Premier Contact

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C'est seulement à ce moment là que Bianca remarque qu'elle retient son souffle. Doucement elle le relâche en tremblant légèrement. Elle  reste immobile un instant, fixant l'endroit où il a disparut. Cédera ? Cédera pas ? Subjuguée ? Rationnelle ? Sa raison lui dit de fuir, mais pas son instinct. Au fond d'elle, au fond de ses tripes, au fond de son cœur, elle sentait, savait qu'elle devait découvrir ce qu'il en était. Pour son propre bien. Bianca secoue vigoureusement la tête, pour réorganiser ses pensées. Puis elle se fige, la tête haute, le regard fixe et les lèvres tremblantes elle scrute l'obscurité où l'autre à disparut. Inspiration, expiration. Une foi, deux fois, trois fois, quatre fois puis avance. Elle avance doucement, en silence sur le sol maintenant glacé. Pas après pas elle se rapproche de l'ouverture. Bianca se retrouve devant l'entrée, elle ne voit pas grand chose de plus. Il se trouve qu'à part les quelques cartons dans son champs de vision le reste lui est masqué part un voile noir opaque qui délimite la petite zone où elle se trouve dorénavant. Elle retient son souffle et d'un geste brusque dégage le tissu.

         Dans un froissement de tissus et le bruit d'une cale en acier tombant lourdement sur le sol le reste de la pièce apparaît. Un lourd bureau de sapin trône devant la seule fenêtre de la salle. C'est une large fenêtre ornée de multiples gravures, elle est entre-ouverte et laisse entrer le vent nocturne qui berce tendrement les rideaux ivoires. Elle ne peut regarder le reste de la pièce, son regard est attiré par ce qui se trouve sur le bureau. Une étrange sculpture abstraite y trônait et retenait inexorable l'attention de Bianca sans qu'elle ne puisse en détacher les yeux.

Elle s'approche vivement et s’accroupit à la hauteur de l'objet à l'aura magnétique. Penchant la tête à gauche, elle observe ce côté-ci avec attention. Le verre transparent à des reflets rouges sous la lumière émise par une bougie se trouvant plus à gauche qu'elle n'avait pas remarqué. De fins fils bleus formaient des dessins sur le verre. En partant de ce qui semble être une hanse, les lignes bleues se transforment en motifs : des fleurs, des oiseaux, de la végétation, des arbres, des motifs répétés en bandes avec des inter-vaux réguliers ; à eux tous ils formaient un drôle de paysage merveilleux. Intriguée par la suite du dessin, elle penche naturellement la tête à droite. Ces yeux continuent de suivre les lignes bleues qui se mêlent toujours en de magnifiques motifs.  Puis elle fait la moue. D'un coup les ligne s'arrêtent, net. Le verre, stoppé en lignes brisées est même fêlé à certains endroits. Par la suite, c'est la cassure. En-dessous, les éclats de verre manquants sont délicatement déposés sur le bois sombre du bureau. Perplexe, elle sursaute violemment lorsque retenti un bruit de chute dans la pièce attenante. D'un bond, elle se relève ; se saisit un bout de verre imposant et le brandit devant elle. Sa respiration s’accélère, la cadence des pas dans les salles voisines aussi. Droite, puis gauche, non devant, et de nouveau à droite, La course effrénée se poursuit dans tout le manoir. Cette course folle  serpente sans cesse dans l'étage avec une cadence qui augmente constamment et se poursuit sans but. Droite, gauche puis demi-tour suivit d'un tour quasi-complet de l'étage. Quasiment, parce qu'elle ne vient jamais dans la salle où se trouve Bianca. Alors que le capharnaüm environnant n'était plus qu'un cacophonie sans nom, tout s'arrête aussi brusquement que ça avait commencé. Plus un bruit. Silence total. Enfin si l'on ne prend pas en compte la respiration saccadée et le rythme cardiaque endiablé de Bianca qui résonne fortement à ses oreilles. Très légèrement  rassurée par l'arrêt des pas à l'autre bout du manoir, elle bascule la tête en arrière en soufflant de soulagement pendant que la tension dans son corps se dissipe.

Une main griffue se pose sur son épaule. Épouvantée, elle fait un saut d'un bon mètre en avant en se retournant, pointant son bout de verre comme elle tiendrait une arme. Dans la panique elle se prend les pieds dans l'un des lourds tapis et s'étale de tout son long sur le sol. Vive, elle ne reste étalée au sol de tout son long qu'une fraction de seconde. L'instant suivant elle est assise sur le sol les jambes repliées contre son torse, les bras lui servant d'appuis et le visage tourné vers la créature. Qui lève les mains en signe d'apaisement. Il attend un moment qu'elle se calme. Puis quand sa respiration est de nouveau normale, il lui désigne un fauteuil en cuir usé, témoin d'une époque lointaine.  Lentement, Bianca se remet sur ses pieds, se trouvant accroupie. Puis elle déplie lentement les jambes sans le quitter des yeux une seule seconde. Sans cligner des yeux. Une fois debout elle se décale d'un pas vers la droite. Déplace une mèche de cheveux qui c'est échappée de sa tresse, défaite après avoir était malmenée par le vent du balcon et sa rencontre fortuite avec le sol. Puis elle avance sa jambe droite, puis la gauche et a nouveau la droite quand elle s'immobilise à nouveau. Contrastant fortement sur sa peau de porcelaine, un filet de sang dégouline le long de son mollet. Le sang carmin, écarlate reflète éhontément la lumière de l'astre nocturne. Elle déglutit, n'osant pas regarder la blessure qu'elle sent pulser dans sa chaire, son regard fixé sur le visage de la créature qui elle s'est majestueusement affalé dans le fauteuil du bureau. À sa grande surprise ce n'est non pas une moue gourmande ou sadique qui étirent les traits de l'autre mais une grimace de contrariété. Troublée, elle fait le dernier pas lui permettant de s’asseoir dans le fauteuil en face de lui. Le fixant toujours avec un visage reflétant la plus pure incompréhension, elle se laisse choir sans regarder et manque de tomber à côté.

Bianca Où les histoires vivent. Découvrez maintenant