Chapitre 9 - Suivre

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C'est agréable de sentir ses poumons cracher le feu. Non, je rigole, ce n'est pas vrai. Je ne sais pas comment après une si longue nuit passée sans véritable sommeil, Nina avait réussi à me faire sortir du lit pour courir face au lever du soleil. Je n'ai dormi tout au plus une demi-heure. Ce n'est pas dormir mais bien faire une sieste. Je suis épuisée, les cheveux trempés, les jambes flageolantes, mais surtout les poumons en feu. Cela faisait bien trop longtemps que je n'avais pas couru et à dire vrai ça ne m'avait pas manqué.

Quand Nina m'avait proposé de rentrer, je n'avais pu refuser et avait foncé vers l'arrêt de bus le plus proche. Sans façon ; je ne rentre pas à pieds. Les transports en commun m'avaient soudainement manqué.

Nina n'avait rien ajouté beaucoup trop essoufflée, mais surtout morte de rire face à mon visage rouge. Je n'avais jamais couru aussi longtemps, mais surtout aussi loin. Nous avions traversé la ville pour nous retrouver à son parfait opposé, alors sans aucune autre façon je refais le chemin inverse à pied. Ils sont désormais en feu, tout comme mes poumons.

En observant Nina, je me rends compte qu'elle est dans le même état que moi. Ses cheveux sont trempés comme si elle venait de prendre une douche chaude. Des mèches de cheveux se collent sur son front et ses joues sont maintenant d'un rouge vif.

Aux premières éclaircies du jour, mes yeux s'étaient fermés tandis que Nina dormait depuis un petit bout de temps la respiration saccadée, sûrement à cause d'un mauvais rêve. Je sais n'avoir dormi que peu de temps car quand je m'étais réveillée, le soleil n'était pas encore entièrement visible à l'horizon, seulement ses fins rayons lumineux. Quand les légers ronflements de Nina n'étaient plus perceptibles, elle avait ouvert ses yeux et m'avaient regardé sans sembler me voir.

— Nous devrions courir.

C'est tout ce qu'elle m'avait dis avant de bondir hors du lit les jambes tremblantes sur le parquet. Elle était revenue dans ma chambre en moins de temps qu'il ne lui en avait fallu et habillée pour courir ainsi que le visage mouillé pour se débarrasser de sa légère gueule de bois. Je ne sais plus comment elle avait réussi à me faire courir sous la chaleur de ce dernier mois de printemps, mais elle avait réussi. Les rues étaient vides, mais nous étions là à courir comme si notre vie était en jeu et qu'un gain se trouvait au bout de la rue.

Depuis la grande vitre du bus, la ville semble avoir changé tout en étant restée la même. Elle semble plus lumineuse grâce aux rayons de soleil et à la verdure plus présente. Mais aussi par les nouvelles couleurs utilisées un peu partout par des artistes payées par la ville et égayant un peu le triste gris de Paris. Plus aucun déchet n'était au sol, les rues semblaient astiquées de fond en comble.

Avant, nous savions exactement où ne pas regarder pour ne pas tomber sur un camp de sans domicile fixe et culpabiliser sur cette aide humanitaire que l'on prônait, mais qu'on ne pratiquait pas. Maintenant, il n'y en avait tout simplement plus. Plus de deux tiers des sans-abris étaient des hommes et tout le reste des femmes qui furent immédiatement logées dans les bâtiments désormais vides. Elles ont toutes étaient réinsérées dans la société plus facilement que ce que l'on pensait découvrant des talents que l'on n'aurait pas pu soupçonner. En leur donnant un toit, un travail et surtout un but dans la vie, elles avaient aidé la nouvelle société qui venait de naître à se forger des bases bien plus que solides.

Une fois par semaine, toutes femmes confondues et dans le besoin peuvent faire des courses du strict nécessaire de façon totalement gratuite dans des centres présents dans chaque arrondissement de la capitale. Il en est de même dans le reste de la France, car Paris n'est bien sûr pas la seule ville du pays comme l'impression que l'on donne au monde.

À l'échelle mondiale aussi ce processus d'entraide avait été mis en place. Avec presque plus de la moitié des humains disparus, les ressources en nourriture étaient plus grandes et donc plus facilement distribuables. Déjà avant le départ des hommes, nous avions assez de ressources alimentaires pour nourrir de façon égale chaque personnes présentent sur Terre, mais nous étions bien trop égoïste pour partager, préférant gaspiller en jetant à la poubelle des tonnes de nourriture chaque année, plutôt que de donner à ceux qui en avaient vraiment besoin. Toutes les ressources que ce soit alimentaire ou de matière étaient maintenant distribuées de façon totalement égale. La famine n'était plus un mot que l'on semblait connaître, il s'effaçait peu à peu de nos esprits.

Un monde sans Eux  Où les histoires vivent. Découvrez maintenant