Errances nocturnes

6.9K 347 81
                                    


Bella dort, la tête posée sur mon bras, le nez contre mon torse. Son léger ronflement me fait sourire. Après une discussion houleuse avec Charlie, durant laquelle j'ai été tristement banni de la maison, nous avons décidé ensemble d'ignorer son interdiction et de se retrouver le soir dans la chambre. A peine revenu, elle s'est blottie contre moi, prête à plonger dans le sommeil. J'ai beau l'avoir entre mes bras, chaude, embaumée de son odeur délicieuse, je n'arrive pas à me sortir de la tête ce qui s'est passé dans l'après-midi.

Jacob Black.

Ses pensées, sa détresse. Je revois toute la scène au ralenti dans ma tête, je ne comprends pas. Qu'est-ce qu'il s'est passé ? Quel était ce sentiment étrange d'appartenance qu'il a ressenti ? Cette panique, ce revirement total de personnalité ? Il a eu l'air de souffrir. De suffoquer, comme si son cœur allait sortir de sa poitrine. Mais surtout, pourquoi m'a-t-il demandé de rester ? Est-ce qu'il s'adressait vraiment à moi ? Peut-être n'avait-il plus la force de parler et pensait à Bella ? Mais c'est moi qu'il regardait... Qu'est ce qui s'est glissé dans la tête de ce foutu chien ?

Bella soupire dans son sommeil et je me rends compte que je serre les draps entre mes poings. Je relâche mes muscles et me tourne vers le plafond. J'en observe la peinture, ses craquelures, ses aspérités. J'essaie de me concentrer, de penser à autre chose mais rien n'arrive à me relaxer. J'extirpe mon bras de sous la tête de Bella, la repose doucement sur son oreiller et sors de la chambre par la fenêtre. Et si j'allais chasser pour me détendre ? ça fait un moment, il fallait que j'y aille de toutes façons.

°°°

Une semaine s'est écoulée sans que Bella ne revoie son ami le loup-garou. Elle en est malade d'inquiétude la pauvre. Elle a tenté de se rendre à la réserve chaque jour et à chaque fois Billy a refusé de la laisser entrer. Il dit que Jacob n'est pas rentré chez lui, qu'il est avec Sam et qu'il faut le laisser tranquille, qu'il reviendra quand il le jugera bon. Ça la rend folle de ne pas savoir ce qu'il se passe. Elle est distante avec tout le monde, même avec moi. Je crois qu'elle n'a pas digéré ma décision de ne plus la rejoindre le soir. Mais, plus que de vouloir obéir à son père, j'ai vraiment besoin de distance en ce moment. J'ai besoin de me retrouver seul, de me ressourcer. Je passe beaucoup de temps à me promener en forêt. Quand je n'y suis pas, je n'arrive pas à me détendre, c'est comme si la nature m'appelait.

Assis sur les marches du perron de la maison familiale, j'aperçois Alice et Jasper qui rentrent d'une session de chasse bras dessus, bras dessous. Jasper dépose tendrement un baiser sur le front de ma sœur et je me rends compte que je n'ai pas vu Bella de la journée. Je soupire, il a fait beau aujourd'hui, elle comprendra.

Le soleil est en train de se coucher. Les derniers rayons du jour me caressent les joues sans que j'en ressente la chaleur. Alice et Jasper sont rentrés, non sans m'avoir salué, je suis de nouveau seul. Seul face à la forêt qui m'appelle. Les arbres aux troncs noirs me semblent plus proches, j'ai l'impression qu'ils étendent leurs branches dans ma direction. Je ferme les yeux et secoue la tête. Qu'est-ce qu'il m'arrive ? J'ai l'impression de perdre la tête. J'ai toujours passé du temps dans la nature mais ça n'avait jamais été maladif à ce point ! Et le plus étrange c'est que j'ai l'impression d'avoir quelque chose à attendre de ces balades en forêt. Une rencontre ? Un gibier particulier ? Peut-être est-ce un autre vampire qui m'appelle ? Tout ça n'a aucun sens.

Je me lève et laisse mes jambes me porter jusqu'à l'orée du bois. Je pose ma main sur un tronc, observe les fougères et les arbres qui s'étendent devant moi. Je me demande...

« Fais chier. »

Une pensée lointaine capte soudain mon attention. Elle vient de loin, très loin, très profond dans la forêt. Elle est bien plus faible que les pensées de ma famille, dans la maison, derrière moi. Si faible, que je n'aurais pas dû l'entendre, pas dû la comprendre. Ça ressemblait à la voix de...

PerfectionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant