10 - Le trio

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L É O N I E

Après m'être lavée les mains, je me dirige vers l'entrée. Mes yeux s'écarquillent quand je découvre Caleb et Patrick en train de se scruter, les yeux plissés. Qu'ils sont mignons. Une chose me surprend encore plus, c'est le magnifique bouquet de fleurs violettes que Caleb tient dans ses mains.

— Bonsoir Caleb ! Que faites-vous ici ? demandé-je en poussant Patrick qui bloque l'entrée.

— Bonsoir, Léonie. Eh bien... Je... Heu, je vous ai apporté ce bouquet.

— Oh, merci, réponds-je en rougissant.

Je ne me rappelle pas la dernière fois où j'ai reçu des fleurs. Une agréable odeur s'en dégage.

— Je vous présente mon frère, Patrick. Ma sœur est également chez moi, à la salle de bain en ce moment. Voulez-vous rester souper avec nous ? proposé-je.

Je suis certaine de lire un léger soulagement sur son visage. Aurait-il pu croire que Patrick est mon petit copain ? Non, c'est ridicule. Caleb semble nous comparer un court instant, ce qui me fait rire. Tout compte fait, il a peut-être pensé ça et s'il a pensé ça, puis en a été soulagé, c'est que ...

Bref, je m'égare.

Je le vois lancer un regard triomphant à Patrick qui continue de le regarder suspicieusement. Je me retiens de rire face à cette scène ridicule entre les deux hommes.

— Avec plaisir, répond Caleb en pénétrant dans l'appartement.

Patrick referme la porte, tout en suivant Caleb avec intérêt et méfiance jusqu'au salon. Mode "grand frère protecteur" activé. Au même moment, Léonore sort de la salle de bain en, uniquement habillée d'un t-shirt et d'une culotte. Je commence déjà à rire lorsqu'elle découvre la présence de Caleb. Ma sœur devient rouge tomate, fonce dans la chambre en courant et jure un petit « merde ». Je me retourne pour regarder les hommes et vois Patrick mort de rire, ainsi que Caleb ... Choqué ? Oups, c'est vrai que je ne lui avais pas précisé ce petit détail.

— Donc vous êtes ... commence-t-il maladroitement, totalement surpris, une main sur sa nuque.

— Sœurs jumelles, le coupé-je en souriant.

— D'accord. Ce n'est pas courant.

— Oui, c'est sûr, se moque Patrick.

Je le remercie encore pour les fleurs et vais les mettre dans un vase ou quelque chose qui y ressemble. La minuterie du four sonne.

— À table ! annoncé-je de manière solennelle.

Tout le monde m'obéit et s'active pour prendre place sur sa chaise. Patrick prend une bouteille de Gamay pour servir avec la pizza et je lui demande de ramener aussi les sodas. Léonore vient s'asseoir avec nous, en saluant Caleb, l'air de rien et je fais les présentations. Patrick la regarde pince-sans-rire et elle le fusille, pendant que je dépose la première pizza, puis remplis son verre en souriant également. Je ne peux m'empêcher de l'observer, assis en face de moi. Il a l'air légèrement anxieux. Mon regard se dirige vers Léonore qui détaille Caleb, puis je guigne Patrick. Celui-ci l'observe sans gêne et je sens qu'il va l'interroger.

— Alors, Caleb. Que faites-vous dans la vie ? lui demande-t-il avec curiosité.

C'est parti.

— Je suis le représentant d'une société privée internationale qui fait des investissements dans différents domaines à travers le monde. Et vous ?

— Bûcheron. D'ailleurs, j'ai toujours mes outils avec moi. On ne sait jamais.

Bonjour la menace pas discrète. Je lève les yeux au ciel et lance un regard inquisiteur à mon frère, tout en mangeant ma tranche de pizza pour me retenir de l'engueuler.

— Sympa le travail au grand air et pas besoin d'aller à la salle de musculation quand on a fini la journée, répond Caleb avec un sourire malicieux.

Bon, la menace ne l'effraie pas le moins du monde et je ne peux retenir un sourire de satisfaction face à cette réponse bien trouvée. Patrick se renfrogne, pris à son propre jeu.

— Et vous ? demande-t-il à Léonore.

— Avocate, dit-elle avec un sourire diabolique, tout en faisant tourner le vin dans son verre.

— Intéressant, répond-il avec un sourire, avant de boire une gorgée de vin.

— Bon, vous avez fini, oui ? les coupé-je, ayant très bien compris leur manège.

Ma sœur et mon frère se regardent en souriant, alors que je leur lance un mauvais regard qui se traduit par « foutez-lui la paix. »

Je me lève pour aller mettre au four les deux autres pizzas. Le reste de la soirée se déroule dans une super ambiance. Plus les heures défilent, plus Caleb se détend. Mon frère a arrêté de le regarder de manière suspecte et ils parlent comme des gens normaux.

Nous mangeons le dessert. Patrick explique son travail à Caleb qui montre de l'intérêt et pose des questions précises et techniques. Le métier de bûcheron ne se résume pas à avoir une tronçonneuse et couper des arbres. Léonore nous raconte également les problèmes des derniers clients qu'elle a eu à défendre, c'est très intéressant. Je fais de même, en parlant de ma promotion que je n'avais pas encore annoncée et de l'arrivée de Soraya.

Patrick m'invite à le suivre. Intriguée, je le rejoins dans ma chambre et il ferme doucement ma porte.

— J'aimerais te poser une question importante, Léonie. Que sais-tu de ce mec ?

Son ton est neutre et il me fixe. Je vois dans son regard celui de notre père : mélange d'inquiétude et d'amour.

— Nous venons de nous rencontrer. Je l'ai vu plusieurs fois à l'hôtel et nous sommes allés manger au restaurant. Une fois. Je ne peux pas te dire grand-chose de plus, tu as appris ce soir ce que je savais déjà, expliqué-je calmement.

Ce qui se passe au club, reste au club. Y compris ce qui arrive après.

— D'accord. Bon, fais attention. Je ne veux pas te soûler, je sais que t'es adulte et tout ça, mais voilà... Je ne peux plus garder un œil sur toi et Léonore, comme je l'ai toujours fait. Alors, fais gaffe à tes fesses, s'il te plaît, dit-il d'une voix douce.

Son inquiétude me touche.

— Je te le promets, il ne m'arrivera rien, le rassuré-je, combiné à un sourire.

Nous nous prenons dans les bras pendant un instant. Patrick dépose un baiser protecteur sur mon front et nous retournons au salon.

À la fin de la soirée, Caleb me demande si je le raccompagne à sa voiture, ce que je confirme avec plaisir. Nous abandonnons mon frère et ma sœur dans la cuisine, où ils terminent de tout ranger et nettoyer.

Seuls devant la porte d'entrée de mon immeuble, son regard plonge dans le mien et le capture. Une bouffée de chaleur m'envahit. Ses yeux bleus m'hypnotisent. Cette soirée en sa compagnie a été géniale, bien que le présenter à Léonore et Patrick n'était pas du tout prévu au programme. Enfin, pas tout de suite. Je ne sais même pas si ça aurait fini par arriver.

Mes yeux font des va-et-vient entre les siens et ses lèvres. Cette envie soudaine de l'embrasser envahit mon esprit. Caleb est terriblement séduisant et ne parlons pas de ce foutu sourire en coin qu'il arbore en ce moment même. Tout en lui m'attire et c'est bien la première fois qu'un homme a cet effet sur moi. En présence de cet homme, je suis comme un papillon attiré par la lumière. Il a cette aura mystérieuse qui plane autour de lui.

Doucement, sa main remonte le long de mon bras, déclenchant la chair de poule sur ma peau. Elle vient se poser sur ma nuque. Ses lèvres viennent à la rencontre des miennes sans me laisser le temps de réagir. Un baiser subtil et délicat, mais aussi rapide qu'un éclair.

— À très vite,souffle-t-il dans mon oreille, avant de disparaître.

Mission échouée [Édité]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant