24 décembre.
En ce réveillon de Noël, les inégalités étaient plus visibles que jamais.
Certains fêtaient en famille cette fête auparavant religieuse, et aujourd'hui uniquement commerciale.
D'autres mouraient, non pas à cause du froid comme dans le passé, mais car cette période faisait grimper les prix de la nourriture.
Des hommes lassés des automates, quant à eux, se permettaient comme cadeau de Noël la « location » d'une femme.
Et d'autres , comme elle, répondaient à cette demande...
La prostitution faisait partie de ces choses ayant régressé depuis le 21ème siècle : là où auparavant on pouvait distinguer les femmes, dévêtues, dans les rues, la prise de contrôle des mafias locales, presque légales, les avaient fait rentrer en intérieur, et c'était désormais des bordels organisés qui accueillaient les clients d'un soir et leurs achats.
Elle était contente que cela se passe comme cela ; au moins elle n'avait pas besoin de geler dehors en l'attente d'un hypothétique client...
Enfin, c'était bien la seule raison pour laquelle elle était heureuse...
Cela faisait trois mois qu'elle était contrainte de se prostituer, s'étant faite pressé de tout ce qu'elle avait par les organisations du coin...
Eux, ça les arrangeait bien, ils en profitaient pour avoir un nouveau produit ; mais elle n'avait aucune idée de pourquoi ils faisaient ça...
Elle ne s'était jamais réellement endettée, seulement une centaine d'euros de temps en temps , mais depuis la mort de son fils, plus rien n'allait : lui qui permettait de ramener de l'argent à la maison avec son beau métier , servant le pays, avait disparu dans l'exercice de ses fonctions, comme disait ce beau pays...
Rien que d'y penser, les larmes lui montaient aux yeux...
Ce beau pays qui n'avait rien voulu savoir quand elle avait cherché à en savoir plus la mort de son fils, et qui au contraire avais même décidé de lui facturer son équipement perdu lui aussi au combat !
Pays de merde, pensa-t-elle pour la énième fois.
Alors, elle avait été d'obligée d'accepter un crédit pour payer...
Ce même crédit qu'elle devait rembourser à travers son corps, pour éviter que sa fille ne soit la cible de ces rapaces...
Voyant son 4e clients se présenter devant elle, elle ravala ses larmes, et comme un robot, cessa de penser pour faire le seul travail qu'il lui restait, s'imaginant autre part que dans ce lit, face aux sévices de cet inconnu.
Elle ne savait plus quoi faire.
On était le 24 décembre, mais elle n'en avait plus rien à faire.
Sa mère devait être en train de tapiner, pour ne pas changer, et son frère... Elle ne voulait même pas penser à ce que cet irresponsable devait faire maintenant.
Devant la route, elle réfléchissait à sa soirée ...
Aux hommes l'ayant interpellé dans la rue... Enfin, interpellé, kidnappés serait un meilleur mot !
Mais on était le 24, alors aucun témoin pour eux, ça devait les arranger...
Tout ça pour « parler affaires » dans une camionnette, avec un homme portant une veste coûtant plus que son loyer, lui expliquant que sa mère avait un crédit sur le dos, et qu'en tant que fille ainée elle en avait la responsabilité !
Enfin bon, ce n'est pas non plus comme si elle avait tout compris, chamboulé par tout ce qui se passait aussi rapidement...
Elle comprit juste l'essentiel.
Qu'elle devait signer le contrat qu'elle avait sous les yeux et exécuter l'ordre.
Sinon, elle et sa famille mourrait.
Et elle se retrouvait là.
Devant cette route sur laquelle elle avait été abandonnée par la camionnette.
À avoir signé un contrat qu'elle ne voulait pas.
Pourquoi ça devait être à elle de faire ça ?
Pourquoi sa mère, ou son frère ne pouvait pas assumer à sa place ?
Pourquoi c'était à elle de sauver la famille pour une connerie qu'elle n'avait pas faite ?
Les larmes tombaient sur ses joues, mais elle savait qu'elle n'avait pas le choix.
Ses bras emplis de trait frissonnaient sous le froid de ce réveillon, ou peut-être sous l'appréhension de ce qu'elle devait faire...
Une vie était inférieure à trois, et cela permettrait au moins de résoudre leurs problèmes...
Des simples mathématiques.
Alors, sentant une vibration dans sa poche, et voyant les flashs d'un de ces camions autonomes, elle pensa une dernière fois à l'assurance-vie qu'elle avait signée...
Et fit un pas en avant , faisant son dernier pas chargé de colère et de tristesse.
Nous sommes le 24 décembre.
Au même moment , une mère se prostitue pour que sa fille ne le fasse pas , une fille donne sa vie pour sa famille, et un homme apprend le suicide de sa sœur après avoir accepté de devenir la marionnette d'un homme qu'il ne connaît pas, pour ôter une vie en échange de celles de sa famille.
Et en ce jour, un homme reste présent partout, changeant la destinée de nombreux foyers .
Joyeux Noël.
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Le Temps ne résoudra rien.
De TodoRecueil de One shot se passant dans le futur , avec un point de vus sombre sur la société future qui y est dépeinte . À lire pour le plaisir ou pour (peut être) réfléchir. Les tags ne représentent pas tout les écrits mais une partie (mais tout les t...