Une réception sanglante

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   Le lendemain soir, la comtesse se rendait au palais royal. La peur nouait son ventre, mais elle essayait de ne rien laisser paraître.

   Elle était superbe, dans sa robe jaune citron, avec sa coiffe surmontée de quelques plumes blanches. Elle avait opté pour une longue tresse. Son visage était mis en valeur avec le léger maquillage qu'elle avait appliqué dessus.

   Une fois arrivée devant le palais, elle descendit de son carrosse et s'arrêta quelques instants sur le seuil de l'imposant portail, illuminé pour l'occasion. Elle était impressionnée.

   Elle finit par entrer, et elle arriva dans la salle de bal.

–  Quel dommage que Mademoiselle Rose ne soit pas ici ! laissa-t-elle échapper à voix haute.

   Une dame en robe rouge velours s'approcha d'elle. Elle tenait un éventail rouge sang, et une tiare en or était sur sa tête. La comtesse la trouvait vraiment superbe.

–  Bonsoir, à qui ai-je l'honneur ? fit la dame en rouge.

–  Bonsoir. Je suis la comtesse de Banville. Je suis honorée d'être ici. Et vous, qui êtes-vous ? Une invitée de marque je suppose, avec votre tenue. répondit la comtesse en souriant amicalement.

–  Oui, en effet. Je suis la duchesse de Felis. fit cette dernière, avec une prétention des plus rares. Je suis une très grande amie de la marquise de Florel. Vous devez la connaître ? Elle est tellement noble et exquise... A côté d'elle, les comtesses, les baronnes et les bourgeoises ne sont rien. Sa beauté est telle qu'elle aveugle quiconque !

   La comtesse perdit son sourire. Elle devina le jeu de la duchesse. Impressionner et surtout blesser. Mais elle décida de rentrer dans son jeu.

–  Je vous demande pardon ? Pourquoi ne vous a-t-elle pas encore rendue aveugle ? répliqua-t-elle, vexée.

–  Parce qu'elle n'aveugle que les plus faibles... fit la duchesse comme si c'était la chose la plus évidente. Adieu...

   Et la duchesse s'en alla, agitant de manière provocatrice son éventail.

–  Quelle écervelée cette duchesse ! s'exclama la comtesse après le départ de cette dernière.

–  Excusez-moi, mais pourrais-je vous parler ? demanda une dame.

   La comtesse se retourna pour faire face à son interlocutrice.

–  Qui êtes-vous ? s'enquit d'abord la comtesse.

–  Je suis la marquise de Florel ! J'ai vraiment besoin de vous parler, venez !

   La comtesse ne savait que faire, car face à elle la marquise semblait effrayée, cachée par son grand éventail en plumes roses. Elle ne l'appréciait guère, mais sa curiosité la poussa à suivre la marquise.

   La marquise marchait rapidement, ses talons claquant sur le sol, ce qui trahissait son anxiété.

   La comtesse essayait tant bien que mal d'aller au même rythme que la marquise, mais elle n'avait pas l'habitude de courir en talons, et les retirer au beau milieu de la réception lui vaudrait sans doute une vague de regards noirs et un retour rapide chez elle.

   Une fois les deux femmes cachées des regards dans une chambre d'invités, la marquise s'expliqua :

– C'est très aimable à vous de m'avoir suivie.

–  Je n'ai pas tellement eu le choix. répondit la comtesse.

–  Si je vous ai demandé à vous de venir, ce n'est pas pour rien. On vous décrit comme une femme compréhensive et de grand coeur.

La tragédie du miroir Où les histoires vivent. Découvrez maintenant