Désolé...

770 21 1
                                    

Trois heures du matin, mon bippeur sonne. J'ouvre les yeux, sors de mon lit et me dépêche de descendre sans faire de bruit. En moins de cinq minutes, je suis prêt. Je monte, embrasse ma femme toujours endormie, un dernier aurevoir de loin à ma fille. Demain, quand elle se réveillera, je ne serai plus là... comme souvent, je me dois de partir pour mon travail. Je suis pompier et quand le devoir m'appelle, je me dois de les laisser. Parfois pour des gardes de plusieurs jours...
J'enfile rapidement mes chaussures, mon blouson et récupères les clés de ma voiture avant de quitter mon appartement au beau milieu de la nuit.
Demain matin, quand ma femme se lèvera, elle trouvera le lit vide et, comme à chaque fois, le même petit mot sur la table du salon.

Mon amour, j'ai du y aller désolé pour la petite mais dit lui que la prochaine fois, c'est promis, je serai là à son spectacle. Fais attention à toi. Je vous aime
Rayane

Je monte dans ma voiture, met le contact et me voila parti. Je m'en vais une fois de plus loin de ma famille pour je ne sais encore combien de temps. Tout en roulant, je pense à ma fille... elle va tellement m'en vouloir... presque un an qu'elle préparait ce spectacle avec son club de théâtre. Moi qui lui avait promis d'être là, ça ne sera pas pour cette fois...

Apres une bonne demi-heure de route, j'arrive enfin à la caserne. Je gare ma voiture sur le parking et entre sans trainer.

Pompier : Ah bah quand même ! Allez bouge ! Troisième départ tu pars avec Josh allez habille toi dépêche !

Je m'empresse de me préparer avant de sauter le plus rapidement possible dans le camion tout en finissant de m'habiller.

Rayane : On part sur quoi les gars ?

Josh ( pompier ) : Un feu de foret. Déjà un petite centaine de pompiers sur place mais à priori c'est un peu compliqué. Y a des habitations à proximité des gens confinés chez eux qu'il faut évacuer plusieurs hectares déjà détruits et de nombreux renforts demandés.

Rayane : Ca promet...

Josh : Allume la radio qu'on écoute !

Rayane : Attends deux minutes j'ai un truc à faire avant.

J'attrape mon téléphone, ouvre la caméra frontale et appuie sur le bouton

"Ma chérie, c'est papa. Je sais pas si tu m'entends bien avec tout ce bruit mais je voulais simplement t'encourager pour ce soir. Je ne peux pas être là et saches que je suis désole. Vraiment désolé ma princesse mais maman filmera et je te promet que dès que je rentre, on regardera tout ça, tous les deux, ensemble. Ne t'en fais pas, je rentre vite à la maison. Fais attention à maman mais surtout amuse toi bien ce soir mon coeur. Je t'aime ma vie"

Je souris bêtement, seul face à mon téléphone avant d'interrompre la video et de l'envoyer à Denitsa qui doit certainement, dormir encore profondément.
J'allume la radio et regarde la route, déjà nostalgique de mon chez moi lorsque mon équipier Ludo me donne une tape sur l'épaule

Ludo : Pas facile hein...

Rayane : Y a des fois je m'en veux tellement j'te jure...

Ludo : Mais ta fille est en âge de comprendre tu sais... elle ne t'en veut pas ne t'en fais pas...

Rayane : Mais moi je m'en veut... son premier anniversaire ? Je n' y étais pas... Son troisième ? Non plus... Ses spectacles d'école, combien j'en ai vu ? Aucun...
Combien de fois j'ai pu emmener ma fille au parc ou faire du manège ? Je les compte sur les doigts de la main...

Je relève la tête, regarde la route. Au loin, un épais brouillard... Josh ralenti, le chemin commence à devenir étroit et nous y voyons de plus en plus mal... La fumée nous entoure et nous nous laissons guider par les faibles lumières et le son de la sirène du camion de pompiers venu nous guider au plus proche des flammes.
Mon téléphone à la main, j'envoie un message à Denitsa :

Mon amour, je ne rentrerai peut être pas ce week-end. Je pars sur une opération compliquée. Je n'ai jamais vu ça...j'ai un peu peur mais j'y crois. Je t'aime très fort. Je t'appelles dès que je peux... Je t'aime mon amour.

Le camion s'arrete, nous sommes encerclés par une épaisse fumée, une odeur de brulé commence a envahir le véhicule. Je regarde rapidement autour de moi.
Mes équipiers à l'arrière me font passer mon casque et mon sac  avec mon masque à oxygène. Je m'équipe, ouvre la vanne de la bouteille d'oxygène. La main sur le mécanisme de la portière, nous attendons le signal de notre supérieur, à l'extérieur.
Le signal se fait voir. À l'intérieur, nous nous regardons une dernière fois, d'un air inquiet avant d'actionner la poignée de la portière et de bondir hors du véhicule.
Des pompiers présents sur place déroulent déjà la lance à l'arrière du camion pendant que nous regardons autour de nous, un peu surpris par l'ampleur de ce désastre.
Dans cet épais brouillard ou la vision est réduite et ou le temps nous est compté, l'enfer commence...

FiremanOù les histoires vivent. Découvrez maintenant