chapitre 5

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Une montagne de paperasses devant moi, j'ai l'impression que la journée ne va jamais se terminer. Je recule mon siège du bureau et m'étire en baillant, bougeant mes orteils, libérés depuis peu de mes escarpins, certes très beaux, mais horriblement inconfortables.


Lizzy, ma collègue vient frapper à ma porte, pile pendant ce court moment de détente.


– Tu es dispo ? J'ai quelqu'un qui recherche un logement de tout urgence et tu es la seule à l'agence pour le moment.


Je la pointe du doigt :


– Bin... et toi ?


Elle grimace :


– Non, je dois partir chez une cliente pour un état des lieux.


– Ah merde...


Bon ok, je n'ai pas l'air super enthousiaste mais j'ai l'impression que la journée n'en finira jamais, surtout avec tous ces dossiers devant moi.


– Bon, fais-le entrer ! capitulé-je, prenant dans mes bras la pile de papiers pour la pousser à un autre endroit.


Je me déleste de mon fardeau sur une commode, me tourne et tombe nez à nez avec le fameux Daniel. Il est habillé comme un putain de biker, une paire de jeans, trouée au niveau des genoux, un t-shirt blanc sur lequel il porte une veste en cuir, des lunettes d'aviateur accrochées à son col. Ses yeux clairs luisent de malice, son visage masculin arborant une expression moqueuse. Je me fige, tandis qu'il me détaille de la tête aux pieds. Son sourire s'élargit en découvrant que je n'ai pas de chaussures. Je me sens rosir, avant d'expliquer comme si tout était absolument normal :


– Le jour où vous marcherez avec des talons de quinze centimètres, je pense que vous pourrez comprendre. Quel bon vent vous amène ?


Je m'exprime de manière tout à fait inappropriée face à un client, mais... c'est le seul moyen que j'ai trouvé pour ne pas montrer que je suis déstabilisée. Merde, il pourrait faire flamber n'importe quelle petite culotte juste en faisant un clin d'œil. L'homme idéal en somme, beau gosse et jouant comme un dieu.


Ferme ta pomme, Loïse ! proteste ma conscience. Rappelle-toi, il est comme les autres, impossible qu'il est un cerveau !


Il interrompt mon échange interne quand il répond à ma question, sans se douter du tumulte qui m'agite.


– Je viens d'arriver et j'ai absolument besoin de trouver un logement. Peu importe le style, je veux juste un appartement qui correspond à mon budget. Si possible, proche du stade, avec un garage pour y protéger ma moto.

Je hoche la tête tout en rejoignant mon bureau. Je pianote sur mon ordinateur après l'avoir invité à s'asseoir.


– De quel budget disposons-nous ?


– Sept cent euros charges comprises si possible.


– CDI ?


– Oui, fonctionnaire dans l'éducation nationale.


– Ah oui ? Dans quel domaine ?


– Maître d'école.


Je suspends mon geste au-dessus de mon clavier. Il est instit ?


Il hausse les sourcils, peu surpris ma réaction. Je parviens néanmoins à me reprendre, même si l'imaginer en compagnie de petits enfants me paraît complètement loufoque.


Un flic à la maternelle.


Voilà exactement à quoi je pense ! Un film qui a bercé mon enfance, le gros costaud qui se trouve aux prises avec de minuscules bambins.


– Je viens d'une grande famille, j'ai toujours adoré les gosses. Leur apprendre les bases est un immense honneur je trouve.


Je reste bouche bée.


Mince, comment vais-je m'en sortir à présent ? Ce gars est beau, sportif ET intelligent ?


Je me racle la gorge, mal à l'aise. Je ne sais pas quelles mauvaises actions j'ai pu faire pour que le bon dieu m'envoie une telle tentation sous le pif !

– Eh bien avec tout ça, je pense avoir plusieurs propositions à vous faire, à voir celle qui vous correspond le mieux !


Nous passons la fin de journée à faire toutes les visites possibles, et en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire, il se retrouve clés en main. Son dossier est en béton armé, le propriétaire n'a pas émis la moindre protestation pour céder son bien à ce locataire.


Une fois les derniers papiers signés, je lui sers la main avec chaleur. Je suis ravie d'avoir pu réussir une nouvelle fois ma mission. Il la garde un peu plus longuement que nécessaire, faisant naître une douce chaleur sur mes joues.


– Pour fêter ça, un dîner, ça vous tente ?


Il accompagne son invitation d'un sourire charmeur. Je cligne des yeux, cherche la meilleure réponse à lui donner. Pourquoi le destin veut-il à ce point jouer avec mes nerfs ? Je me balance d'un pied sur l'autre, mordille ma lèvre sous le coup de l'émotion. Je meurs d'envie d'accepter, de laisser pour une fois mon cœur décider. Cet homme est un don du ciel, il est tout ce dont je n'ai jamais pu rêver. J'ai vingt-six ans, je vis encore chez mes parents, il serait temps que je pense à moi.


Pourtant la seule phrase qui sort de ma bouche suffit à réduire à néant toutes mes chances.


– Je suis désolée, mais je ne suis pas intéressée.



Love ball (terminée)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant