Ce jour-ci, le ciel fut recouvert d'une lugubre voile grisâtre, il neigeait agréablement.
Je m'assis, statique, observant les flocons de neige omniprésents voletaient dans le ciel gris, s'accumulant. La faim me grignotait petit à petit, je n'en pouvais plus de rester d'attendre comme ça, j'en déduisais que ma mère ne revint plus. D'autant plus que ce fut un calvaire pour mon père, il arrivait à peine à tenir sur ses pattes. Je ne cessa de ressasser les paroles de Petit Rêvasseur. Après sa mort, une partie de mon être s'était envolé. Je me sentais en partie vide. En outre, je décelais sur ces jours, des souffrances inéluctables et assidues. Voir des gens se faire massacrer sous mes yeux. De toute façon, leurs souffrances m'atteignaient partiellement. Je n'avais plus vraiment mal contrairement à autrefois, les effets n'étaient pas aussi intense. Malgré tout, si ma conscience était parvenu à ne pas chavirer, c'etait grâce à Petit Rêvasseur dont je lui devais une fière chandelle. Toutefois, bien qu'il ne soit plus là, il subsistera toujours au fond de moi ainsi que sa voix. Tout à coup, mon père, dans son état misérablement dégradé m'annonça d'un ton rauque :

«Je n'en peux plus... Il faut que... J'y aille.»

J'en étais persuadée qu'il partirait dans le but de trouver des vivres, il n'avait pas le choix, cela faisait des mois qu'il ne s'était pas alimenté. Ce qui voulait signifier que je devais rester à la crèche et attendre. Mon esprit amorphe et morne fut dans le doute. J'étais sceptique, je n'avais aucune envie de patienter à la crèche, et s'il lui arrivait quelque chose de dramatique ? J'eus soudain, un mauvais pressentiment et des appréhensions. Je vacillais entre le fait de rester, d'attendre et de partir avec mon père. Mais l'envie de partir avec lui était irrépressible ! Je m'exclamai donc :

«Je viens avec toi !

-Non... Tu dois rester ici...»

Il refusa ma demande d'une façon apathique.
Mon père commença à s'en aller sans se retourner, je le suivais, m'agglutinant à lui. Il avait l'air de m'ignorer complètement ou ne m'avait t-il pas remarqué ? Nous marchâmes longuement, à travers la neige frivolant. Le temps me parut écouler infiniment. Impatiente je ronchonnai, un peu affolée.

«Quand... On va arriver?»

J'avais peur de sa réaction, attendu que je le suivais durant un bon bout de temps. Je distinguais un léger air énervé sur son visage. Peut-être que si j'avais obéis et écouter ses propos, son attitude ne ressemblerait pas à celle-ci. Mon père se tut, aucun mot ne sortit de son bec, il fut silencieux tel la neige qui se déposait doucement. Je soupirai de soulagement, aussi bien que désagrément étant donné que la marche était pénible. J'observai les alentours, rien à l'horizon, nous étions seuls. Je baissai vite la tête, ennuyé par ce paysage inlassable.
Après de longues moments de marche, nous fûmes arrivés au large de la mer. Je percevais au loin la mer, de multiples glaciers et de nombreuses couches de neiges flottantes à la surface de l'eau avec des houles qui frappait la côte glacière ainsi que la brise marine qui caressait délicatement nos plumes. Pour la première fois que je voyais et faisais face à la mer, cela m'avait impressionné, mon cœur battait la chamade.
Soudainement, mon père se diriga vers la gauche, dérivant le chemin et longeant le large, non directement vers l'océan.

«Où vas-tu ? Nous avons la mer sous nos yeux» Demandai-je, étonnée

Il me répondit quelques bout de temps après.

«Il y a trop d'ennemi, ils ne sont pas perceptibles, mais ils attendent une proie, ils sont futés.

-Ah d'accord..»

Je me demandai bien quand allions-nous arriver... Mes petites pattes ne suivaient même plus ses pas ! Ma fatigue s'accroitrait de plus en plus. Je ralentis, le distançant peu à peu. Jusqu'à d'emblée, miraculeusement, j'aperçus de la nourriture, proche d'où j'étais, des poissons gisaient au sol s'offrant à moi, et se trouvaient au bord de la mer. Les poissons étaient étripés. Je me confrontais à un deuxième pesant doute, mon ventre criait famine, surtout celui de mon père. Suite à ce lourd incertitude, ma conscience refusait de suivre mon père et rejeta tout doute, facilement, je me laissais guider par mon instinct et je me jettai sans hésitation sur la nourriture. À zéro moment je ne pensais guère qu'un ennemi surgirait, crédule comme j'étais... Et je pris point compte du fait que les poissons étaient déjà en mauvais état, je ne me demandais même pas qui avait pu les attraper ou les dévorer ! Malgré ces petites contraintes, ils étaient comestibles et avaient l'air frais. Je les ramassai par le bec puis partis rejoindre mon père. J'espérais qu'il n'était pas allé trop loin. Mon père s'était arrêté, et me cherchait. Je revins enthousiasmement, d'un air candide, gai, presque en bondissant tellement j'étais contente de faire cette découverte, à un point où je délaissais ma faim et mes noirceurs. J'étais fière de ce que j'avais dégoté, je voulais qu'en quelque sorte, mon père me féliciterait, ou peut-être bien me récompenserait. Je voulais juste lui faire plaisir et lui montrer pour ainsi dire que j'étais forte je dirais. Je me rapprochai de mon père, jusqu'à où il se retourna en ma direction, je me hâtai vers lui guillerètement, insouciante de ce qui se trouvait derrière. Aussitôt que mon père m'aperçut dans sa ligne de mire, son visage se décomposa en mille morceaux, il se brisa, et fit refléter la terreur. Jamais je ne l'avais vu ainsi. Je n'arrivais à comprendre point, pourquoi une telle expression sortait comme ça ? D'un coup, arrivé si vite, presque à en faire peur. Mon père s'écria d'une voix agitée d'effrayeur :

«DERRIÈRE-TOI!»

Rappelle-Moi Ton NomOù les histoires vivent. Découvrez maintenant