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La sonnerie stridente du sifflet résonna sur tout le terrain, annonçant l'arrêt immédiat du match. Les joueurs des deux équipes se tournèrent vers le tableau des scores affichant la victoire de l'équipe visiteuse. Élio, essoufflé, posa les paumes de ses mains sur ses genoux. Il n'avait pas joué ainsi depuis plusieurs mois, il n'était pas habitué. En fait, c'était la première fois de l'année qu'on lui donnait une chance de montrer ses capacités sportives.

Dans les gradins, les applaudissements doublèrent lorsque les joueurs virent mutuellement se serrer la main. Le match était fini et ils avaient perdu. L'équipe des Phœnix bleus, celle qui n'avait encore jamais perdu de match depuis plus de 4 ans, venait de se prendre une raclée légendaire lors d'une simple rencontre amicale. C'était presque ironique.

Élio se redressa et rejoignit ses camarades, le pas boitant. Il s'était surpassé et son corps ne semblait pas avoir bien réagi. Demain, il aurait des courbatures, il en était sûr. Mais ce soir et pour la première fois de sa vie, ses équipiers l'attendaient pour le féliciter. Tous déposèrent une petite tape sur son épaule, accompagnée d'une parole encourageante ou d'un discours élogieux. Le garçon se sentait fier. Parce que c'était lui qui avait marqué la plupart des essaies, parce que c'était lui qui avait presque sauvé le jeu. Lui et pas Mathéo ou Quentin, les meilleurs joueurs de l'équipe lorsque le capitaine était absent. Lui et pas un autre.

Les adolescents regagnèrent les vestiaires. L'ambiance pesait dans la petite pièce. Nul n'osait briser le silence et s'en était presque gênant. Ils avaient perdu, oui, c'est vrai, mais il fallait voir le bon côté des choses. Ce match ne comptait pas réellement, il servait juste à amuser la foule. Élio voulut remonter le moral de ses coéquipier mais à peine ouvrit-il la bouche qu'il se ravisa aussitôt. Ce n'était pas à lui de le faire. C'était à Damian, c'était au capitaine. Mais ce soir, il n'était pas là, et c'était en partie la raison de leur défaite. Élio se tourna vers Mathéo. Il n'était pas décidé à prendre la parole. Le garçon hésita. Qu'en bien même il prendrait son courage en mains, personne ne l'écouterait. Il souffla. Si ça continuait, lui aussi allait finir par broyer du noir.

Alors que le silence devenait presque angoissant, la porte des vestiaires s'ouvrit brusquement, claquant contre le mur. Toutes les têtes de tournèrent à l'unisson en direction de la porte et les visages s'illuminèrent petit à petit. Élio, au fond de la salle, tendit son cou afin de comprendre ce qui venait d'arriver. Il n'eut pas à attendre longtemps qu'une voix au timbre particulier envahit la pièce.

-Je pars moins d'une semaine et vous trouvez le moyen de nous faire perdre un match. Une rencontre amicale avec l'équipe la plus sous-côtée en plus. Franchement les gars, vous êtes vraiment désespérant.

Un jeune homme fit son entrée, un large sourire étirant les traits de son visage. Ses yeux en amande, plissés à cause de ses pommettes qui remontaient, pétillaient d'une lueur maligne. Et bien que ses pupilles soient noires, Élio y vit briller un éclat de malice coloré. L'adolescent entra un peu plus dans la salle et afficha une mine dégoutée. Les effluves de sueur fouettèrent son nez qu'il plissa un bref instant. Il toussa légèrement et secoua sa main devant lui, comme pour éloigner le remugle de son visage.

-Vous sentez la mort, les gars. Allez prendre une douche.

Mathéo fut le premier à se lever, un sourire moqueur aux lèvres. Il s'approcha de son capitaine, qui, en le voyant, devina immédiatement ses intentions. Tous deux se connaissaient depuis plusieurs années déjà et savaient comment l'autre fonctionnait. Damian pointa son ami d'un doigt accusateur, sous les regards amusés de tous leurs camarades.

-Si tu me touches, je te fais bouffer le sol.

-Ça en vaut la peine.

Mathéo se jeta sur Damian qui, une de ses mains dans un vieux plâtre devenu gris par le temps, ne put rien faire pour lui échapper. D'un mouvement de bras, Mathéo quémanda aux autres de le rejoindre et bientôt, toute l'équipe se retrouva autour de son capitaine. Les rires fusèrent et les échos d'insultes étouffées par une montagne de muscles se firent à peine entendre. Élio assista à la scène, toujours assis sur son banc, un fin sourire étirant les commissures de ses lèvres.

Élio pas comme le Soleil Où les histoires vivent. Découvrez maintenant