Après l'espoir, la liberté. L'année 1982 marqua un tournant dans l'éternité de Callista. Sa nouvelle mission consistait à ramener l'âme d'une femme qui aurait dû mourir depuis longtemps, dans un délai d'un mois maximum. Des activités de ce genre, elle en avait réalisé des centaines. Confiante, elle se promena dans le centre de la gigantesque banlieue, traquant l'esprit de sa victime. Plus vite elle parviendrait à la charmer, plus vite elle pourrait rentrer. La pluie tomba sans prévenir, se reflétant dans la lumière blafarde des lampadaires. La succube commença à courir, sentant sa proie se rapprocher à grande vitesse.
— Et bien alors ma belle, as-tu envie de mourir ce soir ?
Callista fixa la moto qui était parvenue à l'éviter. Sa propriétaire enleva son casque, libérant une cascade de cheveux bruns qui s'arrêtait aux épaules.
— Un chat a-t-il volé ta langue ?
Sans aucun doute, il s'agissait de sa cible.
— Désolée, j'étais surprise.
La motarde rit, ces iris noisette pétillant de malice.
— Pourquoi une jolie fille comme toi se promène-t-elle toute seule dans ce quartier ? Avec ta tenue, les ennuis ne vont pas tarder à te trouver.
— Je cherchais de quoi égayer ma nuit. Et toi ?
La brune sourit.
— Baisse-toi.
Elle sortit un revolver dissimulé sous sa veste en cuir et tira sur un homme.
— Moi ? Je viens de terminer mon travail. Je t'emmène faire un tour ou tu vas tenter de t'enfuir pour contacter la police ?
La démone n'eut pas besoin de réfléchir.
— J'accepte avec plaisir. Au fait, je m'appelle Callista.
— Telly, enchantée. Allez, monte.
La rousse obtempéra et, surprise par la puissance de l'accélération, s'accrocha fortement à la conductrice. Son parfum, mélange de café et de jasmin, aurait pu envoûter la succube si elle avait été humaine. Elles roulèrent, une heure durant, s'éloignant peu à peu de la cité qui ne tarderait plus à s'éveiller, avant de s'arrêter dans le parking d'un minuscule motel accolé à une station-service.
— J'espère que tu n'aimes pas le grand luxe princesse.
— Tu sais, j'ai vécu bien pire.
Si Telly connaissait les Enfers, elle n'aurait même pas posé la question. Alors qu'elles grimpaient à l'unique étage par des escaliers de secours plus que douteux, Callista détailla la brune qui marchait devant elle. Pour une obscure raison, son âme l'attirait. Ni brillante, ni dépravée, elle offrait à la démone une sensation qu'elle n'avait pas ressentie depuis longtemps... Depuis les années 1425, avec un peintre des pays nordiques. Le désir. Ou du moins ce qui s'en rapprochait le plus dans son esprit complètement désintéressé du monde charnel. Pour une fois, elle ne serait pas dérangée par avoir des rapports avec sa victime en devenir. Pour une fois, elle ne subirait pas et ne rêverait pas de s'arracher la peau.
Les deux femmes pénétrèrent dans la chambre propre, mais désuète et aux murs abîmés. Callista s'assit sur le bord du lit et observa sa proie, qui ôtait sa veste et ses bottes. Elle portait à sa ceinture un holster et une attache pour un poignard. Il s'agissait donc d'une chasseuse de prime. La succube comprit immédiatement pourquoi elle devait la ramener en Enfer. Une âme sauvage et rebelle, ayant échappé à la mort, était un bien extrêmement précieux.
— Alors, dis-moi un peu Callista. Pourquoi me cherchais-tu ? Et pourquoi n'as-tu pas paniqué en me voyant assassiner quelqu'un ?
Telly, les bras croisés sur sa poitrine, ses yeux noisette luisants d'un mélange d'inquiétude et de curiosité, attendaient une réponse. La rousse, elle, ne put dissimuler sa surprise. En plus de neuf cents ans, le seul qui l'avait démasquée ainsi, avait été le peintre dont elle avait adoré la compagnie.
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Callista
FantasyCallista était née pour obéir. Soumise à ses parents infernaux, elle subissait une vie dont elle ne voulait pas... Jusqu'au jour où elle se décida à prendre la fuite. Dehors, la Lune riait. Une succube dans un couvent... Qu'est-ce qui pourrait mal s...