II

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Il ferme derrière lui la porte de sa chambre. La main sur le cœur, il se laisse tomber sur le battant et prend une vive inspiration. Il ferme les yeux quelques secondes et se frotte le visage, puis attrape un pan de sa chemise et le secoue énergiquement, comme s'il essayait de s'éventer. Il déglutit difficilement et tire un peu sur son col romain pour faciliter sa respiration. L'information processe avec difficulté dans son cerveau, ses neurones sont englués et lents.

-Reprend toi, se sermonne-t-il à voix basse.

Il ouvre vivement son armoire et pioche quelques effets parmi ses vêtements d'intérieur. Avant de sortir, il s'arrête devant le bureau et remet avec humeur les livres en piles, ferme l'ordinateur portable, jette dans la corbeille les papiers qui traînent, comme pour se venger d'avoir été mis dans l'embarras précédemment. Il s'en retourne auprès du rescapé.

La porte de la chambre est entrebâillée, comme il l'a laissée en partant. La lumière projetée de l'intérieur dessine un fin liserais jaune autour du battant. Adam pose la main sur la poignée, prêt à ouvrir. Mais, finalement, il reste immobile. Il tend l'oreille. Il écoute les froissements de tissus, les reniflements discrets, les petits pas presque inaudibles. Il approche lentement son œil de l'interstice. La créature fantastique se tient debout, de dos, au beau milieu de la pièce. Il tamponne précautionneusement chaque partie de son corps, entièrement dévêtu. Les muscles fins se contractent et se relâchent au gré des mouvements gracieux. Il essuie ses épaules puis pose de nouveaux la serviette sur le haut de son crâne pour sécher ses boucles épaisses. Adam détaille le cou long et mince, le port de tête noble et les épaules graciles, le dos élégant et la taille menue. Le souffle coupé par sa beauté poignante, ses joues rosissent à vue d'œil. Ses doigts se serrent légèrement autour de la poignée. Assez pour la mouvoir de quelques centimètres, déchirant le silence d'un sinistre grincement. Le jeune homme, les bras levés, s'immobilise en plein mouvement. Il tend imperceptiblement l'oreille vers la porte mais ne se retourne pas. Le cœur battant, le voyeur reste ainsi pétrifié et honteux. Il lâche lentement la poignée. Le jeune garçon se baisse alors lentement et essuie ses mollets, relevant ainsi son derrière rebondi. Adam fait deux pas précipités en arrière, le dos de la main couvrant sa bouche entrouverte. Il inspire silencieusement et secoue la tête, les paupières résolument closes. Il pousse un soupir résigné et s'approche de la porte, la main tendue. Le jeune homme termine de nouer la serviette autour de sa taille.

Adam pousse lentement la porte. Le garçon fait volte-face, les sourcils haussés. Il sourit et fait un pas vers lui, les deux mains vers l'avant.

-Merci!

Le jeune prêtre tend les vêtements, le geste gauche. Ses joues sont encore un peu chaudes, et il est certain que ses yeux ont pris une expression penaude. Il se racle la gorge.

-Tu as faim?

Le garçon ouvre de grands yeux et hoche la tête énergiquement. Adam n'a pas le temps de réprimer le petit rire amusé qui secoue furtivement ses épaules.

-Je vais te réchauffer quelque chose, alors. Vient quand tu es prêt.

Il commence à s'éloigner vers la sortie.

-La salle de bain est au bout du couloir, si besoin. Tu peux y déposer tes vêtements, je m'occuperais de les mettre à sécher, d'accord?

Reconnaissant, le jeune homme acquiesce sans un mot.

Nos offenses pardonnéesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant