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Un mois était passé lorsque je reçus une lettre, signée de la main d'Abby. Une lettre simple. Sans bonjour, sans au revoir.

   « Ne t'es-tu jamais demandée ce que nous avait raconté Cassiopée cette nuit-là ? Trop rapidement, avec trop d'enthousiasme pour que tu puisses saisir. Ce n'est pas juste que tu sois la seule à ne pas savoir, alors voilà. Ce qu'elle pointait du doigt c'était sa constellation. Cassiopée. Elle était fière de son prénom. Cassiopée était une Reine. Elle a fait l'erreur de dire que sa fille Andromède était plus belle que les nymphes de la mer. Poséidon, ivre de colère, ravagea par les tempêtes les côtes du pays. Alors, afin de calmer les malédictions, Andromède fut attachée à un rocher en sacrifice. Persée la sauva, sur le dos de son cheval ailé: Pégase. Mais les dieux voulurent que pour toujours les hommes se rappellent qu'il n'est pas bon de se vanter, et donnèrent donc aux constellations les noms des personnages de cette histoire. Et pour punir Cassiopée de son orgueil ils lui ont attribué celle-ci en particulier, car elle tourne autour des pôles, toujours la tête en bas. La tête en bas. Crois-tu qu'elle aurait été schizophrène si son prénom n'avait pas eu la tête en bas ?  Crois-tu au contraire que ces étoiles lui étaient destinées et l'attendaient. Où est-elle désormais ? A-t-elle atteint le céleste sans nous ? Pourquoi nous a-t-elle abandonnée aux milieux des regards qui nous fixent ? Ces regards me font mal.

Ce même soir, tu m'as dit que tu voulais savoir ce qu'était la musique. T'en souviens-tu ? Oui bien-sûr que tu t'en souviens.

Tu avais la réponse sous les yeux. Le lever de soleil. C'est ça la musique. Des nuances qui s'entremêlent, dansent avec sensualité, s'étreignent et se fuient. Des couleurs que tu entends. Le rouge puissant du Do. L'oranger nuancé du Ré. Le jaune triomphant du Mi. Le vert délicat du Fa. Le bleu impétueux du Sol. Le violet séduisant du La. Le bordeaux élégant du Si. La symphonie était devant tes yeux. Elle se jouait. Tu entendais les violons, le piano, la harpe... Les étoiles tintinnabulaient farouchement. Elles dansaient comme les notes d'un opéra, elles virevoltaient dans les airs et tu ne pouvais pas les attraper, mais elles étaient là. Elles sont là. Elles t'appartiennent. Pour toujours. Je crois que Cassiopée est une note désormais. L'entends-tu ? Et moi m'entendras-tu Octavie? »

C'était un adieu.

Cassiopée s'était envolée, Abby l'avait suivie. Simplement. Ce n'était pas triste. Ca ne devait pas l'être. Elles dansaient ensemble désormais.

La symphonie des cinq octaves avaient été la plus belle, et désormais était effacée.

Quatre octaves libres.

Et il ne restait que moi.

Incompréhensible. Seule. Invisible. Inaudible.

Une simple octave pathétiquement prisonnière pour l'éternité, errant dans l'immensité.

















•Fin•

Cinq OctavesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant