Un jour peut-être

Le combi jaune

"-Et où est-ce que vous vous rendez comme ça, jeune fille?
Cette phrase fit écho dans ma tête. Où allais-je, déjà?
-En Bretagne. Dans le Finistère si possible.
-Je vois, dans ce cas montez. Je peux vous emmener jusqu'au Mans."
Ainsi, je montais dans ce combi jaune sans savoir ce qui m'attendait.

Je regardais par la vitre, dans mes pensées les plus profondes comme à mon habitude. Mais, contrairement à cette habitude, la conductrice me sortit de ma rêverie.
"-Qu'est-ce que tu vas faire là-bas?
-Je rentre chez moi, j'ai raté mon train."
Je récitais parfaitement, sans fausse note, cette phrase que j'avais tant de fois répété dans ma tête.
Sur le siège avant droite se trouvait quelqu'un se fondant tellement dans le décor que je ne l'avais pas remarqué. C'était un garçon, il devait avoir 16 ans tout au plus. Quand il apperçu mon regard dans le rétroviseur, il tourna la tête, effrayé.

La femme alluma le radio-CD. Une musique s'en échappa. Les voix dans ma tête se turent. Cette chanson parlait de route, de voyage, elle était belle, même magnifique.
"-Elle s'appelle La route de nuit, de Raphaël. C'est la première chanson que j'écoute à chaque long trajet. Tu aimes?
Son regard opair se posa sur le mien à travers le rétroviseur. Elle me sembla bienveillante, et mystérieuse. Son passé sombre m'échappa aussi vite qu'il m'apparut. De fins ruisseaux coulaient le long de sa peau blanche. Cette femme me fascinait.
-Beaucoup."
De ce fait commença alors un dialogue muet entre nous deux. Elle mit d'autres musiques toutes plus belles les unes que les autres, jetant un coup d'œil vers moi dès qu'une chanson se terminait. J'appréçiais l'instant. Ici, je ne ressentais plus le besoin de sourire face à quelqu'un. De toute façon, je n'y arrivais plus depuis un certain temps. Il y avait d'autres moyens de partager à quelqu'un sa joie de l'instant présent.