Chapitre 4

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Une nouvelle matinée se levait sur la surface obscure du château. Le soleil qui sonnait décidément toujours aussi faux s'étirait dans la voute céleste à l'instar des jeunes collégiens dans leur lit à baldaquin. Will ne s'étirait pas, elle. Etendue sur son matelas, les yeux grands ouverts, elle se donnait à penser, comme lors des huit heures précédentes, celles où tout un chacun avait pris un malin plaisir à se reposer à l'abri de tout souci.

A l'image de ses anciennes camarades de chambre, les trois nouvelles jeunes filles, en se levant, n'adressèrent pas la parole à la Gryffondor qu'elles savaient réveillée depuis ce qui semblait être des siècles maintenant. Ce n'était pas faute d'avoir essayé, hélas elles arrivaient bien trop tard. Depuis un an, il avait constamment fallu la changer de chambre car, visiblement, elle effrayait ses comparses de part ses trop grands yeux ou son air maussade. Les nouvelles demoiselles ne semblaient pas s'en formaliser, encore heureux - elles avaient sûrement été mises au courant.

Au bout d'un petit quart d'heure, Will finit par se délester de sa chemise de nuit pour enfiler son uniforme, à peu de choses près plus correct étant donné la roideur du tissu. Elle malaxa lentement sa mâchoire encore endolorie de sa rencontre avec Pandore, et passa un doigt sur sa lèvre fendue. Elle avait préféré ne pas se rendre à l'infirmerie, afin de ne pas aggraver les choses, mais surtout, parce qu'elle n'en avait rien à faire.

Enfin, après s'être soigneusement brossé les cheveux, elle descendit machinalement les marches de pierre qui menaient jusqu'à la salle commune, dans ce sens en tout cas.

Charlie ne l'avait pas attendue, cette fois. Will en soupira d'aise ; peu importe à quel point ses intentions étaient honorables, le jeune homme était devenu plus qu'étouffant. Un jour, lors de leur cinquième année, il avait même essayé de venir lui tenir compagnie dans sa propre chambre. Heureusement, les demoiselles qui créèrent Poudlard avaient, semblait-il, pensé à cette légère déconvenue, et ses jambes s'étaient dérobées sous les marches qui avaient adopté une forme pentue.

Cet évènement avait tout de même eu le mérite d'arracher un sourire à la Gryffondor, un de ces sourires qui étaient désormais si rares qu'ils seraient sans aucun doute vendus à prix d'or sur le Chemin de Traverse.

Elle dévala sans peine toutes les marches qui la séparaient de la Grande Salle, et, lorsqu'elle y parvint, une tête rousse et maculée de tâches de rousseur l'attendait. Will tenta de tordre ses lèvres en ce qui ressemblait plus à une grimace qu'à un sourire, mais cela parut satisfaire Charlie qui lui répondit en lui dévoilant toutes ses dents. Puis, il lui proposa du jus de citrouille, et sans même qu'elle ait répondu - il avait pris l'habitude qu'elle ne le fasse pas - en versa une bonne quantité dans son verre doré.

Will l'observa en renverser le quart et essuyer la table tout en esclaffant, l'œil vide. On aurait pu croire qu'elle avait, au départ, apprécié sa compagnie, mais cela n'avait plus jamais été le cas. Elle aurait aimé être seule, mais il ne le comprenait pas, et la blonde ne se sentait pas de taille à mettre les points sur les i. Mais c'était comme s'il ne comprenait pas que plus rien ne serait jamais comme avant, comme s'il songeait un jour à s'éveiller et à trouver la même Will, rieuse et agitée, qu'elle était en quatrième année.

Will balaya la surface glacée de la table afin d'en chasser les miettes et engloutit rapidement les trois toasts préparés à son intention. Puis, sans rien dire de plus, elle se leva en direction de son cours de Potions qui approchait.

Alors qu'elle s'éloignait à petits pas, la Gryffondor pouvait sentir le lourd regard de Charlie posé sur elle, mais elle ne s'en formalisa pas et s'empêcha de se retourner, le sac sous le bras. Sac qui, un instant plus tard, fut secoué par un craquement, puis deux, avant que tout son contenu ne se déverse sur le sol carrelé de la Grande Salle, y compris les pots d'encre qui déversaient leur contenu sur toutes les notes qu'elle avait d'ores et déjà pu prendre.

Moremplis IIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant