minutes plus tard dans l'antre de la cheminée du Terrier.
Tout le monde était à table, et deux parts de tarte attendaient patiemment les deux jeunes échappés. Hermione s'assit à table, un sourire discret aux lèvres que le reste de la famille ne manqua pas de remarquer. Avant que quelqu'un ne demande où ils étaient passés, Georges déposa devant son assiette la moitié de tasse à thé mordeuse. Il remit sa part de tarte dans le plat en remerciant quand même sa mère d'un regard et monta dans sa chambre.
Entendant Hermione se lever derrière lui, il se retourna, ferma les yeux et lui fit un léger mais douloureux sourire. La brune comprit qu'il avait besoin d'être seul et, déstabilisée, elle se rassit à table devant les regards attristés du reste de la famille.

- Tu sais, commença Ginny, il lui faudra du temps.
- J'espérais simplement... hésita Hermione, attristée.
- Je sais.
Ginny prit la main d'Hermione et tenta de la rassurer.

- Hermione, continua Ron qui d'habitude ne prenait pas la parole dans ces moments là, Tu lui fais beaucoup de bien. On voit tous que Georges a l'air d'aller mieux depuis quelque temps, et c'est grâce à toi.
- Tu as su lui tendre la main là où on a tous cru bon de le laisser avec lui-même, renchérit Arthur. Et ça, seule une jeune femme brillante comme toi aurait pu le comprendre, finit-il avec un clin d'œil. Et c'était une très bonne idée de l'emmener au magasin.

Hermione sourit. Elle regarda Harry, qui était resté silencieux. Il lui sourit, comme s'il comprenait, comme pour lui dire qu'il la soutenait et qu'il était avec elle. Elle se sentit rassurée.
Le repas, calme, se passa dans la bonne humeur. Après que Ron et Harry se soient portés volontaire pour la vaisselle, à la grande joie de Molly, toute la petite famille s'installa dans le salon. Voyant que la conversation tournait très vite au Quidditch, ce qui ennuyait quelque peu Hermione, elle en profita pour s'effacer discrètement et monta à l'étage.

Georges était resté assis sur son lit et contemplait tristement le ciel étoilé à travers sa fenêtre. Il entendit des pas, et, percevant une démarche féline qu'il commençait à bien connaître, entrouvrit d'un coup de baguette la porte de sa chambre.
Hermione s'avança doucement à sa hauteur et s'assit sur le lit, à côté de lui. Ils restèrent silencieux quelques minutes. Le silence devint pesant. Elle entendit Georges inspirer profondément, et fondre en larmes à côté d'elle.
La brune n'y réfléchit pas à deux fois et serra Georges fort dans ses bras, tentant candidement de calmer le garçon. Elle ne l'avait jamais vu comme ça. Où était passé le Georges farceur d'antan ? Peut-être était-il réellement parti en même temps de son frère défunt.
Elle lui chuchota des mots apaisant à l'oreille, ce qui le calma un peu. Il resserra violemment son étreinte, comme pour se convaincre qu'elle était là, près de lui, que lui était toujours vivant. Il ne discernait plus la colère de la tristesse qui l'habitaient. La visite du magasin, si elle avait ramené en lui une certaine nostalgie heureuse et lui avait donné envie d'avancer, avait aussi laissé remonter de douloureux souvenirs qui meurtrissaient son esprit. Il se rappelait la mort de son frère, sa chute à ses pieds sur les remparts de Poudlard, son sourire qu'il garda jusqu'à la fin. Il se sentait coupable, coupable de l'avoir laissé partir sans lui, coupable de ne pas avoir pu le sauver.
Il chuchotait toutes ses pensées dans ses pleurs, sans vraiment s'en rendre compte, et cela brisait le cœur d'Hermione qui laissa échapper de lourdes larmes. Elle passa sa main dans ses cheveux et le caressa doucement, attendant qu'il s'apaise un peu. « Ce n'est pas ta faute, ce n'est pas ta faute Georges », répétait-elle. Après quelques minutes silencieuses, Georges qui s'était arrêté de remuer, tentant à la fois de se débattre et de serrer Hermione plus fort contre lui, s'était calmé et avait levé les yeux vers sa confidente.
Hermione fut déchirée par le spectacle qui s'offrait à elle.

Il était triste, si triste. Son teint était livide, ses yeux cernés et son regard profondément vide. Elle colla sa tête contre celle de Georges, l'invita à respirer profondément, et l'allongea doucement sur son lit.
« Excuse-moi, excuse-moi Hermione » dit-il dans un souffle rauque, et il ferma les yeux. Hermione lui caressa le visage, attristée de voir Georges dans cet état.
Elle prit un coussin et s'assit par terre, s'accoudant sur le lit. Elle prit la main de Georges pour le rassurer, attendant qu'il s'endorme. Elle quitta la chambre une heure plus tard, après avoir lancé à contrecœur un charme d'apaisement au garçon.

Quand elle entra dans sa chambre, elle vit Ginny, Harry et Ron encore éveillés la regarder avec un air inquiet.
- Est-ce que tout va bien ? s'empressa Harry.
- J'espère... répondit la brune. Il me fait vraiment de la peine.
Ginny se leva et la prit dans ses bras. Elle savait que c'était difficile pour son amie de voir Georges comme ça. Elle avait pris à cœur de s'occuper de lui, mais cela l'affectait beaucoup.
Les deux filles furent rejointes dans leur étreinte par Ron et Harry. Ils passèrent la soirée à discuter de choses et d'autres, comme si de rien n'était. Hermione s'endormit sereinement, entourée de ses meilleurs amis.

Le calme après la tempêteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant