Une guerre amoureuse {JIKOOK}

Chapitre 25

Mes écouteurs dans les oreilles, mon regard se perdait entre des dizaines de petites gouttes d'eau défilant le long de la fenêtre sale du bus. C'était un temps assez pluvieux pour un mois d'octobre. Il faisait froid, le soleil ne nous rendait presque jamais visite, laissant sa place aux nuages plus ou moins gris toute la journée. On se croirait en hiver, comme si cette saison ne m'avait jamais quitté.

Tout en me laissant bercer par les secousses incessantes de ce car, je repense à tout ce qu'il s'est passé depuis Noël. Et il s'en est passé des choses... La guerre est finie depuis le début du printemps. Je ne saurais dire la date exacte ayant été un peu déréglé à force de vivre dans une tente et des tranchées. Je ne saurais dire non plus pourquoi elle s'est soudainement terminée, mais l'essentiel était que tout allait redevenir normal pour chaque soldat et pour tout le pays. Cependant, que ce soit le temps ou ma solitude permanente, j'ai toujours l'impression d'y être encore.

J'ai même l'impression que tout s'est empiré de mon côté, après Noël. Car le lendemain de ce jour, on m'a enlevé Jimin. Oui, celui-ci avait fait une crise, encore une... Les infirmiers l'ont donc emmené et je ne l'ai jamais revu. Quand la paix fût revenue, je n'ai eu aucune opportunité de savoir où était Jimin. Et ça m'a brisé le cœur. Je ne dormais plus, mangeais moins... Je m'étais même dit qu'il n'était sûrement plus de ce monde.

Mais il y a un mois de cela, en rencontrant les deux généraux Kim en ville, un espoir est né. Ce jour-là, j'ai appris que Jimin avait été envoyé dans un hôpital afin qu'il puisse bénéficier de soins bien plus efficaces, car sa blessure était plus grave que prévu. J'ai aussi appris le nom de l'hôpital où il logeait. C'est donc à partir de ce moment-là que mon cœur c'était mis à débattre. Suite à cette rencontre je n'ai pas perdu de temps pour me présenter à l'accueil de ce fameux hôpital. Là-bas j'appris que Jimin était sorti il y a peu et je réussis à avoir son adresse.

Ce n'est qu'un mois après que je pus enfin m'y rendre ayant terminé mon année d'étude à Séoul. Je n'avais pas réussi à y aller plus tôt, à mon plus grand regret. Mais aujourd'hui, je suis dans ce bus en direction de Busan, en direction de Jimin. C'est le bruit strident des freins qui me prévînt que j'étais arrivé à destination. Je me lève donc, range mes écouteurs dans mon sac et sors du bus. La pluie ne cessa pas de tomber mais heureusement pour moi, j'avais ramené un parapluie. Je l'ouvris et commençai à marcher lentement vers les rues sombres de la ville. Malgré que nous étions en début d'après midi, la pluie faisait plutôt penser que nous étions en fin de soirée. D'ailleurs les lampadaires étaient allumés, tous, sans exception.

Je sors alors un bout de papier de ma poche et relis pour la énième fois l'adresse de Jimin. Je lâchai un soupir puis le rangeai afin de me concentrer sur la lecture des panneaux. Sur le chemin, plusieurs pensées me parasitèrent le cerveau.

Et si Jimin m'avait oublié ? Si ça se trouve il a refait sa vie, sans moi. C'est une supposition tout à fait probable... Même si j'aimerais fortement que ce ne soit pas le cas. Mais je ne peux m'empêcher de penser comme ça depuis ma rencontre avec les Kim. Je sors de mes pensées en voyant le numéro 597 sur une des boîtes aux lettres de la rue. Mon cœur accéléra d'un coup quand mes yeux se posèrent sur le nom de famille.

«- Park... soufflais-je»

Je redressai mon parapluie et me mis à contempler la façade. La maison était vraiment grande et seul un petit portail me séparait de l'allée pour atteindre la porte. J'avais envie de courir jusqu'à celle-ci et de l'ouvrir pour crier son nom dans toute la maison. Mais je fus vite refroidis par la réalité. De là où j'étais, je pouvais voir une jeune femme nourrissant un bébé affichant un sourire rayonnant, par la fenêtre. Cette vue me fit reculer d'un pas. Mon pire cauchemar devînt réalité en même pas deux minutes. Je priai pour m'être trompé de maison, de rue voir même de ville. Je pris alors mon téléphone et me précipitai dans mes notes pour vérifier l'adresse.

