Meilleurs amis !

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P. D. V. de Matthieu

J'ose à peine y croire.
Il y a deux jours, Linda était une parfaite inconnue, hier, c'était ma pire ennemie, et aujourd'hui, je crois que je me suiciderais si elle meurt.

Nous discutons depuis 4 heures et venons tout juste de le remarquer. Aucun d'entre nous n'avait fait attention à l'heure.
N'empêche, nos conversations sont tellement intéressantes !

Deux génies qui se rencontrent, ça promettait.

Alors que le serveur nous annonce que le café ferme, Linda acquiesce et noue son écharpe. Si le serveur ne nous avait pas entendu discuté, il aurait certainement cru qu'elle est muette.

Linda parle peu avec la majorité des gens, c'est-à-dire tout le monde sauf les professeurs et moi. En quelque sorte, je suis l'élu. Celui auquel elle confie ses pensées.

Linda m'a totalement fait confiance. C'est pour cette raison-là que je lui fais confiance.

D'un commun accord, on a décidé de partager nos idées. Qu'importe qu'elles soient bizarres, irrespectueuses ou bêtes.

Elle m'a expliqué pourquoi elle agissait ainsi au lycée, et moi j'ai aussi dû répondre de mes actes. La conversation donnait ceci avant que le serveur ne nous interrompe:
- Être soi-même, ça a un prix. Mais bon, le rapport qualité-prix de l'individualité est bien meilleur que le rapport qualité-prix de l'amitié. Ou même, pire, de la popularité.
- Tu dis ça mais tu es quand même populaire.
- Ça, c'est pour ma part de mystère.
- Pourquoi tu ne leur explique pas le mystère ? Je suis sûr que tu en convertirais quelques uns, et en plus, ils te laisseraient tranquille.
Elle a rejeté ses cheveux en arrière pour rire.
- On dirait franchement qu'on parle d'une secte !

Le serveur est arrivé à ce moment-là, et n'a probablement dû entendre que ce dernier mot. C'est peut-être pour cela qu'il a fermé une heure avant. C'est peut-être à ce mot que le serveur s'est dit qu'il devait fermer.


Je profite du magnifique ciel pour la regarder elle. Elle a la tête tournée et je la vois de profil. Elle observe attentivement le ciel, cherchant peut-être à trouver une signification à ses superbes traits de différentes couleurs.
- Qu'est-ce que t'as à me fixer comme ça ?
Je rougis violemment. Elle n'a pas tourné la tête mais semble quand même m'apercevoir. Si elle me voit ainsi, ça veut dire qu'en classe aussi, elle a dû remarquer que je la regardais...
- J'ai une question. Pourquoi tu t'es assis à côté de moi, le premier jour ?
Je reste interdit. Comment lui dire que c'est parce que je la trouvais jolie ?
- J'ai l'air si bizarre que ça ?
Je me retiens de rire. Elle m'offre un échappatoire parfait.
- Disons que tu as une aura très particulière.
- Une aura ?!
- Cherches pas. J'ai toujours pensé à une aura comme un truc fluo et flou qui flotte autour de toi.
- Moi je le voyais comme une manière visqueuse qui s'évapore de nous, et que certaines personnes avec une très bonne vue peuvent percevoir avant qu'elle ne s'évapore.
- Ah oui, quand même ! Mais d'où tu tenais une croyance pareille ?
- Avant, je faisais une confiance absolue à ma mère. Sauf qu'avec le temps, j'ai réalisé qu'il lui arrivait de se tromper. Ou d'inventer. Surtout qu'elle expliquait particulièrement mal...

Tout en parlant, on marche. Et comme on est absorbés par ce qu'on se raconte, on ne fait pas attention à où on va. Heureusement que je m'en rappelle, moi !
Je décide de la raccompagner chez elle. Elle accepte sans hésitation mais je me demande ce que ses parents vont en penser...
Si elle en a. Vu comme elle a l'air de s'en ficher, ils doivent être inexistants. Comme moi en cours de philo. À ma place on voit un sac. La professeure connaît à peine mon visage et mon nom; je crois bien -et espère- qu'elle m'a oublié.

Plus on marche, plus elle va vite. Je vais à sa vitesse, ce qui aurait été difficile à suivre si je ne courrais pas. Elle ne me regarde pas ni ne me parle, et lorsqu'elle croise mon regard, elle semble étonnée pendant une fraction de seconde.
- Excuse-moi, je t'avais complètement oublié.
- Bah merci !
Je suis vexé. M'oublier, c'est quand même incroyable ! Elle doit avoir un Alzheimer précoce.
Maman, j'ai trouvé mon futur métier: médecin !

Elle se justifie, comprenant qu'elle m'a vexé.
- J'étais pensive.
- Tu pensais à quoi ?
- Est-ce que je fais partie d'un de ce jeux malsains ?
Niveau confiance, on repassera.

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⏰ Dernière mise à jour : Mar 18, 2019 ⏰

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