Madness.

13.

* 11 mai 2011 *
/ 12h20 /

Journal.

Ash a recommencé. Je pensais que c'était finis tout ça. Je pensais qu'on apprenait de nos erreurs. Je pensais que notre famille deviendrait normale avec le temps. D'ailleurs c'est quoi une famille normale?  Hier, la maman de Rosalie m'a rammener chez moi après la danse. En rentrant, il n'y avait personne à la maison. J'ai donc décidé de prendre mon goûter seule, même si papa m'avait toujours formellement interdit d'ouvrir les placards à nourriture. Mais il était quand même quatre heures! J'avais vraiment faim. Alors j'ai désobéi. Il n'y avait vraiment rien de bon la dedans, que des gâteaux tout secs. J'ai essayé de fouiller le fond pour trouver une meilleure réserve. Et je suis tombée sur une grosse boite, il y avait des dessins de moelleux aux chocolats dessus. Mon gâteau préféré! Alors j'ai ouvert la boîte. Mais ce ne sont pas des moelleux que j'ai trouvé...

* Mardi 30 septembre *
/ 1h18 /

Point de vue Ash.

"Maman je me sens si seul." Chuchotais-je

Il pleut, il pleut fort dehors. À l'heure où certains fument, à l'heure ou certains boivent, à l'heure ou certains font l'amour, moi je contemple le ciel. Assis sur ce vieux toit trempé et glissant, je pense à ce qu'est ma vie depuis que j'suis né. A quoi aura servi mon existence?

Que diront ceux qui m'ont connu quand je partirais? "Un jeune homme aimable partit trop tôt. Un ami obstiné, borné mais généreux." Non, moi j'aurais pas droit à cette hypocrisie.

Voilà ce qu'on dira réellement: "Il a fais la ruine de sa famille. C'était un fils indigne, un frère absent, un ami égoïste, un voisin étrange, un passant oubliable, un simple inconnu."

Il pleut, il pleut fort dehors. Mais aucun soleil, aucun sourire, aucune présence ne saurait répondre à mes désirs.

Il pleut, il pleut fort dehors. Cela fait plus d'une heure que j'attends l'orage. Peut-être que lui aura des réponses.

Il pleut, il pleut toujours dehors. Je crois que cela ne cessera jamais. La pluie n'est pas prête, elle ne veut pas se calmer. Mon coeur non plus.

/ 8h34 /

Toc toc toc.
Pas de réponse. Je soupire et réitère mon geste.

" C'est pourquoi?" Grogne la voix de mon père.
" Tu me laisses entrer?"

Un silence s'installe, je reste planté au moins cinq bonnes minutes devant la porte avant qu'il ne daigne enfin m'ouvrir.

" Ash? C'est vraiment toi?"
"Ben non."
Ses sourcils se froncent mais il me laisse entrer.

"Quand es-tu rentré?"
"Ça fait plus d'un mois."
"Tu as vu ta mère?" Dit il en se dirigeant vers la cuisine.

"Oui. Il y a deux jours."
"Comment était elle?"
Je pousse un long soupire et répond:
"Comme d'habitude, elle n'a pas dit un mot."

Mon père lève la tête. Pour la première fois depuis que je suis arrivé, il me regarde dans les yeux.
"Qu'est-ce que tu viens vraiment faire ici?"

Il sait bien que c'est pas une visite de courtoisie, que sa maison est le dernier endroit où je voudrais être. Mais je n'ai pas le choix, je n'ai nulle part d'autre ou aller.

"J'ai pas d'autre endroit où dormir. T'inquiète pas, tu ne me verras pas, je ne resterais que la nuit."
Je sais qu'il a mieux à faire que de supporter ma présence à ses côtés toute la journée.

Et puis moi non plus je ne veux pas le voir. Si ça ne tenait qu'a moi je le tuerais. Vraiment. Je lui ferais avaler ses propres organes. Puis je donnerais sa carcasse aux cannibales.

Après tout, C'est de sa faute si maman est devenue barjo. Le pire c'est qu'il est sûrement encore plus fou qu'elle.

Mon père aquièse, puis d'un pas lourd, il quitte la pièce.
Je m'écrase contre le plan de travail, éclatant au passage mes reins. Putain. Je vais encore avoir des bleus.

Mon regard se pose sur la porte de la chambre de ma soeur. J'approche lentement, dans un silence presque religieux. Lola a toujours eu un côté enfantin très marqué. Elle aimait afficher sa candeur, sa naïveté.

Sa chambre était son sanctuaire, on découvrait tout d'elle rien qu'en entrant dans la pièce. Elle riait de tout, son mauvais caractère combiné à sa débilité la rendait tellement attachante.

Mes doigts touchent tout ce qu'ils peuvent, c'est comme si j'essayais d'attraper chaque particule de ma soeur pour en reconstituer le puzzle. Son parfum continue d'embaumer la pièce. Elle est partout et nulle part à la fois.

Je m'assieds sur son lit, pris de vertige je ferme mes yeux. Mes mains sont placées aux deux extrémités de l'oreillé.

Les choses auraient pu s'arrêter là. Mais ça aurait été nul. Non. Il faut toujours qu'il y ait quelque chose en plus.

L'oreiller que je sens d'une main me paraît bien plus dure qu'il ne devrait être.

Brusquement j'ouvre les yeux, pour m'assurer que je ne rêve pas, je prends le coussin et le déchire en deux.

Un voile de peluches s'étend autour de moi mais cela n'attire pas vraiment mon attention. Je crois que je tiens entre mes mains une partie de la réponse à l'énigme.

Je sors mon portable de ma poche et m'empresse de prendre une photo.
Je ne comprends rien à ce que ça veut dire. Mais c'est pas la pour rien. Ça ne peut pas être si dure.
Si Lola à laisser ça, dans sa chambre à portée de main, c'est que je devais tomber dessus.
Ça a forcément un sens. Ça veut forcément dire quelque chose.

"Sors immédiatement de cette chambre."
Je lève la tête et tombe face au regard sombre de mon géniteur. La colère monte en moi. De quel droit me donne-t-il des ordres?

"Non." Sa mâchoire se resserre.
"C'est ma maison. Je fais déjà l'effort de t'accueillir. Mais toi tu entres et tu détruis les affaires de ta soeur disparue."

Je ne cherche pas à me justifier, ça ne sert à rien avec lui. Il est con, il comprend rien. Il ne sait faire que de la merde.

Je sors de ma poche mon téléphone et observe la photo.

C'est un petit livret vert avec seulement cette suite de chiffres sur la dernière page.

01010100 01101000 01100101 00100000 01000100 01100101 01100001 01110100 01101000 00100000 00111101 00100000 01001100 01101001 01110110 01101001 01100101 00100000

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