Chapitre 1 : Les accordailles

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Elizabeth ne songea même pas à refermer la porte de la bibliothèque et se mit à courir dans le couloir sombre de la maison. Elle n'entendit pas la voix de son père, derrière elle, pas plus que les confidences que s'échangeaient Jane et sa mère dans le petit salon. Elle ne pensait qu'à une seule chose.

Il l'attendait. Là, dehors, il l'attendait. Et elle courait vers lui.

Elle ne s'arrêta que sur le perron arrière, en haut des marches qui donnaient sur la basse-cour. Mr Darcy, pour ce qui allait probablement devenir la plus grande demande en mariage dont la famille Bennet pourrait s'enorgueillir, était passé par la petite porte, dans la plus grande simplicité. Pas de grands attelages fringants, de redingote tirée à quatre épingles, pas même de chapeau à la main. Un regard, quelques paroles et un court entretien dans la bibliothèque avec Mr Bennet, alors que le jour était à peine levé, voilà à quoi se résumait la demande dont Elizabeth avait tant rêvé.

Les cheveux en bataille, la chemise entrouverte et la mine inquiète, Mr Darcy faisait les cent pas sous les fenêtres du petit salon, sans paraître se rendre compte des regards insistants de toutes les femmes de la maison qui ne le quittaient pas. Il n'avait pas fière allure, en cet instant précis, mais dès qu'il entendit Elizabeth arriver il s'immobilisa, leva les yeux vers elle, et son visage tout entier s'éclaira.

Elle dégringola les marches à la volée et se précipita vers lui. Elle se serait spontanément jetée à son cou si, au dernier instant, une sorte de timidité ne l'en avait empêchée, mêlée de l'envie de ne pas se donner en spectacle devant sa mère et ses sœurs. Elle s'arrêta donc brusquement dans son élan et se contenta de lui prendre les mains pour les serrer très fort.

_ Il est d'accord... Il nous donne son consentement, réussit-elle à dire d'une voix un peu rauque.

_ Bien.

Un léger sourire releva à peine le coin de sa bouche, et ses mains répondirent à l'étreinte d'Elizabeth en les serrant plus fort encore.

_ Bien... répéta-t-il très doucement. Elizabeth, je...

La jeune fille irradiait de tout son être. Il était à elle ! Enfin ! Elle pourrait bientôt se laisser caresser par ce regard-là jour après jour, sans avoir besoin de mendier quelques secondes d'attention. Bien sûr, il leur faudrait d'abord être patients, car les préparatifs du mariage prendraient du temps, mais ensuite ils ne se quitteraient plus, quoiqu'en dise Lady Catherine... ou qui que ce soit d'autre.

Mr Darcy jeta un rapide regard vers la fenêtre derrière laquelle se trouvaient Jane et Mrs Bennet, et Elizabeth, prenant brusquement conscience de leur manque d'intimité et de la curiosité indiscrète dont ils étaient l'objet, se raidit. Darcy reporta son attention sur elle, lui caressa les mains et les porta à ses lèvres.

_ Je ne saurais vous dire, commença-t-il doucement, à quel point cette nouvelle me remplit de bonheur. Hier encore, je pensais vous avoir perdue, et aujourd'hui tout semble enfin possible. Aujourd'hui...

_ Aujourd'hui, je suis à vous, acheva-t-elle doucement.

Il lui sourit. Un vrai sourire, celui-là, chaud et lumineux, un de ceux dont il l'avait gratifiée lorsqu'ils s'étaient vus à Pemberley, plusieurs semaines auparavant. Puis il reprit :

_ Malheureusement, il semble que ce ne soit ni le moment ni l'endroit pour vous dire tout ce que je voudrais vous dire.

Elizabeth rougit et se défendit aussitôt.

_ Je suis désolée, je sais que ma famille n'est pas ce que vous...

_ Non ! la coupa-t-il. Non, ce n'est pas ce que je voulais dire. Je voulais... Je... je devrais simplement attendre un moment plus propice pour vous serrer dans mes bras, Elizabeth. Si vous m'y autorisiez, bien sûr, ajouta-t-il précipitamment, comme s'il excusait déjà sa franchise.

La renaissance de Pemberley (fanfiction)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant