Héloïse

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Après la nuit agitée, Gabrielle se réveille la bouche pâteuse. Aux souvenirs de la vieille, la jeune fille se maudit intérieurement. Même si elle a l'impression d'avoir vécu cette nuit entrecoupée, oubliant les détails, elle se souvient d'évènements qu'elle aurait voulu oublier. La distance qui s'était installée entre Juliette et elle l'attristait mais ce n'était rien face au sentiment de honte innommable que Gabrielle ressentait.

- T'es réveillée ?

La jeune fille ferma les yeux, sa cambrioleuse était toujours là.

- J'ai rapproché la bassine si t'as encore envie de vomir.

Son visage s'empourpre, Gabrielle chuchote un « merci » inaudible avant de s'enfouir sous la couette malgré la chaleur de la pièce. Alors qu'elle entend les pas de la jeune fille s'éloigner, le peu d'alcool que Gabrielle n'a pas dégobillé et sa courte nuit la plongent dans un sommeil profond.
Plusieurs heures plus tard, elle décide de sortir de son lit malgré la tête qui lui tourne encore. Elle espère que la brune soit partie. Pourtant son visage est un peu trop expressif lorsqu'elle l'aperçoit dans son canapé.

- T'as l'air ravi de me voir ! S'exclame-t-elle hilare.

Gabrielle n'essaya même pas de se justifier. Elle aimerait que cette jeune fille qu'elle ne connait pas s'en aille. Certes, elle lui était reconnaissante de lui avoir tenu les cheveux lorsqu'elle vomissait, de l'avoir bordé et surtout de l'avoir raccompagné chez elle mais la honte était plus forte. Gabrielle voulait se retrouver seule. Devant l'absence de réaction, la brune se leva.

- Bon, je pense que t'as plus besoin de moi. Je vais y aller.

Gabrielle, mal à l'aise, la raccompagna jusqu'à la porte d'entrée se sentant soudain peu sympathique après ce que sa cambrioleuse venait de faire.

- Merci pour ce que tu as fait. Je te suis très reconnaissante. Je crois que je n'aurais même pas su retourner chez moi dans mon état. Dit-elle avant de la prendre brusquement dans ses bras pour appuyer sa sincérité.

Face à cet élan d'affection, la cambrioleuse se détacha bien vite visiblement surprise et gênée.

- Ok... Je suis contente de t'avoir aidé, je supportais mal le fait de te laisser dans cet état-là.

Gabrielle aussi fut surprise de cette réaction, peut-être même légèrement blessée. C'était seulement un câlin. Avant de la laisser partir, elle se décida à lui demander son prénom.

- Je m'appelle Héloïse. Répondit-elle touchée, sourire aux lèvres.

- Moi c'est Gabrielle.

- Je sais.

C'était les derniers mots qu'elle avait prononcés avant de dévaler les escaliers. Son ton avait été neutre comme une affirmation, oui Gabrielle, je sais qui tu es. Gabrielle, surprise, avait refermé la porte sans rien ajouter. Cette fille était décidément bien mystérieuse. Des milliards de questions lui trottaient dans la tête. Gabrielle avait le sentiment qu'elle la reverrait.

