La promesse d'un lendemain

Doute et angoisse

Cette nuit j'ai encore fait le même rêve étrange. Je soupçonne que c'est un flashback de mon accident. Ça a l'air de coïncider avec ce qu'on m'a raconté. Je me suis donc une fois de plus réveillée en pleine nuit, le coeur battant à cent à l'heure.

Une fois calmée, j'ai regardé le ciel en essayant de compter les étoiles pour me rendormir mais Morphée ne voulait pas de moi apparemment. J'ai regardé le ciel se colorer petit à petit: mauve, bleu, cyan, rouge, orange,... J'aime regarder le soleil se lever, annonçant un nouveau jour. C'est un spectacle dont je ne me lasse pas, on dirait qu'un peintre colore la voûte céleste de multiples couleurs.

Aujourd'hui, mes amis sont venus me voir. J'étais tellement heureuse ! Néanmoins, je sentais une certaine distance entre eux et moi. Je n'ai pas insisté même si ça me peinait un peu, ça doit être difficile pour eux de voir leur amie à l'hôpital après être sortie du coma. Surtout que je ne dois pas être belle à voir, je me suis faite renversée par un camion quand même.

Ben n'est pas venu avec eux. Quand j'ai parlé de lui, un froid étrange s'est répandu dans la pièce en même temps qu'un silence lourd. Ils ont bredouillé des excuses que je n'ai pas complétement saisies mais aucun d'eux ne m'a répondu dans les yeux. Eux aussi ont vite changé de sujet. J'ai la désagréable impression qu'on ne m'a pas tout dit.

Ça commence à me faire peur. Est-ce que je deviens parano ? Peut-être que le fait de rester enfermée toute la journée joue sur mes nerfs? Ma meilleure amie, Mel, va passer bientôt. Je compte bien la cuisiner. Depuis le temps que je la connais, c'est presque comme une sœur. En plus, elle ne sait rien me cacher, je sais lire en elle comme dans un livre ouvert. En attendant son arrivée, je mets mon casque audio et je ferme les yeux, laissant mon esprit divaguer sur mes mélodies préférées.

Lorsque j'ouvre les yeux une grosse heure plus tard, je remarque que Mel est là, assise sur le fauteuil à côté du lit. Je suis horrifiée de ce que je vois: ma pétillante meilleure amie n'est plus que l'ombre d'elle-même. Le teint pâle, des poches sombres sous les yeux, les cheveux ternes et les yeux vides. Je remarque qu'elle a maigri aussi. Quand mon regard croise le sien, je ne peux m'empêcher de sentir les larmes me venir aux coins des yeux. Pareil pour elle, on se comprend d'un seul regard.

Elle se lève et s'assied sur mon lit. Doucement, elle passe son pouce sur mes joues pour effacer mes larmes.

- Ne pleure pas, Enora, s'il-te-plaît...

Sa voix est faible, brisée. Qu'est-ce qui s'est passé ? Je renifle faiblement et elle me prend dans ses bras en me caressant les cheveux d'une main.

Je ne sais pas combien de temps nous sommes restées comme ça, mais ça valait toutes les conversations du monde. Le doute que je ressentais ce matin s'est maintenant enraciné dans mon coeur : quelque chose s'est produit, quelque chose qui a un rapport avec Ben. Mel a dû supporter cet événement en plus de mon coma, ça expliquerait son état.

J'ai peur, peur de savoir. Mais je ne veux pas me voiler la face dans l'ignorance. Néanmoins, je n'ai pas le courage de questionner ma soeur de cœur, elle a assez de peine comme ça.

Lorsque j'ai entendu ses sanglots, je me suis dégagée pour la prendre dans mes bras et réitérer ses gestes. On n'avait pas besoin de mots, juste de soutiens.