Chapitre 2

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« Merde Ludo la roussette ! »

J'entends les hommes de mon passé regretter mon départ, mais je suis déjà loin. Les arbres et les buissons défilent à toute vitesse, jusqu'à ce que je débouche sur un sentier. Je m'arrête à l'abri d'une fougère.

Coup d'oeil à droite, personne. Coup d'oeil à gauche, j'aperçois une silhouette qui s'éloigne tranquillement : une femme ! Je n'en ai pas vu depuis si longtemps. Je me décide à la suivre discrètement, passant d'un bord à l'autre du sentier d'un battement d'aile. Je finis par arriver à son niveau.

Un gloussement de curiosité m'échappe, et voilà qu'elle se tourne vers moi : « Coucou toi ! Tu t'es enfuie ? T'en avais marre des mecs virils ? T'es pas la première ! »

Son sourire me plait, je pense qu'on pourrait bien s'entendre. Je me décide à la suivre et lui emboite le pas. Elle rit : « En route vers la ville ! ».

Nous avançons toutes les deux d'un pas sautillant. On est au mois de février, et le temps se découvre. Le ciel est bleu et le soleil d'hiver nous réchauffe tout autant qu'il nous éblouit. Elle me regarde, je la regarde.

Je crois qu'elle a envie de parler. « Tu sais, je pense que tu aurais beaucoup à raconter sur ton expérience parmi les "survivants" ! »

Elle mime des guillemets avec ses doigts, je la sens sceptique. « Ces survivants ne sont pas plus survivants que moi et mes copines. Ils sont condamnés, comme tout le monde. »


Je plante mon oeil rond dans les siens, et la pousse du regard à en dire plus. Elle s'exécute : « Il y a dix ans maintenant - tu n'étais probablement pas encore née - les hommes sont devenus stériles. Tous. Partout. Quand on s'en est aperçu, ça a été sacrément le bazar - et ça l'est toujours ! La fin du monde ! Il y a eu une période de frénésie et de tests médicaux en tout genre, mais tout a échoué, et on était un peu résigné. »

Je reste sans voix. Elle est inarrêtable. Elle poursuit ses explications en fronçant les sourcils, moulinant des bras et forçant sur sa voix : « Mais on a vite réagi ! Ah ça oui ! C'était l'étincelle qu'il nous fallait pour enfin mettre un terme à la société pourrie dans laquelle on était engluée. Les mecs devenaient inutiles ? Très bien ! Parfait ! Dehors ! »

Elle me regarde et un frisson d'excitation me parcourt l'échine. Et dans le reste du monde ? Je l'interroge en dessinant un grand rond avec mon cou. « Oh, je ne sais pas si c'est partout pareil, on s'est toutes et tous un peu replié sur nous-même. C'est dommage ».

Après une courte pause pendant laquelle elle a l'air pensive, elle pointe du doigt l'image d'une ville qui apparait entre les arbres : « On arrive ! Je vais te présenter à mes potes ! ». 

[Terminé] La Poule de l'ApocalypseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant