Le Morceau

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Je jouais comme il me demandait. Si je m'arrêtais, il me couvrait de coup. Je ne faisais plus attention autour de moi. Je me contentais de jouer encore et encore. Je ne faisais plus attention aux cris de mes parents. Mon père comme à son habitude criait et se déchaînait sur ma mère. Je jouais de plus en plus rapidement. Je ne me concentrais que sur le piano comme mon père l'avait toujours voulu.

J'entendais ma mère crier derrière moi, je l'entendais insulter mon père. Mais moi, je restais à jouer du piano. Je ne devais pas être là, je ne devais pas me concentrer sur autre chose. Mon père allait me frapper sinon , mon père allait frapper ma mère. Je devais jouer le plus parfaitement possible. C'était ce que mon père avait toujours vu, que je fasse tout comme il faut. Que j'excelle dans chaque domaine. Le piano, le violon , le dessin, la guitare, le chant, la danse, les cours. Tout y passer. Tout devait être parfait. Si je ne faisais tout ça, il me laisserait tranquille. J'avais peur, il me faisait peur. Il était dangereux. Il allait tuer ma mère, il allait me tuer. Jouer encore et encore, c'est ce qu'il voulait. Je devais être parfait, je devais tout faire parfaitement. Je ne devais pas faire quelque chose de mal. Mon père posa sa main sur mon épaule. Je ne devais pas m'arrêter. Je l'entendais malgré le fait que je sois en train de jouer. Il disait que ma mère devait être comme moi, qu'elle devait tout faire parfaitement. Il sortit un pistolet et le pointa sur ma mère. Je devais continuer de jouer, j'avais peur. Je tremblais énormément, j'avais peur. Je devais me calmer donc je fermai les yeux et me concentrais seulement sur les notes. Je devais jouer encore et encore. Mon père criait de plus en plus fort. Je ne devais rien dire, je ne devais rien dire. Ma mère le suppliait d'arrêter. Il lança sa bouteille de bière sur le mur. Un bout de verre vint se plantait dans mon bras. J'avais mal, j'avais mal. Mais je ne devais pas m'arrêter, je me mis à pleurer. Je continuais de jour. C'était toujours le même morceau, les mêmes notes. Je ne changeais pas de morceau. Je jouais celui que mon père préférait. Il n'y avait que moi qui pouvait le calmer. Mais non, il ne se calmait pas , il ne voulait pas poser son pistolet. Non, il allait la tuer. Je ne pouvais pas le laisser faire. Il n'y avait que moi pour le sauver. Je ne devais pas le laisser faire, je devais faire ce qu'il aimait. Je ne pouvais pas abandonner ma mère. Je ne pouvais pas faire ça. Je suis responsable de tout ça. J'étais le seul à pouvoir la sauver.

Mon père ne pouvait pas faire ça . Aujourd'hui il allait trop loin,  il était prêt à la tuer. Il n'était plus avec nous. Pour l'instant c'était quelqu'un d'autre. Ce n'était plus mon père. L'alcool avait pris le dessus. Il ne se contrôler plus lui même. Je ne pouvais pas l'aider à se contrôler. Pour sauver ma mère, il fallait que je me sacrifie moi. J'avais peur, j'avais peur, j'avais peur. Je ne savais pas si j'étais capable de me sacrifier. Mais je le savais, je savais que si j'arrêtais de jouer c'était moi qu'il allait tuer. Mais est-ce qu'il ne tuerait pas ma mère même si je me sacrifiais? J'avais peur, je me sentais mal. Le bout de verre me faisait mal. Je ne voulais pas qu'elle meurt , je ne voulais pas. J'avais peur , j'avais peur. Mon père cria encore plus, il mit le pistolet sur la tempe de ma mère. Elle criait de plus en plus. Je regardais les touches du piano. Je les regardai, je plongeai dans un univers fait de blanc et de noir. Je me coupais du monde petit à petit. Je ne voulais pas rester dans ce monde. Le monde où ma mère allait mourir par la main de mon père alcoolique. J'avais peur, j'avais peur. Je continuais de jouer encore et encore ce morceau.

Mon père tira sur ma mère. Le sang gicla sur moi. Mon flan droit était recouvert de gouttes de sang plus ou moins grosses. Mon père se mit à pleurer et lui tira dessus une nouvelle fois. Il pleurait de plus en plus. Je continuais de jouer alors que le sang était sur moi. Je continuais de jouer alors que ma mère était morte, étendue sur le sol de notre salon. Mon père lança une nouvelle bouteille de bière. Il tira de nouveau sur ma mère. Il s'en voulait. Il s'en voulait. Il s'en voulait. Il savait qu'il avait quelque chose mal. Il était revenu parmi nous. C'était de nouveau mon père. Mais maintenant c'était un meurtrier, celui de ma mère. J'avais peur, j'avais peur.Il pouvait toujours me tuer. Je continuais de jouer encore et encore. Mon père se tua après m'avoir pris dans ses bras. Son sang éclaboussa mon flan gauche. J'étais couvert du sang de mes deux parents. Je continuais de jouer encore et encore le morceau que mon père aimait. J'étais seul, j'étais seul, j'étais seul.

Recueil D'OSOù les histoires vivent. Découvrez maintenant