Chapitre 3

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Jeudi 8 Décembre 2016

Ça fait plusieurs semaines, quelques mois en réalité, que ce garçon passe systématiquement à ma caisse quand il vient. Ça fait aussi plusieurs mois que je fantasme sur lui. Il n'est pas très grand, il doit mesurer quelque chose comme un mètre soixante-quinze, par là. Il a le teint basané et les cheveux noirs. Des yeux marrons foncés, presque noirs. Je suis incapable de deviner sa nationalité. Espagnole ? Turque ? Maghrébine ? Son sourire est large et d'un blanc éclatant. Sa carrure est parfaite ; des épaules larges, musclées mais pas trop et j'imagine à quel point on doit se sentir en sécurité dans ses bras. Je ne peux pas m'empêcher de regarder ses mains à chaque fois qu'il dépose ses articles devant moi ou qu'il effectue son paiement. Elles sont larges et rassurantes. Oui, je suis fétichiste des mains d'Homme, un problème avec ça ? Son grain de voix est tout aussi parfait que son physique, douce et chaleureuse, et un peu enrayée par moment.

D'après ses potes, qui ne cessent de répéter son nom devant moi, il s'appelle Estéban. Enchanté beau Estéban !

Je vous parle de ce beau gosse aujourd'hui parce que je suis postée à la caisse des achats de la boutique, « boissons & bonbons », avec Anaëlle qui vient de m'interpeller un peu trop fort à mon goût.

- Beau gosse en vue Anaa !

- Avec un peu moins de discrétion, s'il te plait !!

Je lui souris comme une grosse gamine surexcitée. Je ne peux pas cacher ma joie et l'excitation qu'il provoque en moi quand je l'aperçois.

C'est la seule à qui j'ai parlé brièvement de ce beau mâle, sans entrer dans les détails et ma folle envie d'apprendre à le connaître dans tous les sens, si vous voyez ce que je veux dire. J'aime bien être ici quand il passe à ma caisse parce que je peux le mater plus longtemps. J'ai l'impression qu'il me regarde aussi, mais je dois surement me faire des idées. C'est probablement une coïncidence s'il passe toujours avec moi. Peut-être pas. Il a tellement de charisme que je peux sentir sa présence à des dizaines de mètres à la ronde, comme si j'avais développé un radar spécial Estéban. Rien que d'y penser, j'en ai la chair de poule. Merci Ana, mais je l'avais déjà repéré !

Le charmant jeune homme arrive avec sa clique, à mi-chemin entre les trois drôles d'Hommes et les sept nains. Il paraît toujours étonnamment timide mais, en même temps, très sûr de lui, c'est déconcertant. Je vous explique, il est toujours en avant, le premier dans la file, devant ses potes. Toujours celui qui mène la troupe, mais aussi celui qui ne parle pas et laisse les autres s'en charger pour lui. Le contraste est déstabilisant mais aussi étrange que ça puisse être, ça me plait énormément. Je suis inexplicablement attirée par lui.

Il tient un paquet de M&M'S dans la main droite et un Ice Tea dans l'autre. Même les yeux fermés je le saurais, il fait toujours ça.

- Bonjour, je lui dis poliment avec un sourire très timide et la voix peu sûre, légèrement grave. Aïe !

Il répond avec une pudeur identique à la mienne. Enfin, je crois que c'est de la pudeur. Je l'espère.

- Bonjour.

- Huit euros et soixante dix centimes, s'il vous plait.

Il répond en secouant sa carte sous mon nez.

Je lance la manipulation via l'ordinateur pour déclencher le terminal de paiement par carte bleue afin de procéder à la transaction.

- Vous pouvez faire le paiement sans contact, si vous voulez.

- Oui, merci.

Ses réponses sont tellement courtes qu'elles me mettent mal à l'aise. Son regard noir intense me déstabilise et me rend nerveuse. Il me déstabilise plus que le mystère de son silence. Je déchire le ticket de reçu du paiement par carte bancaire, attrape le ticket de caisse de l'autre côté et lui tend le tout, les mains tremblantes. Ses doigts, terriblement chauds, frôlent les miens dans un geste qui me paraît durer une éternité, tellement c'est agréable. Je veux le sentir encore.

Estéban : Imprévisible.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant