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Adam se regarde dans le miroir. Ses yeux vert foncé sont ternis d'un voile songeur. Il passe une main dans ses cheveux humides de sueur, brossant ses dents énergiquement. Il fouille son regard à la recherche de sa raison. Elle semble bien cachée. Il l'appelle, la somme, lui crie en pensée de revenir à sa place, mais elle n'écoute pas, têtue. Il examine son visage, ses paupières à demi fermées, ses sourcils épais froncés sévèrement, les coins externes de ses yeux plissés, sa bouche pincée. Il ne reconnaît pas cette expression. Il hausse les épaules. Il est fatigué. Il rince sa bouche et saute dans la cabine. L'eau chaude délie lentement ses muscles contractés. Il pousse un gros soupir, extériorisant ainsi sa tension et sa frustration. Lentement, il se détend. Il roule des épaules, étire ses bras. Il lève ses yeux fermés vers le jet chaud et puissant et frotte son visage. Déjà, son esprit est ailleurs. Lassé, il n'essaye même plus de le contrôler. Il a bien vu que chacune de ses tentatives se soldaient par un échec honteux. Alors il le laisse divaguer. Caresser en pensée l'inconnu qui occupe en ce moment son propre lit. Son propre territoire. Envahit par la pire des tentations. Son havre teinté par l'odeur de l'intrus désirable. Ses propres draps enroulés autour du corps svelte. Il imagine la douce chute de rein, il pense aux cuisses fermes. Il soupire, les yeux fermés, et plante ses dents dans sa lèvre inférieure. Ses mains se meuvent d'elles même, elles courent le long de son ventre puis de son pubis, jusqu'à son membre, déjà levé. Il l'empoigne, vaincu. Il pose la main contre la paroi humide de la douche et entame un lent va et vient. Il se remémore la voix feutrée, la bouche pulpeuse. Il s'imagine empoigner les fesses rondes et les écarter pour les pénétrer sans répit. Il pousse alors un faible gémissement. Brusquement, il rouvre les yeux. Le souffle court, il prend sa tête entre ses mains et fait un pas en arrière. Il attrape le thermostat et tourne sèchement vers le froid. Il serre les dents, se rendant à l'assaut des poignards de l'eau glacée. Il pose ses poings serrés et son front contre le mur carrelé. Il pousse un grognement tant le froid le brûle. Il inspire et expire profondément. Le calme le regagne au fur et à mesure que l'eau ruisselle sur sa nuque et sur ses larges épaules. Il se redresse, remet l'eau chaude et attrape le savon d'un geste rageur.

Nos offenses pardonnéesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant