Élio pas comme le Soleil

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Il pleuvait depuis une dizaine de minutes et le terrain était rapidement devenu un sentier de boue difficilement praticable. Les joueurs ne s'étaient pas pour autant plaints du temps, qui n'était pas à leur avantage. Ça les entraînait, les préparait et les renforçait, d'après les dires de leur coach qui les observait depuis une cabine chauffée. Élio avait beaucoup était mis en avant par ses coéquipiers lors de l'entraînement et avait, une nouvelle fois, surpris la foule. Pourtant, il n'arrivait pas à être satisfait. Il manquait quelque chose. Quelqu'un. Damian n'était tout simplement pas venu.

Les trois heures d'entraînement s'étaient écourtées à cause des intemperies et les joueurs avaient été lâchés plus tôt, ce qui en arrangeait plus d'un. Élio s'était fait raccompagné par Mathéo, qui s'était dévoué à faire le taxi pour l'équipe. Denis, Rosh et Kamel à l'arrière et Élio côté passager à l'avant, le trajet s'était fait dans un brouhaha et une peur générale -peur de mourir à chaque tournant trop brusque que prenait Mathéo, dont le permis était tout récent-.

Le co-capitaine déposa un à un les joueurs chez eux jusqu'à ce qu'il ne reste plus que le châtain, et alors, le calme retomba doucement. Ils roulèrent dans un silence où seules les gouttes tapant sur les vitres brisaient la pérénité de l'équation. Mathéo et Élio avaient été de bons amis de nombreuses années, presque jusqu'à la fin du collège. Mais la mère de Mathéo n'avait jamais vraiment digéré leur relation qu'elle trouvait plus que toxique pour son fils. Élio, enfant élevé par une droguée, ne pouvait qu'être nocif pour l'avenir d'un futur avocat de renom.

- J'peux te poser une question ?

Élio ne répondit pas immédiatement mais finit par hocher sa tête, peu conscient que Mathéo, concentré sur la route, ne pouvait pas le voir. Pourtant ça ne sembla pas gêner le conducteur qui s'empressa de parler à nouveau, comme si finalement, il se fichait bien de la réponse du châtain.

- Pourquoi t'as jamais eu de relation?

- Comment ça ?

Les index de Mathéo rencontrèrent de manière régulière le volant, résonnant dans l'habitacle de la voiture. Le garçon s'arrêta au feu et se tourna vers Élio qui le regardait avec de petits yeux fatigués.

- Tu vois bien que plein de filles te tournent autour, pas vrai? Pourquoi t'es jamais sorti avec l'une d'entre elles? Au cas où tu n'aurais pas remarqué, avec Quentin et Damian, on est les quatre gars potables de l'équipe. Et je sais pas pourquoi, mais la tenue de sport des Phœnix bleus, elle fait pas mal craquer les nanas du bahut. Rien que cette année, j'ai vu cinq filles essayaient d'attirer ton attention. Ne me dis pas que tu n'avais rien remarqué ?

À la vue de la moue que fit Élio, Mathéo secoua sa tête, n'en revenant pas. Le châtain resta muet. Il fronça ses sourcils, comme essayant de remonter dans ses souvenirs, leva les yeux au ciel puis haussa ses épaules.

- Mec, en début d'année, Nathalie t'a demandé de sortir avec elle et toi, t'as répondu "pour aller où ?". Me dis pas que t'avais vraiment pas compris ce qu'elle voulait te dire?

Le feu passa au vert et Mathéo redémarra la voiture, dans un silence total. Le châtain ne pipa mot, ses yeux ronds par la nouvelle.

- Bordel Élio ! Mais t'es débile ou quoi? C'est pas sorcier de comprendre ce genre de phrases. Tu regardes jamais la télé ou quoi?

- Bah si mais sur le moment j'ai pas capté. Faut être direct aussi.

- Je suis pas sûr sûr qu'il y ait plus direct, tu sais. Ses doigts tapotant le volant, Mathéo soupira devant l'innocence d'Élio. Au fond, il l'aimait toujours beaucoup, son ancien meilleur ami. Il tenait à lui, quoi que sa mère puisse penser de leur amitié. Et si elle te demandait à nouveau, tu dirais quoi ?