VII

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La chambre est baignée d'une lumière pâle et orangée. Le soleil s'infiltre à travers les rideaux comme s'il était pressé de se faire pardonner son humeur maussade de la veille. Il ne pleut plus. Le calme et le silence, brisés seulement par quelques doux chants d'oiseaux, habillent la chambre d'une ambiance onirique. Ange est allongé, nu, enroulé dans les draps. Adam se tient debout, appuyé contre le bureau, une tasse fumante à la main. Il regarde le bel endormi. Il regarde ses paupières closes, nervées de quelques vaisseaux apparents, ses cils clairs si longs qu'ils frôlent presque les joues douces et arrondies, son minuscule nez en trompette. Il regarde son cou élégant, ses clavicules. Sa taille fine, ses reins cambrés. Il est allongé sur le côté mais son corps penche vers l'avant. Sa tête repose sur son coude, l'une de ses jambes est repliée devant lui, sa main cachée entre ses cuisses. Adam passe une main dans ses cheveux, couvant l'ange du regard. Il boit une gorgée de café. Le garçon pousse un faible gémissement. Il s'agite, presse ses paupières l'une contre l'autre. Il baille, roule sur lui-même et s'étire comme un félin, s'empêtrant un peu plus dans les draps. Adam se redresse alors et attrape derrière lui un plateau remplit d'un copieux petit-déjeuner. Il s'assoie doucement près du jeune homme et dépose les victuailles sur le matelas. Ange pousse de petits soupirs endormis. Il frotte ses yeux de ses poings fermés, puis les ouvre enfin. Son regard tombe immédiatement dans celui d'Adam. Il s'illumine, découvrant ses dents blanches dans un sourire ravi. Il tend les bras vers le jeune homme. Adam rit doucement, pose sa tasse sur le plateau et se penche vers lui, acceptant l'étreinte sans rechigner. Il glisse une main sur sa taille et le sert contre lui, Ange referme ses bras sur sa nuque. Il niche son visage dans son cou et se délecte de son odeur poudrée. Il embrasse du bout des lèvres le côté de sa mâchoire, puis tourne son visage vers le sien et presse sa bouche contre la sienne. Il goûte sa langue chaude et sucrée. Il caresse sa taille, son dos. Ange glisse ses mains dans ses cheveux. La chaleur de son corps nu irradie, Adam la sent remplir l'espace entre ses bras, déborder, l'envelopper entièrement. Le temps semble s'étirer, les minutes sont des heures. Leur baiser se prolonge ainsi, envoûtant, sensuel et tendre à la fois. Puis, à contrecœur, ils abrègent leur étreinte. Adam s'écarte un peu mais il sent toujours son corps pressé contre le sien, il sent sur sa joue son souffle chaud. Il le regarde et lui sourit. Il chuchote.

-Bien dormi?

Ange lui rend son sourire et hoche la tête.

-Tu as faim?

Il hoche la tête de plus belle, énergiquement. Adam rit doucement et désigne le plateau posé non loin.

-Sert toi.

Ange regarde le plateau avec envie, les yeux écarquillés. Il regarde de nouveau Adam, la bouche arrondie en une expression hésitante. Celui-ci éclate de rire.

-Vas-y, c'est pour toi, fait-il en récupérant sa tasse.

Il s'enroule dans le drap jusqu'à la taille, puis, ni une ni deux, se jette sur le plateau. Il goûte à tous les mets, un par un, les œufs brouillés, les tartines, la salade de fruit. Adam le regarde s'extasier en sirotant son café. Ange se tourne vers lui, puis lève un sourcil, perplexe.

-Tu manges pas?

-T'inquiètes pas pour moi.

Ange pique un morceau de pêche dans la salade de fruit et le lui tend.

-Fait aaah.

