Chapitre 1 : La Tombe des Revenants part.2

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Le chevalier à l'armure dorée était là, assis au centre de la pièce peu éclairée, et la lanterne projetait son ombre sur le sol, lui donnant une apparence presque menaçante. L'ambiance, bien que calme, s'était appesantie avec le temps. Euric ruminait toujours son désir de revenir, et se sentait piégé dans ce lieu inconnu. Soudain, un léger crissement de métal se fit entendre. Pas comme une arme ou un objet lourd, simplement celui de deux pièces métalliques qui se frotteraient légèrement. Euric fit mine de ne rien entendre, mais posa discrètement la main sur la garde de son épée, prêt à taillader quiconque tenterait de le frapper dans le dos. Il entendit un bruit de pas se rapprocher, lentement, et le cliquetis distinctif de chaînes qu'on aurait accrochés ensembles. Mais un raclement de gorge, suivit d'un "Drôle d'endroit, pas vrai ?" lui fit comprendre qu'il n'avait pas affaire à un ennemi. Sans se retourner, il acquiesça, en soulignant que l'espace étant clos, il était étrange que cet inconnu ait pu pénétrer les lieux comme ça. Euric, sans quitter la garde de son épée, se tranquillisa un brin, et se présenta.


Un rire sourd et cynique retentit alors. Surpris par ce relâchement, Euric se leva, et fit face à l'homme qui l'avait approché, pour découvrir un guerrier en armure de métal légère, ornée de pointes, portant un casque de combat lui aussi à l'apparence menaçante. Il avait à sa ceinture une longue chaîne enroulée, terminée par une tête de fléau garnie de pics. Contrairement à la sienne, cette armure couleur acier usé semblait destinée à effrayer, par ses ornements, sa forme et ses traits bruts. Ce guerrier, qu'on pouvait à peine qualifier de chevalier tant sa dégaine et son timbre de voix faisait penser à un mercenaire, se présenta sous le nom de Gundar le Broyeur de Crâne. Un surnom pour le moins évocateur, qui complétait à merveille le tableau que se faisait le bon Euric de son interlocuteur. Mais alors qu'il réfléchissait à comment lui annoncer qu'ils étaient tous les deux sûrement morts, et s'ils étaient bien alliés, le mercenaire dit à haute voix : "Si c'est à ça que ressemble le paradis, je change de religion illico. T'as vu ça, pas la moindre trace de vie, rien à boire, et aucune femme pour nous réconforter. On se moque de nous, crois-moi". À ces mots, Euric afficha un visage interloqué. Lui qui était un fervent défenseur de l'honneur et des valeurs de la chevalerie, voir quelqu'un d'aussi différent sur le plan moral, et apparemment martial, ne le rassurait guère. Gundar ne semblait même pas se soucier de savoir ce qu'ils faisaient ici, il avait manifestement déjà compris.


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"Bon, c'est pas tout ça, mais j'ai encore des choses à faire. Par où on sort ?" poursuivit-il "J'ai une princesse à sauver, et des rats à massacrer".

Gundar se dirigea après ces paroles vers un des meubles, et tenta, en vain, de le bouger. Pendant plusieurs minutes, il s'acharna contre le mobilier, puis le plafond, sans que rien ne cède face à ses coups de pieds. Il commença à pester, avant de se calmer au bout de quelques minutes de jurons fleuris. Euric souligna qu'il avait essayé tantôt, mais qu'ils étaient coincés ici jusqu'à nouvel ordre. Incrédule, Gundar s'assit en face d'Euric, et ils commencèrent tous deux à converser, sur qui ils étaient et d'où ils venaient, sans que l'un comme l'autre ne revienne sur les circonstances de sa mort. L'un était un chevalier venu d'une noble contrée occidentale, l'autre un guerrier assermenté à une armée dans un pays sur le déclin. Chose étrange, le pichet d'eau fraiche se vidait lentement, mais ne tombait jamais à court, et, pareillement, aucun d'eux ne sentait la faim le tirailler, malgré le temps qui s'effilait ... Ils étaient bien morts, aucun doute là-dessus.


Le temps continuait de s'écouler, et les deux hommes étaient vite arrivés à court de sujets de conversations. Lassé de regarder Euric dans le blanc des yeux, Gundar était allé se poser dans un coin, sur un vieux fauteuil, et s'affairait à nettoyer son arme, avec un tissu rouge qui avait sans doute déjà servit à cet usage. Euric, lui, restait à table, impassible, bien qu'inquiet en son for intérieur à l'idée de potentiellement passer l'éternité avec cet individu moralement ambigüe. Le mercenaire, lui aussi, était à cran, comme en témoignaient ses doigts, qui se crispaient régulièrement sur son boulet, et les sortes de grognements sourds qu'il émettait, étouffés par son casque.


"Excusez-moi, messieurs ? Pourrais-je savoir où je me trouve ?" Ces paroles surprirent Euric et Gundar, comme sorties d'outre-tombe. Une voix retentit dans la salle, calme, mais avec un timbre nobliaux qui fit immédiatement tiquer les deux guerriers. Un troisième homme avait surgi de nulle part, jaillissant de la pénombre pour se présenter à eux. De beaux habits, un rasage fin et précis qui laissait une forte barbiche, et une allure svelte et droite, il avait tout d'un bourgeois. Euric avait à peine la main à la garde, mais Gundar faisait déjà tournoyer son arme pour écraser ce personnage qui ne lui revenait pas. L'homme, observant la situation, se présenta sous le nom de Mycroft Mobray. Il reprit rapidement la parole, pour tenter de calmer ce qui ressemblait fort à un début de combat, en sa défaveur assurée : "Allons, entre morts, nous pouvons nous entendre, non ? Je crois comprendre que nous ne sommes pas là par hasard, en effet, la dernière fois que j'eus aperçu un homme en armure, c'était dans un récit historique. Et, de plus, vu le dédale où nous nous trouvons, je doute que commencer maintenant à nous entretuer n'augmente nos chances de sortie".

Euric trouvait cet homme pour le moins singulier. Il avait le verbe agile, et semblait raisonner avec pragmatisme, mais une pointe de sournoiserie se décelait sur son sourire. Et malgré que le chevalier n'appréciait guère les fourbes, en l'occurrence, cela faisait assez longtemps qu'il se triturait les méninges avec l'autre barbare, pour au final ne rien en tirer. Aussi il l'invita à s'asseoir, et à se présenter à eux. Mycroft, tout en restant très vague, se décrivit comme un joueur et un commerçant zélé, victime d'une tricherie qui l'avait conduite à la corde après un procès aussi sommaire qu'injuste. Euric cherchait un point commun entre eux, mais il peinait à faire des recoupements. Que ce soit au niveau du caractère, du statut ou des idéaux, ils semblaient tous les trois complètement différents. Ils passèrent ainsi quelques instants, lui et Gundar silencieux, tandis que Mycroft exposait des banalités, cherchant à tromper l'ennui et le silence qu'il trouvait de plus en plus pesant.



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Asgard - Chroniques de l'Entre-MondeWhere stories live. Discover now