Chapitre 10 - Traiter

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C'est agréable de pouvoir garder une certaine forme de jardin secret. Nous sommes face à face avec notre esprit et nous pouvons dissimuler l'entière vérité ou ne serait-ce que les détails peu élogieux dans un coin de notre tête. Nous avons de la chance et c'est bien dommage que nous ne nous en rendons pas compte plus souvent.

Si j'avais raconté les détails à Nina, j'aurai perdu un peu de cette intimité qui m'est chère. Car en vérité vraie, tout l'intérêt de cette histoire se déroulait quand Gregor m'avait déposé chez moi.

J'avais passé une excellente fin de journée en sa compagnie et j'étais fiancée. J'étais fiancée à l'homme que j'aimais, j'étais heureuse ainsi qu'épanouie, et tout cela n'avait pas de prix.

Quand Gregor avait garé la voiture devant chez moi, je n'avais pas envie que ce moment passé en sa compagnie ne s'achève si rapidement. Pourtant, j'étais sortie de l'habitacle réconfortant de la Mustang et j'avais immédiatement senti sans le voir le regard glacial de mon frère braqué sur ma nuque. Il avait cette habitude de tirer le rideau du salon et d'épier tout ce qu'il se passait dans la rue. Ou plutôt il épiait mes allers et venues comme une caméra de surveillance cherchant le moindre de mes faux pas pour se permettre de me le reprocher ou pire, d'en venir aux mains pour me « recadrer ».

Gregor m'avait rejoins pour me souhaiter une bonne nuit et par la même occasion me demander s'il pouvait officialiser l'évolution de notre relation devant ma mère dans l'immédiat. Il était tellement impatient de lui montrer la bague qui avait glissé avec facilité sur mon doigt, comme si elle avait été conçue pour moi.
J'avais seulement secoué la tête de droite à gauche honteuse et avait montré discrètement du doigt la fenêtre où mon frère nous regardait toujours. Sans me retourner, je le savais qu'il regardait la scène du haut de sa tour. Gregor avait levé la tête et salué mon frère d'un air jovial que sûrement ce dernier lui avait rendu.

— L'espion est bien présent. Et il semble ne pas vouloir nous laisser un peu seuls.

Embarrassée au plus haut point, j'avais retiré avec le plus de discrétion qu'il m'était possible d'avoir la bague ornant mon annulaire et la glissais dans ma poche de pantalon sous l'œil triste de Gregor. J'aurai aimé pleurer de cette situation, mais le stress qui grandissait en moi m'empêchait presque de respirer. Il m'étranglait sans retenu. Gregor l'avait remarqué, puis s'était approché de moi pour m'embrasser la joue, car devant ma famille on ne s'embrassait jamais sur la bouche. Il y avait une forme de respect, mais aussi de crainte.

— Je ne t'en veux pas. On se revoit demain matin, car je compte vous inviter pour le petit-déjeuner et qu'on puisse officialiser le tout. Ne paniques pas, ne dis rien sur la bague. Je m'occuperai de tout. J'appellerai ta mère avant le premier film diffusé ce soir à la télévision. Je t'aime.

Je m'étais retournée comme un robot pour entrer dans le hall et une fois cachée, j'avais pu souffler. Sans le regard pesant de mon frère je me sentais mieux. Mais maintenant, il me fallait gravir les marches menant à ce lieu de prison qu'était la mienne.

Je touchais l'anneau à travers le tissus de mon pantalon m'assurant de sa présence, je ne voulais pas la perdre, mais encore moins qu'ils ne la voient. Avant d'avoir eu le temps d'insérer la clef dans la porte, elle s'ouvrait sous mes yeux devant un Jacques avec un rictus des plus malicieux sur la face.

— Tu as pris du temps avant de rentrer.

J'étais pétrifiée, mais je tentais de rester le plus naturel possible.

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