Chapitre 4

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L'odeur de l'hôpital. Un rire. Une silhouette ou plutôt une ombre dans la nuit. Le cri d'une femme, mon cri à moi. Je ne veux pas, non, ne me laisse pas ! Le même cri effroyable qui résonne dans la pièce.

- Cathy !

Je me débats contre ces mains qui me retiennent les poignets. Je crie encore, aussi fort que je le peux.

- Cathy arrête ! C'est moi, c'est Andrew ! Je t'en prie !

La dernière réplique sonne comme une supplique. J'ouvre les yeux et je me retrouve éblouie par une intense lumière à laquelle je m'habitue rapidement. Je cesse tout effort en reconnaissant son visage, qui reflète son inquiétude. Il me prend dans ses bras, me retenant presque comme si je pouvais m'échapper en courant.

- Chut, c'est fini. Respire, tu es en sécurité. Calme-toi.

Je me cale au rythme de ses respirations et petit à petit mon souffle redevient calme et régulier. Sa main fait des vas et viens dans mon dos. Je m'accroche au t-shirt qu'il porte. Un détail de mon cauchemar me revient en mémoire.

- Il est parti.

- Qui ?

Des larmes coulent lentement le long de mes joues, tandis que mon frère se détache de moi pour me regarder droit dans les yeux.

- Qui est parti ,Cathy ?

- Je ne sais pas.

Je me relève en position assise en remettant mes cheveux dans mon dos. Je suis toute transpirante. Puis, je me lève pour marcher un peu dans la chambre. Plus le temps passe et plus mon rêve s'étiole, plus mon rêve disparait et mieux je me sens. La réalité me fait prendre conscience de l'irréalité de mon rêve, ce n'était qu'un cauchemar, rien qu'un cauchemar.

- Ça va mieux ? demande-t-il inquiet.

Je prends une grande inspiration avant d'hocher la tête positivement. Je lui réponds qu'il peut partir, il parait déçu mais s'en va tout de même. Il a des cernes sous les yeux, comme s'il ne parvenait pas à dormir. Dès qu'il referme la porte, je sens toute une série d'émotions m'assaillir. Les murs de ma chambre semblent converger dans ma direction. Les ombres sortent de l'obscurité et m'assaillent de toute part. Tout me rejette hors de cet espace qui pourtant devrait m'être familier.

Je sors prendre une douche pour rafraîchir mes idées. L'eau retire toutes les parcelles de mon corps qui ont peur, toutes celles qui sont terrorisées. En sortant je me sens fraiche, apaisée mais fatiguée. J'entends Andrew dans sa chambre, il n'est toujours pas endormi. Je retourne dans mon lit et m'assois contre le mur. Mon cauchemar semble vouloir refaire surface alors j'essaie de créer des histoires avec chaque élément que je vois. Les ombres de ma chambre semblent vouloir se colorer d'un rose agressif qui m'est insupportable. Je creuse mon subconscient à la recherche d'un détail important de ce rêve qui m'échappe. Les murs semblent à nouveau se diriger vers moi comme pour m'étouffer. Je me lève d'un bon vers mon armoire à la recherche d'un drap ou d'une couverture, n'importe quoi pourvu que ce ne soit pas rose. Je mets des t-shirts neutres sur mon réveil rose, mon pot à crayon rose, sur ma chaise de bureau rose. Je pousse mon tapis rose sous mon lit et enfouis mes coussins roses dans mon placard. J'attrape une sorte de couverture beige et épaisse que je dispose sur mes draps roses. Je me recouche, j'ai chaud mais pour la première fois, j'ai l'impression que cette chambre est la mienne.

________

La porte de ma chambre s'ouvre brusquement.

- Salut sœurette ! s'exclame la voix de mon frère.

Pour seule réponse, je retourne sous la couette afin d'éviter la lumière qui provient du couloir et me brûle les yeux. J'entends un bruit que je suppose être mon frère posant un plateau sur ce qui doit être le bureau, puisqu'il se situe vers la droite de mon lit. Puis plus aucun son, comme s'il était reparti. D'un seul coup, mon frère bondit sur mon lit. J'aurais hurlé si je n'avais pas su que c'était lui. Alors je sors ma tête de dessous les couvertures afin de le regarder droit dans les yeux. Malgré le noir de la pièce, je parviens tout de même à distinguer sa silhouette dans la pénombre et ses dents bien blanches qui me prouvent qu'il sourit.

- Debout la belle au bois dormant ! Le petit déjeuner est servi au lit pour mademoiselle la dormeuse ! ironise-t-il.

- Merci pour le petit déjeuner, mais tu exagères je n'ai pas dormi si longtemps ! j'ajoute entre deux bâillements.

- Rassure-moi, tu as perdu la mémoire, d'accord. Mais tu sais quand même lire l'heure, tu n'as pas oublié tout de même ! demande mon frère en faisant de gros yeux, qui est, je dois l'avouer, l'expression la plus drôle qu'il puisse faire.

Je me lève délicatement en position assise sur mon lit, afin de trouver quelque chose qui puisse m'indiquer l'heure. Je regarde autour de moi et découvre la couverture beige sur le sol, les changements que j'ai effectué cette nuit me reviennent en mémoire. Je comprends pourquoi je n'ai pas entendu la sonnerie et soulève le t-shirt qui recouvre le réveil. Je dois faire une drôle d'expression car mon frère se met à rire.

- Tu aurais dû me réveiller ! Maman est déjà parti travailler ?

En prononçant ces mots je me lève, afin d'aller ouvrir les volets. Lorsque le soleil frappe mon visage comme un éclair lors d'un orage, je fais une grimace qui fait, encore une fois rire mon frère.

- Oui, je lui ai dit pour le cauchemar, elle m'a dit de te laisser dormir mais je ne pouvais plus attendre !

Je mange mon petit déjeuner en silence, bien que ce ne soit pas vraiment l'heure de le prendre... Il me regarde manger sans rien dire, avec un sourire tendre. Ça me perturbe, si ce n'était pas mon frère je pourrais dire qu'il est un psychopathe. Mais heureusement pour moi, c'est mon frère.

- Pourquoi me dévisages-tu de cette façon ? je demande malicieusement.

- Pour rien, annonce-t-il simplement

J'aurais bien aimé lire dans ses pensées, peut-être que la moi d'avant savait instinctivement ce à quoi il aurait pu penser. La moi d'aujourd'hui en revanche ne sait rien.


Mon trou de mémoireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant