Une histoire sans fin

16. Le début de la fin.

20 Octobre 2021

De nombreux jours passent, et je ne suis toujours que l'ombre de moi-même qui commence à remonter la pente petit à petit. Erin doit bientôt repartir et telle une mauvaise amie, je ne l'ai pas beaucoup vue. Elle veut absolument me voir avant de repartir.

Ce soir-là, je me décide enfin à la revoir. Nous convenons d'un rendez-vous dans notre restaurant favori. Pour la première fois depuis des jours, je prends plaisir à me préparer. J'enfile une robe en laine avec des collants épais. Je me maquille un peu plus que ces derniers jours. C'est le premier soir où je choisis de sortir et je veux en profiter. Je commence à aller mieux, et je veux profiter d'Erin avant son départ. Je ne sais pas dans combien de temps je vais la revoir. Je l'envie de pouvoir partir et revenir quand elle le veut.

Quelques minutes plus tard, je suis enfin prête. J'enfile mon manteau d'hiver, les températures se sont bien refroidies ces derniers jours. J'enroule une épaisse écharpe autour de mon cou et prends mon sac. J'éteins les lumières et je sors. Le restaurant ne se trouve qu'à quelques rues, je décide de marcher. L'air hivernal emplit mes poumons et passe dans les interstices de mon manteau. Je resserre mes bras contre mon corps, enfonçant mes mains dans mes poches et avançant plus rapidement.

Ces longues minutes de marche dans le froid me font perdre dans mes pensées. Je repense à ce message, envoyé par Connor trois ans auparavant et la longue conversation qui en a découlé avec les multiples conséquences pendant les semaines suivantes.

17 novembre 2018

Deux semaines se sont passés depuis ce fameux message, et me voici attablée à un restaurant que je ne connais pas en train de triturer une serviette en papier. Rapidement, elle ne ressemble plus à rien. Ma jambe tremble nerveusement. Je déverrouille mon portable pour la troisième fois, en sirotant un cocktail dont je n'ai pas réussi à retenir le nom.

« Je te dois des explications, retrouvons-nous au Purslane Restaurant. Samedi, à 19h30. »

J'ai reçu ce message il y a trois jours, et pourtant je me sens toujours aussi vide depuis deux semaines. Je remonte notre conversation sur plusieurs messages et tombe sur le message déclencheur.

« Ruby, je suis désolée. J'ai besoin de temps pour réfléchir à nous. Ce n'est pas toi le souci, c'est moi. Tu es vraiment une fille incroyable. Mais... je ne sais pas où j'en suis, j'ai besoin d'être seul un moment. »

Mon visage s'est décomposé dès les premiers mots, devant Erin. À la fin de la lecture du message, j'ai relevé la tête vers mon amie et j'ai ri nerveusement. Avant de m'effondrer. Ce soir-là, j'ai pleuré encore et encore contre l'épaule d'Erin, qui ne savait pas quoi faire si ce n'est me frotter le dos de réconfort. Je pense que c'est depuis ce jour-là qu'elle ne le porte pas dans son cœur. Le voir me briser le cœur en quelques mots l'a profondément mis hors d'elle.

Ce même soir, j'ai également bu toute une bouteille de whisky, alcool de prédilection en Écosse. Je n'ai pas compris et je ne comprends toujours pas ce message. Que s'est-il-passé pour qu'on passe à un dîner avec ses parents à ... ça ?

Puis, silence radio. Pendant une longue semaine, plus de nouvelles de sa part. Je passe alors en revue les derniers moments, essayant de comprendre le pourquoi du comment. La seule explication que je trouve, c'est mon « Je t'aime » trop soudain.

Pourquoi j'ai dit ça ? Pourquoi j'ai voulu encore aller trop vite ?

Au moment où mon cerveau va exploser à cause de mes interrogations et du trop-plein d'alcool de ces derniers jours, je le vois. Il entre, avec son habituelle allure nonchalante, dans le restaurant. Il referme son parapluie et le secoue pour faire tomber les dernières gouttes. Il passe une main dans ses cheveux mouillés, pour enlever sa capuche. Des gouttelettes tombent de ses longues mèches et il frissonne.