Je posais mes yeux sur le sol, regrettant amèrement mes mots. Ce que j'avais dis était certes vrai, mais je n'avais ni besoin de lever le ton ni de parler ainsi à Karel. Je m'en voulais de mettre emportée contre lui. Il n'était fautif en rien, et au contraire il avait toujours été là pour m'aider. Je me dirigeais à pas lourd vers mon bureau et en ouvrit le tiroir. Je sortis mon diplôme et le regardais, il était encadré et parfaitement protégé. Je tournais le cadre pour y voir le dos, "Mes plus sincères félicitations à la future plus grande scientifique au monde! Un pas de plus vers ton rêve! N'oublie pas, tout est perdu seulement quand tu décides que ça l'est!". J'aimais à relire ce texte, il me rappelais de toujours continuer lorsque je me sentais en bas du gouffre.
Je reposais délicatement le cadre à sa place et pris mon sac, le remplissant avec tout ce que je pu trouver utile d'ajouter: mon carnet à notes, une trousse contenant quelques stylos et crayons, mes lunettes, des pastilles à la menthe et un pot de miel. Puis j'enfilais mon manteau et je fermais la porte derrière moi. Je me mis à avancer au pas de course, et après plusieurs longues minutes, j'atteignis finalement la porte de la bibliothèque. Je posais ma main sur la poignée glaciale puis ouvrit la porte vers l'intérieur, provoquant le carillon doux d'une petite cloche.
L'air chaud et la senteur de la poussière et du bois vieilli vinrent se porter à mon nez. J'inspirais profitant de cette odeur qui était si familière et agréable. Je baladait mes yeux sur les gigantesques étagères remplies de livres par milliers. Mes yeux se levèrent vers le plafond, comme à leur habitude, se lançant bercer par le léger balancement du planétarium, il représentait le système Oltaire. Olt ne bougeait pas, la maquette de l'astre géant se contentait simplement d'être immobile laissant les autres planètes tourbillonner autour de lui, le Soleil, Urs, La Terre, Mernuch, Gayar...Je m'engageais entre les étagères, elles me surplombaient de plusieurs mètres, disparaissant complètement dans leur ombre.
Ayant dépassé les étagères, j'atteignit enfin les escaliers donnant sur l'étage. Les escaliers étaient en bois sombre les deux côtés étaient enlacés d'une grande rampe qui donnait l'impression de soutenir l'entière structure. De chaque marche s'échappait un grincement provoquant sous une quelconque pression, un nuage de poussière. Je m'empressais alors de monter l'escalier dont les marches gémissaient sous mes pas. Lorsque j'arrivais au sommet de mon ascension et je fus surprise de sentir les chauds rayons du soleil venir se poser délicatement sur ma peau.
Je suivis leur trajectoire et vis qu'ils venaient d'une fenêtre semi-ouverte où le vent faisait valser et virevolter le fin rideau blanc en accord avec le carillon à vent. J'entendis une voix familière dans mon dos et me retournais pour voir une dame assise derrière un bureau. "Cela faisait longtemps que je ne t'avais pas vue" dit-elle en me souriant chaleureusement. Je lui rendis son sourire et m'assis en face d'elle "Toi aussi tu m'as manqué Carlytie..." soufflais-je. Ses yeux bruns dont le temps avait abîmé les paupières me fixait. Ses longs cheveux argentés étaient balancés par la brise.
Elle vint poser sa main sur ma joue la caressant doucement tandis qu'elle soutenait sa tête avec son autre main "Tu as beaucoup grandi depuis la dernière fois qu'on s'est vu". Je souriais tristement à la dame et posait ma main sur la sienne. La dernière fois que nous nous sommes vu était il y a deux semaines. Elle ne parlait pas de moi, je le voyais bien. Carlytie devenait un peu âgée et ses souvenirs avaient tendance à s'emmêler les uns aux autres. Elle continuait à me parler comme si j'étais une autre personne. Ses yeux n'étaient jamais totalement fixés dans les miens lorsqu'elle me parlait mais perdus dans de lointains souvenirs. Karel me l'as dit un jour. Elle avait perdu sa petite-fille dans un accident, une jeune femme de mon âge, aux longs cheveux noirs comme les miens.
Il arrivait des fois que Carlytie m'appelle Anna, et jamais je ne l'ai rectifiée. Malgré sa mémoire, j'ai toujours été impressionné de voir que c'était la seule chose qui lui échappait. Elle connaissait chaque livre de cette bibliothèque et elle était capable de me parler de chaque livre en sachant parfaitement où il était rangé. Je relevais légèrement la tête et vis derrière elle une dizaine d'étagères vides dont tout le contenu était disposé dans des cartons. Mes lèvres ont légèrement tremblé "Alors...Tu t'en vas toi aussi Carlytie?". Elle suivit mon regard et ses prunelles vinrent rejoindre les miennes et se poser sur les étagères vidées de leur livres, de leur âmes.
"Il le faut bien Anna, l'ouragan arrive" murmura-t'elle, "Et il sera là avant la fin du mois". Je serrai mes mains fermement sur mes jambes retenant mes larmes. L'ouragan était en train de me voler tout ce que j'avais. Il effaçait petit à petit chaque chose qui avait fait qui je suis aujourd'hui. Une main vint se poser sur la mienne. Je levais la tête et Carlytie m'aida à me lever et me tira jusqu'à la rampe de l'escalier. Après une bonne minute de silence elle parla finalement, son regard se posant sur les étagères légèrement en contrebas "Il y a un moment déjà, je rencontrais une gentille jeune fille de 24 ans , elle cherchait des livres. Elle avait beaucoup de mal à trouver ce qu'elle cherchait car elle ne se repérait pas bien dans le rangement des livres." ria t'elle doucement. "La voyant chercher partout, je suis donc allée la voir pour lui demander ce qu'elle cherchait. Et elle m'as répondu des livres relatant sur les ouragans". Mes pupilles s'élargirent à ses mots, la situation me semblait étrangement familière.
Elle continua, "alors que je la renseignais, elle me parla de son but, sauver tout le monde d'un terrible ouragan, elle disait que ça l'importait peu de faire des sacrifices tant qu'elle réussissait. Elle s'appelait Hoang, une brave fille. Je me demande si elle a pu réaliser son rêve." prenant ma main dans la sienne. Je restais figée sur place. Elle se rappelait de moi? De mon rêve? Je riais doucement, une larme fuyant de mes yeux et je posais mes lèvres sur sa joue. "Merci pour tout Carlytie" à ces mots je sautais je me laissais glisser sur la rampe de l'escalier puis couru vers la porte quittant les lieux et continua de toutes mes forces en direction du labo de Karel.
Je savais ce que j'avais à faire. Je n'eu pas le temps d'entendre les dernières paroles de Carlytie lorsque j'eu disparu de la bibliothèque.
"De rien, Hoang" soupira la vielle dame.
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Le Postier Céleste
AdventureUne histoire vers à la fois l'aventure et le fantastique, faites la découverte d'un tout nouveau monde qui naquit ici bas. Montez donc avec moi sur mon navire et laissez moi vous guider à travers le vent et les tempêtes de mon histoire. Vous verrez...