La main tremblante, je constatai que l'adresse était bonne et que j‘étais donc bien au bon endroit. Mon regard se reposa alors sur la femme et l'enfant mais mes larmes s'invitèrent soudainement à la fête quand je vis Jimin arriver dans mon champ de vision, lui aussi, le sourire aux lèvres. Il embrassa le bébé sur le front et sourit à la femme. En voyant cette scène, mon bras n'eut plus la force de tenir le parapluie et le laissa tomber. Jimin avait refait sa vie, et je n'en faisais plus parti...

C'est sous cette scène et sous cette pluie incessante que je me remis à marcher, lentement, et sans but laissant les gouttes d'eau de faufiler entre mes vêtements. Je ne pouvais plus supporter ça plus longtemps et toquer à cette porte n'allait me faire que du mal. Longeant assez maladroitement le trottoir, des hoquets sortirent de ma gorge et mon visage était submergé de larmes cachées par l'eau du ciel. Mais je fus soudainement ralentis par un bruit sourd suivie d'un grincement aiguë et d'une voix m'étant étrangement familière.

«- Jimin reviens ! Tu n'as pas le droit de courir..!»

L'appel de son nom me stoppa net et une respiration saccadée se fit entendre juste derrière moi.

«- Jungkook ? C'est bien toi ?»

Mes pleurs cessèrent presque instantanément lorsque j'entendis sa voix qui m'avait tant manquée. Résigné, je me retournai doucement et fit face à son visage rempli d'espoir et de... colère ? Soudain, sa main se posa violemment contre ma joue.

«- Tu oses venir ici après tout ce temps ? Après m'avoir abandonné et oublié ?! Comment oses-tu ?»

L'incompréhension pouvait se lire sur mon visage à ces mots. Je ne comprenais vraiment pas pourquoi il me disait ça, et surtout pourquoi il m'avait frappé.

«- Quoi...? Mais de quoi tu parles ?

- Tu n'es jamais venu me rendre visite à l'hôpital alors que j'avais besoin de toi, j'avais énormément besoin de toi Jungkook ! Tu sais que je t'ai cru mort ? J'ai cru que tu avais succombé et que je ne te reverrai plus jamais ! Cria-t-il.

- C'est faux ! Tentais-je de riposter. Je ne savais même pas qu'on t'avait emmené à l'hôpital, je le sais seulement depuis même pas un mois ! Et ça fait à peine deux semaines que j'ai pu avoir ton adresse !»

Jimin se calma petit à petit, ne détachant pas son regard du mien. Son visage était toujours aussi magnifique. Il était habillé d'un jean et d'un simple sweat bordeau mais pour moi, c'était actuellement le bel homme du monde. Cependant, je n'arrivais pas à me réjouir face à lui. Je n'arrivais pas à enlever cette femme de ma tête.

«- Alors pourquoi...»

Jimin se mordit la lèvre en me regardant.

«- Pourquoi ne pas avoir sonné à la porte ? Pourquoi il a fallu que ce soit ma sœur qui t'apperçoive en premier ?»

Mon cœur loupa un battement à l'entente de sa dernière phrase.

«- Ta...sœur ? Ce n'est pas ta femme ?»

Jimin me regarda d'un air interrogateur, puis compris bien vite la situation.

«- Bien sûr que c'est ma sœur ! Comment j'aurais pu t'oublier Jungkook ? Depuis qu'on s'est rencontré tu es tout pour moi... Quand je suis sorti de l'hôpital je voulais te retrouver malgré que tu ne sois jamais venu me voir. Tu me manquais terriblement et j'avais eu si peur que tu ne sois plus de ce monde Jungkook je...»

Jimin s'accroupit soudainement, essayant de calmer ses reniflements. Je m'accroupis à mon tour, ne pouvant m'empêcher de sourire.

«- Alors...tu n'as pas refait ta vie ? Je souffle de soulagement. Jimin je suis tellement désolé... Si j'avais su je serais venu te voir tous les jours, tu le sais bien ça. Jamais j'aurais pu t'abandonner comme ça. Tu as changé ma vie, tu m'as en quelques sortes sauvé et je ferai tout pour toi...

- Alors embrasse-moi.

- Hein ?»

Jimin afficha un air sérieux au visage malgré la pluie qui dégoulinait sur lui.

«- Embrasse-moi alors, idiot »

Nos visages n'étaient qu'à quelques centimètres d'écart. Je pose alors ma main sur sa joue et la caresse doucement, le sourire aux lèvres, puis supprime cet écart en l'embrassant avec amour. À ce moment là, j'avais l'impression que les nuages avaient disparu et que le soleil brillait de mille feux dans le ciel.

Fin