Après quelques heures supplémentaires de sommeil, la jeune fille s'autorisa enfin à repenser la nuit dernière. Lorsqu'elle avait rencontré sa cambrioleuse, elle avait déjà beaucoup bu. A cet instant, Gabrielle se sentait rejetée de Juliette, de son ancienne petite amie, de ses amis. Plus généralement, elle avait le sentiment que la vie entière la rejetait. L'étudiante doutait de l'importance de son existence. Qu'elle était sa place ?
A ces mots, les larmes montèrent et elle se dépêcha d'enchainer la suite des évènements. La jeune brune était soudainement apparue, chassant ses pensées noires. Sans rien connaître d'elle, mise à part le fait qu'elle avait essayé de lui voler de la nourriture, elles s'étaient mises à discuter. Aucune n'avait fait choisi de discuter de leur première rencontre. D'un point de vue extérieur, cela aurait pu donner une vision de deux jeunes filles qui se rencontrent. Leurs sujets de conversation étaient de banales discussions du quotidien. Gabrielle ne comptait pas dévoiler des morceaux de sa vie privée à une inconnue et Héloïse avait le même avis. Contrairement à d'habitude, ces discussions ne l'ennuyaient pas. Le sujet principal n'était pas bien différent de celui qu'elle pouvait avoir avec ses amis mais elle ressentait quelque chose de plus fort qui les liait. Même maintenant avec du recul, Gabrielle n'arrivait pas à le discerner. Était-ce dû aux circonstances de leur rencontre ? Sûrement, se disait-elle.
En tout cas, la jeune fille ne connaissait rien d'Héloïse même après plusieurs verres échangés. Au détour d'une conversation, Gabrielle avait essayé d'en savoir plus. Elle avait seulement demandé si la brune était étudiante. Mais Héloïse était devenue sombre et avait rapidement changé de sujet.
Le lien qui les liait était étrange, plus fort qu'il ne devrait être au stade de connaissance. Au fil de la soirée, il s'était endurci et Gabrielle n'était pas la seule à l'avoir ressenti puisque Héloïse l'avait raccompagnée chez elle et même soutenue. Une chose, cependant, avait marqué la jeune étudiante. Se faisant raccompagnée, Héloïse avait retrouvé l'immeuble de Gabrielle toute seule. Lorsque l'étudiante s'était étonnée de la bonne mémoire de la jeune brune, cette dernière lui avait spontanément répondu : « On n'oublie pas les personnes qui nous sauve la vie. ». Gabrielle aurait voulu lui dire que ce n'était pas vrai. Elle l'avait seulement laissée partir. Mais intimidée, elle n'avait rien dit.

Puis Héloïse était restée toute la nuit aux toilettes à ses côtés. Elle avait veillé sur elle comme personne ne l'avait fait. Cet élan de générosité avait fait remonter en elle toutes les émotions que la jeune fille avait intériorisées. Alors elle s'était mise à pleurer. Héloïse n'en profita jamais pour demander ce qui n'allait pas, elle s'autorisa seulement à glisser sa main sur le dos de Gabrielle pour l'apaiser. La brune avait l'air véritablement peiné par ce mal-être. Elle répétait sans cesse que tout allait bien se passer, qu'elle était là et qu'elle ne bougerait pas. Ces paroles finirent par réconforter Gabrielle et elle pu s'endormir quelques heures plus tard.

A son réveil, Héloïse était de l'autre côté du lit. Avant qu'elle ne lui demande si elle était réveillée, Gabrielle avait pu l'observer. Là, son visage était apaisé contrairement à l'air grave qu'elle affichait toujours. Héloïse était une jolie fille. Sa peau claire et ses cheveux bruns lui donnait un air angélique. Ce qui contrastait avec sa coupe à la garçonne et les nombreux tatouages qu'on voyait sur ses bras et qu'on devinait se poursuivre sous ses habits. Gabrielle se dit qu'elle aurait bien voulu les voir entièrement mais ce n'était pas seulement pour la vue des tatouages. Elle refoula bien vite cette pensée, se sentant soudain indigne de la générosité de la belle brune. Gabrielle referma alors les yeux, se concentrant sur son propre corps pour analyser l'état dans lequel elle était.

Gabrielle se sentait encore honteuse face à cette nuit et ce qu'elle avait fait subir à sa cambrioleuse. Mais c'était aussi grâce à hier qu'elles s'étaient revues. Et elle était reconnaissante d'être retombée sur elle. Héloïse était quelqu'un de bien, elle en était certaine. Le lien qui les liait aussi était spécial et elle avait hâte d'en savoir davantage.



Bonjour ! Chapitre un peu plus long que les précédents, j'en suis plutôt contente :) 
N'hésitez pas à me donner votre avis. C'est important pour moi de savoir si ça vous plaît ! 
On en sait un peu plus sur cette fameuse cambrioleuse ;) 
Merciiii


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⏰ Dernière mise à jour : Jun 22, 2019 ⏰

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