Chapitre 27 : je suis la mort

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Mes chiens hurlaient à mes côtés et c'était le cadet de mes soucis. J'étais leur maître le temps que l'Ombre soit occupé avec Onze.

Sur le chemin en direction du champs de citrouilles, je comptabilisai le nombre de choses que j'avais perdu ces derniers temps : la première fut Atom et je resterai choquée à vie de ce que j'avais vu. La seconde fut mes parents, ma mère au long terme mais en ce qui concerne mon père, il crèvera sûrement dans un fossé d'ici quelques semaines voir quelques jours. Après il y a ma maison et ça c'est de ma faute, mais j'étais vraiment en colère il faut le dire. Et enfin, la quatrième et dernière chose il me semble, c'est Billy. Il aurait dû m'écouter la première fois que je lui ai expliqué ce qu'il se passait, mais il a été aveuglé par Steve. Et aujourd'hui notre couple en a payé le prix. Il m'a insulté, et je l'ai frappé, deux fois.

J'arrivai à l'orée du champs et les démo-chiens se mirent à pousser des cris semblables à ceux des hyènes. Leur dangerosité de m'effrayait plus, je les connaissais par cœur à présent, même si il me manquait plusieurs détails en ce qui concernait de savoir comment ils faisaient pour voir sans yeux, entendre sans oreilles et sentir sans nez. Enfin bon.

Par pensée, je leur donnèrent l'ordre de descendre par le trou dans lequel j'étais tombée et ils ne bronchèrent pas, ils se bousculèrent presque pour entrer quand soudain, des voix me parvinrent. Le visage de Steve m'apparu.

-Steve ?! m'écriai-je.

Mais il ne parla pas, me fixa juste avec des yeux emplis de terreur. Vu d'en dessous j'avais vraiment l'air de ressembler à un monstre avec mes veines et mes yeux sombres, mes vêtements déchirés et ma cuisse ensanglantée. Mais tout s'éclaircit sur mon corps, mes yeux redevinrent bleus pour quelques secondes, le temps que Steve, Dustin, Lucas et Max remontent à la surface, mais le flagelleur revint prendre possession de moi. Je fus de nouveau secouée de spasmes, puis plus rien. Il m'avait eu, entièrement. Impossible de reprendre le contrôle.

Je tournai la tête vers eux, puis d'une main tremblante, sentis un champs magnétique se former entre mes doigts et la gorge des autres. Aussitôt, leurs mains se plaquèrent à leur cou et ils commencèrent à s'agiter.

Tue dit une voix dans mon esprit. Mais je ne voulais plus tuer, plus rien ni quoique se soit.

J'ai tué ma maman pensai-je. Je suis un monstre, je ne mérite plus la vie.

Alors je tentai de reprendre le contrôle sur moi, mais plus je luttai, plus je sentais un trop plein d'énergie dans ma tête. Je fis un pas, un autre, et baissai lentement mon bras, laissant déguerpir mes pauvres amis vers une Camaro bleu foncée. Je me laissai tomber dans le trou, puis, le refermai à l'aide de mon pouvoir. Les chiens m'attendaient en bas, tous assis, le visage fermé et m'observaient.

Ne lutte pas enfant

Je fis une grimace tant la douleur était grande. J'en avais assez de me battre. Je pourrai donner l'ordre aux démo-chiens de me déchiqueter ? Le supplice serait finis... Mais le flagelleur ne leur laisserait pas faire. Alors j'observai mes compagnons à la recherche de celui qui avait tué mon frère et je le trouvai, battant doucement sa petite queue de lézard à mon approche.

-Tu veux que je tue ? déclarai-je tout haut. Parfait !

Je tendis une main vers la créature et sentis à nouveau des forces magnétiques chatouiller le bout de mes doigts. Dart' (de son nom) commença à s'agiter, à pleurer, à frotter sa misérable face contre les racines à cause de la douleur mais j'accentuai la pression. Mes doigts se resserrèrent de plus en plus contre ma paume et quand mon poing fut totalement refermé, la tête du chien explosa dans un jet de bave et de sang noirâtre. Les autres démo-chiens ressentir la douleur tout comme moi, à cause du lien qui nous unissait. Bien que j'eus tué l'un de ses soldats, un de mes alliés, l'Ombre ne rata pas de me féliciter.

Bien dit le flagelleur dans ma tête. Tache de faire la même chose quand tu trouveras la fille.

Mes jambes se mirent en marche toutes seules, et les démo-chiens m'accompagnèrent au pas de course, trottinant à mes côtés comme de véritables chiens. Mes songes n'étaient plus les miens. En ce moment j'aurai aimé repenser à notre HLM minable de Chicago, à l'odeur du goudron après une pluie d'orage, le parfum des fleurs de printemps, entendre les rires d'Atom une dernière fois et me retrouver dans les bras réconfortant de Billy même si celui-ci ne voulait déjà plus de moi. Je n'ai jamais demandé à être ce que je suis, et plus je marchai, moins j'étais un monstre, j'étais pire : j'étais la Mort. La faucheuse était bien mignonne à côté de moi.

Plus les minutes passaient dans les sous-terrains et plus je m'oubliai. L'air infecté ne me faisait plus rien et j'avais la certitude que j'allai devoir tuer Onze contre mon gré, à moins que ce ne soit elle qu'il le fasse. Elle était l'ange et j'étais le démon. Elle était l'héroïne et moi le méchant.

Le sang bouillonna dans mes veines et mon cœur s'accéléra à la vue du portail. Je débouchai sur celui-ci et remarquai que très haut, très loin se trouvait la vitre des commandes du laboratoire où je m'étais trouvée il y a quelques jours. Et puis, en tournant un peu la tête, j'aperçu une sorte de cage en acier, un ascenseur suspendu dans le vide.

Tue-la ! hurla le flagélleur en moi. Il me faisait mal à la tête, ma jambe encore plus et j'en avais assez de lutter. Alors pour la dernière fois, je m'abandonnai à lui. Derrière mes prunelles sombres, j'observai ma main se dresser en direction de l'ascenseur et la cage se mit à vaciller. Elle était lourde, si lourde ! Je n'y arriverai pas. Je fixai alors le plus gros démo-chien et sifflai. À ce geste, il hurla et emmena sa meute avec lui à gravir les parois rocheuses en direction de la cage. Je tournai alors la tête vers le portail que Onze s'esquintait à fermer et aperçu le flagelleur mental. Il était là, juste derrière les couches orangées. Un souffle fit voler mes cheveux et de la fumée noir, semblable à celle qui m'entourait émana du portail, tourbillonnant doucement vers Onze et Hopper.

Je ne pouvais voir ce qu'elle faisait, mais en provoquant l'Ombre, elle me provoquait et me faisait mal, tellement mal ! Je hurlai de rage, libérant la fumée autour de moi et l'envoya avec la force de mes bras en direction de la cage. Avec une force extraordinaire, elle frappa l'ascenseur et brisa une chaîne, faisant balancer la machine en l'air. Sans m'en rendre vraiment compte, j'étais fière de l'étendue de mes pouvoirs et regardai mes mains s'entourer de nouveau de brume. J'aurai dû lutter, aider la pauvre gosse comme je l'avais dit mais je n'étais plus suffisamment forte. Et moi qui me croyais sournoise... Mais le portail grésilla et les extrémités se mirent de nouveau à se rejoindre, comme si quelqu'un cousait une blessure. Je sentis le monstre s'affoler en moi.

-NON NON NON ! hurlai-je d'une voix tellement grave et inhumaine.

Le flagelleur retira sa fumée noire à mesure que les deux dimensions se séparaient. J'avais mal à cause de Onze, et elle n'arrêtait pas. Allai-je mourir ? De cette manière ?

La lumière baissa d'intensité et quand se fut le noir complet, je tombai au sol comme un poids mort, et je ne sentis plus rien, le passage entre les deux dimensions avait été rompu.

Et dans un dernier souffle je chuchotai :

-Au revoir Billy.

J'étais enfin délivrée.

𝙇𝙤𝙫𝙞𝙣𝙜 𝘽𝙞𝙡𝙡𝙮 | 𝙎𝙏 - book 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant