Darklight T1 - Le Monde de L'Ombre

1.

Du haut de ses dix-sept ans, Ambre était une lycéenne assez farouche qui n'aimait pas vraiment les changements. Et là, elle n'aimait pas ce qu'il se passait. Sa mère, Délia, avait décidé de déménager. Ambre avait bien essayé de dissuader sa mère, en vain. La jeune brune aimait sa maison, elle y avait passé toute son enfance. Elle ne voulait pas abandonner sa chambre où elle s'était construit tant de cabanes, où elle avait rêver des heures durant sur sa carrière de star. Et puis il y avait aussi Poppy, le chat blanc des voisins qui venait souvent se frotter à ses jambes. Dans ces moments-là, Ambre le prenait dans ses bras pour le caresser et lui raconter sa journée.

Ce qu'elle aimait aussi ici, c'était le fait que sa mère lui donnait des cours à domicile. L'adolescente avait une sainte horreur du lycée et des cruels élèves. Alors, lorsque Délia lui avait annoncé qu'elle l'avait inscrite dans un lycée, elle avait pris ça comme une trahison. Elle avait eu envie de hurler. Sa mère, qui prenait toujours soins de ses enfants, allait l'envoyer tout droit dans la gueule du loup et elle détestait ça. Pourtant, Délia n'avait cessé de la rassurer. Elle lui répétait sans cesse que cette école était faite pour les gens comme elle. Elle n'avait pas su comment le prendre. Cela ressemblait plus à une réflexion qu'autre chose. Elle savait qu'elle était différente des autres puisque tous ses anciens camarades lui rabâchaient sans cesse, mais de là à l'envoyer dans une école particulière c'était exagéré. D'accord, étant jeune, elle avait brûlé le tapis de chez ses grands-parents, cependant cela ne voulait pas dire qu'elle était une criminelle pour autant ! Et puis c'était un acte involontaire.

Néanmoins, Délia avait rajouté que tous les élèves de ce lycée étaient extraordinaires. Ambre soupçonnait sa mère d'en faire tout un pataquès pour qu'elle ait envie d'y aller. Mais cela ne fonctionnait pas vraiment.

Durant toute la semaine, Ambre et Délia avaient tout rangé dans des cartons, aidées parfois de leur voisin. Ceci avait été très éprouvant pour les deux femmes. Délia n'avait plus l'habitude de faire autant d'efforts dans un si court laps de temps et pour Ambre, chaque fois qu'elle mettait un objet dans un carton, son cœur s'émiettait petit à petit.

Désormais, tout était enfin prêt. Aaron, le frère d'Ambre, venait d'arriver avec la voiture que son père lui avait achetée lorsqu'il était parti de la maison pour s'installer en résidence universitaire. Cela faisait maintenant deux ans qu'il étudiait l'informatique dans la faculté proche de leur future maison et ce cursus lui plaisait vraiment. Les cours l'intéressaient et il adorait programmer. En première année, il avait même créé un jeu. D'ailleurs, pendant pas mal de temps sa petite sœur y jouait beaucoup.

La petite famille chargea au maximum la voiture de l'aîné puis celle de Délia.

- Partez avant moi, j'ai quelques affaires à régler avant de partir. Je vous rejoins après, indiqua Délia à ses enfants.

Ambre prit le papier que lui tendait sa mère où était indiqué l'adresse. Elle regarda une dernière fois sa maison. Car oui, ici ça resterait toujours son chez elle. Ses yeux ambrés embués n'avaient plus leur éclat joyeux et leurs petits reflets dorés sur le bord des iris lorsque le soleil tapait. C'était le visage fermé qu'elle grimpa dans la voiture de son frère.

Avant qu'Aaron mette de la musique trop électronique au goût de sa sœur, cette dernière inséra son CD dans le lecteur. Durant tout le voyage, aucun des deux n'ouvrit la bouche. Aaron resta concentré sur la route et suivit minutieusement son GPS tandis qu'Ambre écoutait la musique bercée par les mouvements réguliers de la voiture. Elle observait son frère. Parfois elle l'enviait. Il était tout le contraire d'elle. Il avait beaucoup de charisme, aucune difficulté à nouer des amitiés. Ses cheveux bruns, son regard ténébreux ainsi que son imposante carrure faisaient tomber les filles comme des mouches. Jamais personne ne s'était intéressé à elle. Pour se consoler, elle se disait que peut-être quand elle aurait l'âge de son frère tout serait plus simple. Elle n'aurait plus à subir les critiques et les injures des autres. Mais pour cela, il fallait encore attendre deux ans pour avoir dix-neuf piges comme Aaron.