Adam rit de bon cœur, puis obéit à la requête. Il ouvre la bouche et croque le morceau de fruit. Ange pose la fourchette puis s'approche, pose une main sur sa cuisse et embrasse sa joue. Adam sourit doucement. Il tend la main vers son visage et caresse sa joue. Leurs lèvres, comme deux aimants, se rencontrent de nouveau. Ils s'embrassent, soupirant silencieusement. Ange s'éloigne légèrement, puis pose son front sur celui d'Adam. Il ferme les yeux. Le vent souffle faiblement, les feuilles bruissent, les oiseaux pépient joyeusement. On n'entend rien d'autre que les bruits de la nature, et ceux de leurs lentes respirations. Ange sourit. Il chuchote doucement, comme s'il avait peur de perturber l'atmosphère cotonneuse et tamisée qui les enveloppe comme une couverture douillette.

-C'est calme ici.

Adam soupire, apaisé.

-Oui...

-Là d'où je viens, y a du bruit tout le temps.

-Pareil. En partie pour ça que je me suis barré. Les bruits violents, ça m'angoisse.

-Ah?

Ange ouvre les paupières et redresse légèrement la tête. Il sourit doucement et ouvre la bouche pour répondre quelque chose, mais Adam se racle la gorge et s'éloigne. Puis il désigne le plateau du menton, l'invitant à terminer son repas. Ange attrape la fourchette et se remet à manger avec appétit, puis le regarde du coin de l'œil siroter tranquillement son café.

-T'es pas d'ici, donc ?

-Nan.

-Je dois dire, un mec jeune et sportif comme toi, ça se pêche à la ville, d'habitude. Pourquoi tu te planques dans un hameau comme celui-là ? C'est sûr, y a anguille sous roche.

Adam pousse un reniflement amusé.

-Qu'est-ce que tu fuis ? Les flics?

Il éclate de rire.

-N'importe quoi, j'ai une tête de fugitif?

-T'as peut-être juste de la famille dans le coin, en fait ?

Il secoue la tête.

-Pas franchement.

-Ah bah je vois pas, alors ! T'es sur la piste du Graal ou bien?

-T'es con!

-Retraite spirituel? Expier une faute?

Adam cligne des yeux et ricane. Il passe une main dans ses cheveux et détourne le regard.

-Ou est-ce que tu vas chercher tout ça?

Les épaules du garçon s'affaissent légèrement. Il pose sa fourchette.

-T'as raison, je dis des conneries, puis c'est pas mes affaires, murmure-t-il avec un sourire timide. Je me tais. Pardon.

Adam secoue la tête.

-Non, c'est moi, fait-il, précipitamment. Je... Je suis désolé.

Sa voix se brise sur ses derniers mots. Lorsqu'il les prononce, son regard se perd quelque part au-dessus de l'épaule de l'interlocuteur. Il s'immobilise puis se racle la gorge. Craignant que la gêne s'installe, il secoue légèrement la tête puis lui rend finalement son sourire. Ange s'avance à genoux jusqu'entre ses jambes. Il lui prend la tasse des mains, la pose sur le plateau, puis se laisse aller contre lui, plaquant son torse contre le sien. Le drap glisse de ses hanches, découvrant ses fesses et ses cuisses nues. Il pose doucement ses lèvres sur les siennes. À son oreille, il chuchote.

-Je sais même pas pourquoi tu t'excuses. T'y es pour rien.

Adam sent son cœur se serrer. Ange l'enlace de ses bras rassurants et l'embrasse langoureusement. Puis il quitte sa bouche et se redresse, pose une main derrière la tête du jeune homme et l'amène doucement contre sa poitrine, caressant doucement ses cheveux. Il embrasse le haut de son crâne.

-Pas ta faute. C'est rien.

Adam serre le jeune homme contre lui, enlaçant fermement sa taille entre ses bras. Il tourne légèrement la tête et l'embrasse au niveau du plexus solaire. Puis il repose sa tête contre sa poitrine, ses épaules se détendent, un long soupir longtemps retenu s'échappe de ses poumons. Il resserre sa prise autour de sa taille et se laisse tomber sur le lit, emportant le garçon dans sa chute. Ils rient, puis poussent tous deux un soupire d'aise. Ange embrasse distraitement le torse de son amant, qui caresse ses cheveux tendrement. Adam baisse les yeux vers lui et examine son beau visage. Ses yeux bleus et limpides sont un océan de paix dans lequel il plonge sans crainte.

Nos offenses pardonnéesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant