Off The Wall ", est sorti en août 1979, le même mois que celui de mon anniversaire.
J’avais vingt et un ans et c’est à ce moment-là que j’ai pris le contrôle de mes
affaires. Ce fut un des changements les plus marquants de ma vie. C’était très
important pour moi, car je prouvais ainsi, avec ce succès, que l’ex-" enfant-star " était
un artiste à part entière complètement intégré, et plébiscité par ses contemporains. "
Off The Wall " allait un peu plus loin que le groupe de danse que nous avions
concocté. Quand nous avions démarré le projet, Quincy et moi, nous voulions
exprimer des sentiments forts, passionnés, et nous en parlions pendant des heures.
Je continue de penser que c’est ce que nous avons réussi à accomplir avec la
ballade " She’s Out Of My Life " et dans une certaine mesure avec " Rock With You ".
Quand j’y repense, je
comprends comment " Off The
Wall " m’a préparé au travail
qui a donné l’album " Thriller ".
Quincy, Rod Temperton et la
plupart des musiciens qui ont
joué sur " Off The Wall " m’ont
aidé à réaliser un rêve que
j’avais depuis longtemps. " Off
The Wall " s’était vendu à
presque six millions d’unités
dans mon pays, mais je voulais
faire un album qui se vende
encore davantage. Depuis
toujours, depuis que j’étais petit
garçon, je rêvais de pulvériser
le record du monde de vente
de disques.
Je me souviens que chaque fois que je plongeais dans la piscine, quand j’allais
nager, je faisais un voeu avant de sauter dans l’eau. N’oubliez pas que j’ai toujours
su comment fonctionnait l’industrie du disque, et ce qui était ou n’était pas possible.
Moi, je voulais faire quelque chose de spécial. J’étendais mes bras au-dessus de ma
tête, comme si j’envoyais mes pensées dans l’espace, je faisais un voeu, et je
plongeais. Je me disais : " Mon rêve, c’est ça. C’est ce que je souhaite. " Et je
répétais ça chaque fois que je plongeais dans l’eau.
Je crois aux souhaits et à la possibilité que nous avons de les réaliser. Je le crois
sincèrement. Chaque fois que je voyais un coucher de soleil, je faisais un vœu juste
avant que le dernier rayon de soleil disparaisse à l’horizon. C’était comme si le soleil
avait emporté mon souhait avec lui. Et un souhait est plus qu’un souhait, c’est un
objectif qu’on se fixe. C’est quelque chose que votre conscient et votre subconscient
peuvent vous aider à réaliser. Je me souviens que nous étions en train de travailler
en studio avec Quincy et Rod Temperton sur " Thriller ". Pendant la pause, je jouais
au flipper et l’un d’eux m’a demandé : " Si cet album ne marche pas aussi bien que "
Off The Wall ", est-ce que tu seras déçu ? "
J’étais furieux, et blessé que la question soit seulement soulevée. Je leur ai dit que "
Thriller " ferait encore plus fort que " Off The Wall ". J’ai reconnu que je voulais que
ce disque soit l’album le plus vendu de l’histoire du disque. Ils ont éclaté de rire. Ça
leur paraissait un souhait plutôt irréaliste.
Il m’est arrivé par moments de perdre
mon calme pendant le projet de " Thriller
" parce que les gens qui travaillaient avec
moi n’arrivaient pas à voir ce que moi je
voyais. Ça m’arrive encore maintenant et
je pique ma crise quand je m’en aperçois.
Ils ont trop de doutes. Vous ne pouvez
pas faire de votre mieux, si vous doutez
de vous-même ; et si vous ne croyez pas
en vous, qui le fera ? Si c’est pour faire
aussi bien que la fois d’avant, à quoi
bon ?
La mentalité " On fait ce qu’on peut " ne
me convient pas du tout. Ce que je veux,
c’est faire mieux, aller toujours plus loin,
toujours plus haut. Je crois que nous
avons un vrai pouvoir, mais que nous
n’utilisons pas notre intelligence au
maximum de nos capacités.
L’esprit est assez puissant pour nous
permettre d’atteindre ce nous voulons. Je
SAVAIS ce que nous pouvions faire avec
ce disque.
Nous avions une équipe fantastique, des grands talents et des bonnes idées, et je
savais que nous pouvions réussir ce que nous voulions.
Le succès de " Thriller " a transformé la plupart de mes rêves en réalité. Ce disque
est effectivement devenu l’album le plus vendu de tous les temps et il est inscrit dans
le Livre Guinness des records mondiaux.
Nous avons travaillé très dur pour faire le disque " Thriller ", mais il est vrai que l’on
ne reçoit que ce que l’on a donné. Moi je suis un perfectionniste. Je peux en tomber
raide mort de fatigue... J’ai travaillé tellement fort sur cet album... C’était bien que
Quincy me fasse une confiance totale pendant ces séances. J’imagine qu’il avait eu
le temps de se faire une opinion en me voyant travailler sur " Off The Wall ". Il avait
écouté mes suggestions et m’avait aidé à réaliser ce que je cherchais sur cet album,
mais il m’a montré encore plus de confiance pendant " Thriller ". Il a compris que j’avais l’expérience et l’assurance requises pour faire ce disque et pour cette raison,
par moments, il n’était pas en studio avec nous. Je n’ai pas de doutes quand il s’agit
de mon travail. Quand j’entreprends un projet, j’y crois à cent pour cent. J’y mets
toute mon âme. Je pourrais mourir pour le réaliser. Je suis comme ça.
Quincy est brillant quand il s’agit d’équilibrer un
disque, de trouver le bon mix entre les tempos
rapides et lents. Nous avons commencé à travailler
avec Rod Temperton sur les chansons de l’album
"Thriller", qui devait s’appeler au départ "Starlight".
J’écrivais mes propres chansons pendant que Quincy
écoutait celles des autres, en espérant trouver celles
qui me conviendraient parfaitement pour l’album. Il
sait exactement ce que j’aime, ce qui me convient et
ce qui va marcher pour moi. Nous avons tous les
deux la même attitude en ce qui concerne les
albums : nous ne croyons pas aux faces B ou aux
chansons d’" albums ". Chaque titre doit pouvoir tenir
le coup, comme s’il s’agissait d’une face A de 45
tours, et nous travaillons toujours dans ce sens.
J’avais terminé plusieurs chansons, mais je ne les ai pas données à Quincy avant
d’avoir écouté celles qu’il avait sélectionnées. La première chanson était " Startin’
Something " et je l’avais écrite pendant que nous faisions l’album " Off The Wall ",
mais je ne l’avais pas montrée à Quincy. Parfois, j’ai une chanson que j’aime
vraiment beaucoup, mais je n’arrive pas à la montrer. Pendant que nous faisions "
Thriller ", j’ai gardé " Beat It " pendant longtemps avant de la jouer à Quincy. Il
n’arrêtait pas de me dire que nous avions besoin d'un bon titre de rock pour l’album.
Il me disait : " Allons ! Elle est où ta chanson ? Je sais que tu l’as. " J’aime mes
chansons, mais au départ je suis timide et j’ai du mal à la jouer aux gens, parce que
j’ai peur qu’ils ne l’aiment pas, et c’est une expérience trop pénible pour moi.
Il a fini par me convaincre de lui faire écouter ce que j’avais écrit. J’ai apporté " Beat
It ", je la lui ai jouée, et il a sauté au plafond. J’étais au septième ciel !
Au moment où on a commencé à travailler sur " Thriller ", j’ai appelé Paul McCartney
à Londres et cette fois je lui ai dit : " Si on écrivait des tubes tous les deux ? " Notre collaboration a donné "Say Say Say " et " The Girl Is Mine ".