Tout ce qui brille

Partie 1

Il y a de ces villages si tranquilles qu'une fin du monde n'effleurait même pas le sourire de ses enfants.

Paladin Tree était de ces villages. Ce hameau d'environ 500 âmes siégeait aux pieds des ruines d'un château. A l'ombre des grands sycomores jouaient des enfants tandis que leurs parents tenaient échoppes et cultures. Chaque fin de mois, quelques hommes partaient sur les routes échanger les récoltes contre des pièces d'or ou d'autres marchandises. L'arrivée du printemps réchauffait les chaumières et égayait les esprits, tous se préparaient à la fête de printemps.

A l'entrée du village, une charrette se dessina menée par deux chevaux gris. Le vieil homme aux commandes stoppa le véhicule devant son petit commerce.

— Et alors ? Personne n'est là pour m'accueillir ?

Des bruits de pas résonnèrent sur le toit de bois suivis d'un glissement. Une jeune fille aux cheveux châtains descendit du toit juste devant les naseaux d'un des chevaux. Elle sourit au vieil homme dont le visage s'éclaircit.

— Ah ma fille ! Ma belle Elyeann ! se réjouissa-t-il les bras grands ouverts

— Papa !

— Où sont ta mère et ta sœur ?

— Je ne sais pas trop, sans doute aux champs, Papa, bafouilla-t-elle

— Pourquoi n'es-tu pas là-bas ? Tu attendais ton vieux père impatiemment ? s'amusa le vieil homme

— Pas tout à fait ... je surveillais Etiah.

— Ah ma chérie ! Ce cheval est plus choyé que le fils du roi pardi.

Tous deux rigolèrent en marchant jusqu'à l'écurie commune du village situé à deux pas de la maison familiale.

Elyeann n'était pas passionnée par les chevaux mais à la naissance d'Etiah, il y a trois ans, elle était tombée amoureuse du poulain gris aux yeux bleu océan. Et avec le temps, ils avaient tissé une belle relation. Elle n'aimait pas travailler aux champs alors Elyeann s'occupait du commerce de ses parents chaque après-midi après l'école.

Les chevaux furent détachés et pansés avant de décharger la charrette de marchandises en tout genre. Il fallait mettre à jour l'inventaire et s'assurer que la famille n'allait manquer de rien.

Pendant ce temps, les deux autres membres de la famille rentraient des champs de l'autre côté de la rivière. Elles étaient accompagnées par plus de la moitié du village.

Il y a vingt ans de ça, la famille du suzerain possédant les terres du village mourut. On parla d'une épidémie au roi mais tous pensaient à un empoisonnement. Le roi, certainement trop occupé à ses affaires royales, n'avait jamais nommé de successeur. Les terres avaient été cédées aux villageois qui s'étaient donc affranchis du système féodal. La même péripétie arriva à plusieurs villages dans la vallée du fleuve Kornehl sans jamais qu'un autre suzerain soit nommé.

Toute la famille se retrouva dans le foyer de la maison, près d'un feu de tourbe. Elyeann et sa petite sœur Lijah épluchaient les légumes pendant que leurs parents préparaient la viande pour le potage du soir.

— Alors les filles, vous êtes prêtes pour demain ?

— Je suis toujours prête pour le jour du printemps, maman ! se réjouissait Lijah

Le jour du printemps était un jour béni dans tout Muireall. Ce comté était nommé ainsi car il était bordé à l'ouest par de grandes falaises où venait s'écraser en écume la mer, d'où son nom de comté de la mer blanche – Muireall – l'hiver était une période dure pour ceux qui vivaient de la terre. On disait que la vie était bien plus difficile dans le Nord, que les falaises y étaient bien plus hautes et la terre bien moins fertile.