PROLOGUE : Renaissance et sommeil éternel

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On raconte que lorsque quelqu'un meurt, son âme ne va pas forcément en enfer ou au paradis.

"Mourir" peut être le simple fait de perdre son enveloppe charnelle. Les âmes de certaines personnes qui ont laissé sur terre des chagrins, des colères ou des regrets ne peuvent quitter ce monde et atteindre l'une de leurs destinations. Elles sont alors accueillies dans un autre monde qui leur offrira l'unique chance d'achever ce qui les retient encore, mais qui fera de ces esprits une chose inoffensive qu'il faudra préserver plus que son corps.

Ces personnes renaîtront une nouvelle fois et mèneront une nouvelle vie sans aucun souvenir de leur précédente existence, mais devrons malgré cela tuer les chagrins de leurs anciennes vies, éteindre leurs colères ou éviter leurs regrets, c'est ça, leur but ultime, mais inconnu. Si ces esprits meurent sans avoir atteint ce but, ils seront expédiés au Yomi, là où les âmes errantes qui n'ont prit aucun des deux chemins sont collectée.

Cela semble impossible, mais cette légende veut que ces âmes soient guidées par des fragments de leur ancienne vie, tout reposera sur leur volonté : arriveront-elles à trouver leur sommeil éternel ou seront-elles dupées par leurs néfaste renaissance... ?

Le feuillage écarlate des forêts de Kōyasan laissaient deviner le changement de saison qui touchait ce massif montagneux.

Assis confortablement sur un coussin, une tasse de thé vert à peine entamée entre les mains et un vieux parchemin déployé sur lequel ce récit était inscrit. Un homme qui ne donnait pas du tout l'impression d'avoir atteint la trentaine était plongé dans un mutisme agréable sur lequel dansaient les feuilles tombantes. Il détacha ses yeux des mots écrits sur ce vieux parchemin et releva la tête vers la magnifique vue sur le vaste jardin que lui présentait sa place préférée sur l'engawa* ouvert de sa maison traditionnelle battit près d'un grand temple qu'il fréquentait tous les jours. L'homme appréciait tout particulièrement la brise fraîche qui venait secouer ses cheveux courts dorénavant coiffés de ces mêmes feuilles mortes qui s'étaient logées entre ses mèches rebelles. Il en retira une et la fit tournoyer entre son pouce et son index.

Ses lèvres s'étaient étirées en un fin sourire teinté de nostalgie, peut-être parce qu'aujourd'hui encore, il allait fermer les yeux et rassembler les fragments de ses souvenirs éparpillés en son âme.


*Engawa : une bande de sols suspendue généralement en bois et se trouvant juste devant la fenêtre ou les volets des pièces dans les maisons traditionnelles japonaises, un peu comme une véranda. Seulement, ils font le tour de la maison comme un long couloir en bois avec une toiture. À l'origine, ils facilitaient la circulation entre les différents bâtiments tout en étant protégé de la pluie ou du vent et peuvent être fermés avec des panneaux en bois (Amado) en cas de tempête ou autre.

Tsuioku : fragments d'une vie Où les histoires vivent. Découvrez maintenant