Souffle nocturne

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C'était le soir, les quatre membres de l'escouade dînaient tout en discutant activement depuis une bonne minute, surtout Erd et Auruo qui s'étaient lancés dans un débat sur la présence bien trop appuyée des brigades spéciales dans le centre.

"Vous faites trop de bruit. Au lit."

Ordonna le caporal en se levant. Les soldats soupirèrent mais obéirent et partirent faire la vaisselle avant d'aller se coucher. Petra était restée pour fixer le caporal silencieusement.

"N'as-tu pas entendu? Je vous ai dit d'aller au lit.

- J'avais entendu.

- Alors qu'y a-t-il?

- Je voulais juste vous parler de quelque chose, caporal.

- Et bien alors tu vas faire la vaisselle avec les autres, puis tu me rejoindras, je serai dans mon bureau."

Lui indiqua-t-il avant de s'éclipser. Elle l'écouta, remontant ses manches. Il se sentait fatigué, ce soir. Il montait les marches les unes après les autres, les trouvant interminables. Enfin arrivé à son bureau, il s'assit directement contre la table, ayant la flemme d'en faire le tour. Il attrapa des lettres qu'ils devaient terminer. Des lettres adressées aux familles des soldats disparus. Il desserra son foulard et souffla, se replongeant dans ces papiers qu'il détestait. Pour quels soldats tombés au combats seraient les prochaines? On toqua à la porte.

"Caporal, c'est Petra...

- Entre, c'est ouvert."

Elle apparut dans l'entrebâillement de la porte, timide. Le caporal continua de lire sa lettre.

"Referme."

Dit-il sans la regarder. Elle s'exécuta, avant de s'approcher de la fenêtre pour contempler le ciel.

"Oh, regardez, c'est la pleine lune, ce soir.

- La pleine lune ressemble toujours au visage d'une mère qui veillerait sur nous."

Elle le regarda et lui sourit. Un sourire éclairé par la lune d'opale que l'on pouvait voir au loin.

"Joliment dit.

- Bon, de quoi voulais-tu me parler?

- Rien de très important, je me demande même ce que je fais ici, c'est juste que... Pendant les repas, vous voulez toujours que nous restions tous dans un silence de mort, mais... Ils sont besoin de parler, de rire. Surtout après une expédition difficile...

- Est-ce là tout ce que tu voulais me dire?"

Il planta son regard froid dans celui timide de la jeune femme. Elle s'embrouilla devant ce caporal qui, le foulard desserré et l'air un peu plus décontracté, était terriblement séduisant.

"Pro... probablement.

- Probablement?

- Je voulais dire-... Je ne voudrais pas vous déranger plus longtemps, puis-je partir?

- Non.

- Ah."

Petra, qui s'apprêtait à sortir, s'immobilisa. Le caporal souffla encore, reposant finalement les feuilles.

"Vous n'allez pas bien?"

Demanda Petra, remarquant l'extrême fatigue du caporal. Il secoua la tête.

"J'ai de la foutue paperasse à remplir.

- Pourrais-je peut-être vous aider?"

Il secoua la tête une nouvelle fois.

"Travail de caporal. Approche.

- Euh... Oui?"

Elle hésita, puis avança. Il lui prit la main et l'approcha encore, jusqu'à poser son front sur son épaule. Elle était surprise, mais se mit après quelques minutes à lui caresser les cheveux lentement. Ils étaient doux.

"Que fais-tu?"

Demanda-t-il, curieux. Elle s'arrêta.

"Et bien, euh... Rien, caporal.

- Dommage, c'était bien."

Elle se remit à le faire, rassurée.

"Demain, que ferons-nous, caporal?"

Lui demanda-t-elle, perdue dans ses pensées.

"Demain? C'est loin. Pense à maintenant, plutôt.

- C'est plus fort que moi, caporal.

- Pourtant il peut se passer tellement de choses en une soirée..."

Chuchota-t-il, faisait frémir Petra. Elle avait mal entendu, c'était certain. Il n'avait pas pu lui dire quelque chose d'aussi étrange, surtout pas à elle.

"Ne dites pas cela, je risquerai de me méprendre, caporal.

- Te méprendre?

- Je ne veux pas croire que-...

- Que quoi?"

Il la regarda en plantant son visage à quelques centimètres de celui de Petra, leur nez se frôlant presque.

"Ah mais vous le faites exprès, ou quoi? Cela vous amuse-t-il de jouer avec le cœur de vos soldats?

- Juste avec le tien."

Murmura-t-il. Petra eut un frisson et ces mots résonnèrent dans sa tête. Juste avec le sien... Seulement elle, personne d'autre. Elle sourit, flattée d'être ainsi le centre d'attention de son caporal.

"Tu devrais sourire plus souvent."

Il posa sa main sur sa joue, effleurant ses lèvres de son pouce. C'était très troublant, surtout lorsque Petra n'arrivait pas à savoir ce que le caporal voulait. Levi laissa son regard se perdre sur cette peau rose qui l'attirait tant. Petra l'attirait tant. Une attraction incompréhensible qui durait déjà depuis plusieurs semaines, et là il était trop fatigué pour encore résister. Elle le voyait encore s'approcher, et ferma les yeux, n'attendant qu'une chose. Lorsqu'il le comprit, il ne put s'empêcher de lâcher un léger sourire, avant de poser enfin ses lèvres sur les siennes.

Une remontée dans le temps (Rivetra)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant